Cet ancien étang de forge situé en Thiérache belge a été décrit par DUVIGNEAUD (1972). De forme digitée, ce plan d'eau s'étend sur environ 6 hectares à cheval sur les anciennes communes de Villers-la-Tour (rive septentrionale de l'étang) et de Seloignes (sud).
L'étang de la Fourchinée est localisé à une altitude de 270 m en marge du vaste massif forestier formé par les Bois de Seloignes, de la Champagne, des Forges, de Saint-Remy et de Villers-la-Tour. Il est alimenté par plusieurs ruisselets aux eaux acides issus de ces bois. Au débouché de ces émissaires, le substrat est de type limono-vaseux, épais et plus ou moins fluide; la profondeur de l'étang s'élève progressivement vers l'ouest et dépasse 3 m au voisinage de la digue. L'exutoire se jette dans l'Eau Blanche. La berge occidentale est la seule en contact avec une zone d'habitat (de type rural) et avec une route, la rue de la Fourchinée qui emprunte la digue de l'étang.
D'après SYMOENS (1957), il s'agit d'un étang forestier de type ardennais aux eaux faiblement minéralisées, légèrement acides ou neutres, à faible conductivité, les ruisseaux qui l'alimentent traversant les schistes et grès acides du Dévonien inférieur. Il ne comporte que très peu, voire pas du tout, de dépôts vaseux.
Le niveau d'eau de l'étang peut varier considérablement en fonction des orientations de gestion.
DUVIGNEAUD (1972) a décrit en détail la flore et la végétation de l'étang de la Fourchinée. Par la suite, plusieurs botanistes ont prospecté le site de manière plus ponctuelle tout en contribuant à compléter ces données et à confirmer la présence de la plupart des espèces citées. La dernière visite remonte au 5 octobre 2016 et fait suite à une demande du comité de gestion de Natagora (obs. L.-M. Delescaille et J.-M. Couvreur - SPW/DEMNA)
Les ruisselets qui alimentent l'étang coulent sur des schistes et grès acides, ce qui est mis en évidence par la présence d'une aulnaie à sphaignes à la queue de l'étang, avec entre autres Viola palustris et Scutellaria minor (DUVIGNEAUD, 1972)
La végétation aquatique était peu développée dans les années 1970, avec Ranunculus peltatus, Persicaria amphibia, Potamogeton crispus, P. natans, Myriophyllum sp. dans les eaux profondes, Fontalis antipyretica, Alisma plantago-aquatica, Sparganium emersum en eau moins profonde. En 2016, la flore strictement aquatique est absente, en dehors de quelques Persicaria amphibia.
Le groupement le plus intéressant mis en évidence par DUVIGNEAUD (1972) se développe sur la vase exondée suite à une mise en assec ou une baisse importante et suffisamment longue du niveau d'eau: il rassemble Littorella uniflora, Elatine hexandra, Eleocharis acicularis, Ranunculus flammula, Ranunculus peltatus, Callitriche hamulata, Juncus bulbosus. Plusieurs bryophytes sont typiques de cet habitat, en particulier les hépatiques Riccia huebeneriana, rare au niