Le site des décanteurs de Waremme est surtout connu pour son intérêt ornithologique mais il a été étudié sur le plan botanique par plusieurs auteurs depuis la fin des années 1970. On peut citer successivement HERMAN et DEPREZ (1980), DEPREZ et LERUTH (1981), SAINTENOY-SIMON (1990), MAHU et al. (2000).
Sur base d'observations effectuées le 13 août 1990 par J. SAINTENOY-SIMON, principalement dans les décanteurs situés à l'est du site, on note que les milieux et la végétation sont globalement très rudéralisés.
Un relevé effectué dans le bassin n°4, sur la partie moyenne des digues, montre: Matricaria maritima subsp. inodora (3.3), Cirsium arvense (1.1), Artemisia vulgaris (1.1), Polygonum aviculare (1.1), Rumex obtusifolius (1.1), Chenopodium album (1.1), Chenopodium rubrum (1.1), Sinapsis arvensis (1.1), ainsi que Rumex crispus, Persicaria lapathifolia, Atriplex prostrata, Atriplex patula, Tussilago farfara, Poa annua, Poa trivialis, Conyza canadensis, Papaver rhoeas, Cirsium vulgare, Alopecurus myosuroides, Lactuca serriola, Galeopsis tetrahit, Aphanes arvensis, Solanum dulcamara, Plantago major, Medicago lupulina, Juncus bufonius, Epilobium angustifolium, Epilobium parviflorum, Apera spica-venti, Myosoton aquaticum, ...
Les bords plus ou moins récemment exondés du bassin et les vases du fond sont envahis par une végétation luxuriante à base de Chenopodium rubrum (2.2), Chenopodium ficifolium (1.2), Chenopodium album (+), Atriplex prostrata (2.2), Persicaria lapathifolia (1.2), Polygonum aviculare (1.1), Amaranthus retroflexus (+), etc.
Des 'berges' en pente plus douce (décanteurs 5 et 6) sont envahies par des espèces de friche parmi lesquelles Daucus carota, Artemisia vulgaris, Elymus repens, Lolium perenne, Dactylis glomerata, Holcus lanatus, Picris hieracioides, Lactuca serriola, Cirsium vulgare, Cirsium arvense, Tussilago farfara, Torilis japonica, Trifolium hybridum, Equisetum arvense, Medicago lupulina, Senecio jacobaea, Odontites vernus subsp. serotinus, Conyza canadensis, Leontodon autumnalis, Hieracium sabaudum,... Cette friche est relayée sur les boues séchées par un groupement à Matricaria maritima subsp. inodora qui vers les vases encore humides se borde d'un liseré de Bidens frondosa, Ranunculus sceleratus, Echinochloa crus-galli, qui forment un Bidention fragmentaire et par quelques pieds de Typha latifolia. Vers le centre du décanteur, sur les vases en voie d'assèchement, se forme une ceinture de Chenopodium rubrum toujours aussi luxuriants.
Au sommet des digues existent localement des fourrés de Rubus sp. Sur terre nue on peut trouver exceptionnellement Coronopus squamatus. Sur les versants extérieurs des digues on observe Salix caprea, Salix viminalis, Acer pseudoplatanus, Sambucus nigra,... Vers le bassin n° 3, des filets sont disposés pour capturer des oiseaux et les baguer. Des fourrés de saules très denses existent à cet endroit, entrecoupés de friches où les Cirsium vulgare, Cirsium arvense, Urtica dioica, Rumex obtusifolius dominent. Dans les dépressions humides, Typha latifolia, Epilobium hirsutum, Persicaria lapathifolia, Artemisia vulgaris, Cirsium arvense, Matricaria maritima subsp. inodora se côtoient. Les mares aux eaux vertes sont envahies par des algues.
D'après MAHU et al. (2000) on observe sur l'ensemble des bassins, à la fois une végétation herbacée très dense avec une domination de plantes envahissantes : Urtica dioica, Rubus spp., Heracleum sphondylium, Artemisia vulgaris, et également une colonisation rapide des végétaux ligneux qui sont déjà majoritaires sur les talus extérieurs du site, ce qui contraste avec la situation des années 1980.
En effet, la réserve naturelle de Waremme est un ensemble de milieux qui évoluent. Elle n'est plus telle qu'elle était à sa création, tout en n'ayant pas encore atteint son stade d'équilibre ou de maturité (climax). Au départ, elle était composée de milieux artificiels liés à une activité industrielle, milieux totalement dépendants de l'action humaine (fauchage des digues, apport de boues dans les bassins). Cette activité s'est modifiée, la râperie a cessé ses activités, beaucoup de zones herbeuses ne sont plus fauchées, les apports de boues ont cessé. Ceci a eu les conséquences suivantes :
* là où le niveau d'eau ne s'est pas maintenu, plusieurs plantes en ont profité pour s'installer en force: citons Typha latifolia, Phragmites australis, Salix spp. sur les berge, Urtica dioica et Rubus spp. sur les digues ;
* les zones herbeuses n'ont subsisté que là où l'action de l'homme s'est poursuivie; pour permettre le passage aisé des visiteurs et des observateurs, certains sommets de digues sont fauchés annuellement, ainsi que les digues le long de la route pour la prévention de l'extension des chardons pour l'agriculture. Là, les arbustes sont absents et le sol reste couvert de différentes graminées, associées aux trèfles (Trifolium spp.) et à différentes plantes herbacées de petite taille.
* les zones de vases ont disparu ou presque, elles n'apparaissent plus que marginalement en cas de baisse du niveau des eaux (en particulier sur le bassin 6) ;
* des surfaces d'eau libre se sont maintenues ou même se sont étendues, par apport d'eau de la râperie et des autres bassins et par apports naturels (fluctuation du niveau d'eau de certains bassins avec les pluies) ;
* la recolonisation arbustive et forestière est en cours et s'accélère au fil des années en l'absence d'intervention (surtout dans l'ouest du site).
Par rapport à l'inventaire dressé par HERMAN et DEPREZ en 1980, on constate actuellement que pratiquement toutes les plantes inventoriées sont encore présentes. Il y a toutefois des modifications quantitatives, et il est certain que d'autres changements apparaîtront encore à l'avenir.
Bassin 1: C'est le plus ancien des bassins de décantation du site et est situé dans sa partie ouest. Il a été totalement comblé par les boues qui provenaient du lavage des betteraves. La végétation ligneuse, notamment le saule blanc (Salix alba) et le saule marsault (Salix caprea), recouvre l'entièreté de la surface. Aux endroits où le couvert n'est pas encore suffisamment dense, les orties (Urtica dioica) et les ronces (Rubus spp.) couvrent le sol. Ces dernières espèces sont également présentes sur le sommet des berges de tous les bassins.
Bassin 2: Egalement comblé, le bassin 2, malgré une végétation presque identique par endroits à celle du bassin 1, présente encore une zone couverte de roseaux (Phragmites australis). Cette espèce a fort affaire avec Urtica dioica et Galium aparine qui prennent le relais suite à l'assèchement, ayant déjà envahi certaines zones naturellement plus sèches. Sur la digue jouxtant le bassin 3, le sureau noir (Sambucus nigra) est omniprésent.
Bassin 3: Ne recevant plus d'eau de récupération depuis moins longtemps, la végétation arbustive s'implante progressivement, comme dans le bassin 2. Ce bassin est colonisé par la Urtica dioica, Cirsium arvense, Epilobium hirsutum, Epilobium angustifolium, Artemisia vulgaris, Heracleum sphondylium, etc.
Bassins 4 et 5: L'eau est présente sur toute la surface, excepté parfois en bordure où il subsiste quelques plages enherbées. Sur les berges, les ligneux s'installent, notamment les saules (Salix spp.) mais aussi Prunus avium, Sambucus nigra et Crataegus monogyna. La strate herbacée domine avec de nombreuses espèces des champs et des talus. Les berges du bassin 4, surélevées il y a quelques années, sont couvertes par une végétation herbacée moins dense avec ça et là, quelques ligneux. Matricaria maritima subsp. inodora forme parfois des massifs importants sur les digues et dans les zones asséchées. En 2009, un important herbier de Potamogeton pectinatus est visible dans le bassin 4, tandis que les berges exondées (en août) sont colonisées par Ranunculus sceleratus notamment (obs. J.-Y. BAUGNEE et E. BISTEAU).
Bassin 6: Le bassin 6 a été divisé récemment en deux zones. Il présente ainsi désormais plusieurs stades de colonisation des milieux humides, depuis l'eau libre, les plages de vases colonisées par Ranunculus sceleratus, Juncus effusus, Phragmites australis, et Typha latifolia, et une frange de saules (Salix viminalis, Salix alba, …). Ce bassin présente aussi, en bordure, des plages couvertes de plantes herbacées à grand développement : ombellifères, armoise... Sur les berges, les plantes annuelles et vivaces sont bien installées en dessous d'une strate arbustive composée principalement de saules (Salix spp.) mais aussi de Prunus avium, Sambucus nigra, Cornus sanguinea, Crataegus monogyna, Rosa canina s.l. et quelques exemplaires de Betula pendula. La Clématite des haies Clematis vitalba s'accroche parfois ça et là à quelques arbustes.
Ce bassin, le seul à présenter encore - au moins temporairement - de vastes zones exondées, a fait l'objet d'un relevé bryologique le 28 octobre 2008 par A. et O. SOTIAUX et A. VANDERPOORTEN (non publié). Une vingtaine d'espèces y ont été recensées: Barbula convoluta, Barbula unguiculata, Bryum argenteum, Bryum dichotomum, Bryum gemmiferum, Bryum klinggraeffii, Bryum rubens, Dicranella schreberiana, Dicranella staphyllina, Dicranella varia, Didymodon tophaceus, Funaria hygrometrica, Marchantia polymorpha, Phascum cuspidatum, Pohlia melanodon, Riccia cavernosa, Riccia glauca, Riccia sorocarpa, Riccia subbifurca, Tortula truncata. Il s'agit de mousses pionnières colonisant les sols sablo-limoneux ou limono-argileux, humides, neutres ou légèrement basiques, plus ou moins eutrophisés. La plupart d'entre-elles se retrouvent dans les champs cultivés, les éteules, les jardins, les plages nues dans les près... Elles sont donc assez fréquentes, à l'exception d'une espèce qui mérite une mention spéciale: Riccia cavernosa, hépatique à thalle typique des vases exondées méso à eutrophes, rare dans tous les districts phytogéographiques de Belgique.
En automne Bidens radiata, plante nouvelle pour la flore wallonne, a été observée sur la vasière du bassin 6; cette espèce a probablement été amenée par les oiseaux migrateurs (obs. E. Bisteau et J.-Y. Baugnée - id. confirmée J. Lambinon). Quelques néophythes ont été observés en 2008, comme Conyza canadensis, Echinochloa crus-galli et surtout Cyperus esculentus var. leptostachyus (det. J. Lambinon) qui forme un massif au début du chemin menant au bassin 6.
Intérêt faunistique (MAHU et al., 2000)
Le site abrite une station de baguage des oiseaux, supervisée par l'IRSNB et dont la permanence était tenue dans les années 1980-1990 par C. Pirotte, A. Charlier et C. Prosmans. Durant cette période, près de 29000 oiseaux appartenant à près de 150 espèces furent ainsi capturés, identifiés, bagués et ensuite relachés.
L'existence de plusieurs bassins toujours sous eau et une certaine tranquilité des lieux explique la présence d'une importante population de canards, qui est un des points forts de la richesse ornithologique actuelle de la réserve. Par rapport à la situation existant en 1980, le nombre d'espèces observées a presque doublé (passant de 8 à 13), et les nombres observés ont fortement augmenté.
Le Canard colvert (Anas platyrhynchos) est l'espèce la plus régulière et la plus abondante; c'est la seule espèce à nicher régulièrement (environ 10 couples). En hiver, des groupes atteignant 900 oiseaux sont parfois observés.
La Sarcelle d'hiver (Anas crecca) est l'autre espèce la plus régulière en hiver mais ne niche pas sur le site. Des groupes de 200 à 300 oiseaux ne sont pas rares.
D'autres canards sont susceptibles d'êtres observés en petit nombre, comme le Fuligule milouin (Aythya ferina), le Fuligule morillon (Aythya fuligula) nicheur en 1999 (3 couples), le Canard siffleur (Anas penelope), la Sarcelle d'été (Anas querquedula), le Canard pilet (Anas acuta), le Canard chipeau (Anas strepera), etc.
Le Tadorne de Belon (Tadorna tadorna) est un estivant plus ou moins régulier, de même que le Cygne tuberculé (Cygnus olor).
D'autres oiseaux d'eau sont nicheurs. La Foulque macroule (Fulica atra) compte jusqu'à 17 couples (JORTAY, 2002), et le Grèbe castagneux (Tachybaptus ruficollis) jusqu'à six couples. La Mouette rieuse (Larus ridibunda) essaie parfois aussi de nicher sur un îlot du bassin 5.
Couvrant autrefois de larges surfaces, les vasières sont maintenant limitées aux zones asséchées lors de la baisse du niveau d'eau, par exemple lors d'étés secs. A l'heure actuelle, elles sont les mieux représentées sur le bassin 6. Ces zones étaient le site de prédilection du Petit Gravelot (Charadrius dubius), aujourd'hui disparu comme nicheur de la Réserve mais que l'on peut encore observer en migration, principalement au printemps. C'est l'emblème de la Réserve naturelle. Une autre espèce, le Grand Gravelot (Charadrius hiaticula), se rencontre également en migration, quoique plus rarement.
D'autres échassiers s'observent encore aujourd'hui dans la réserve, malgré l'évolution défavorable de l'étendue des vasières. Citons comme espèces principales le Chevalier cul-blanc (Tringa ochropus) et le Chevalier guignette (Actitis hypoleucos), ainsi que les Chevaliers aboyeur (Tringa nebularia), sylvain (Tringa glareola), gambette (Tringa totanus), le combattant varié (Calidris pugnax), les Bécasseaux variable (Calidris alpina), minute (Calidris minuta) et cocorli (Calidris ferruginea), etc.
En automne 2008, un bécasseau maubèche (Calidris canutus), rare à l'intérieur des terres, a été observé sur le bassin 6.
La Bécassine des marais (Gallinago gallinago) et la très discrète Bécassine sourde (Lymnocryptes minimus) fréquente régulièrement le site en passage et en hiver. Le Vanneau huppé (Vanellus vanellus) quant à lui niche dans les champs aux abords de la Réserve et visite regulièrement les vasières.
La Poule d'eau (Gallinula chloropus) est régulièrement aperçue sur les bassins riches en végétation où jusqu'à 10 couples sont signalés certaines années.
Les roselières abritent quelques couples de Rousserolle effarvatte (Acrocephalus scirpaceus) et plus occasionnellement le Bruant des roseaux (Emberiza schoeniclus).
L'ensemble du site est également fréquenté par divers rapaces dont peu nichent toutefois localement.
Les parties boisées accueille une faune à caractère forestier, comme le Geai des chênes (Garrulus glandarius), le Pinson des arbres (Fringilla coelebs), la Fauvette à tête noire (Sylvia atricapilla), le Pigeon ramier (Columba palumbus), l'Epervier d'Europe (Accipiter nisus), la Corneille noire (Corvus corone), la Mésange charbonnière (Parus major), le Pic épeiche (Dendrocopos major), la Buse variable (Buteo buteo), la Chouette hulotte (Strix aluco).
Sur le plan herpétologique, l'espèce phare est le Crapaud calamite (Bufo calamita). Divers observations ont eu lieu durant les années 1980-1990. Sa présence actuelle devrait toutefois être confirmée. Le Crapaud commun (Bufo bufo) est aussi présent dans la réserve, de même que la Grenouille verte (Pelophylax kl. esculentus) laquelle a fortement régressé par rapport à la situation de 1980. La Grenouille rousse (Rana temporaria) est exceptionnellement observée.
Différents mammifères sont signalés, comme le Putois (Mustela putorius), le lapin de garenne (Oryctolagus cuniculus), ...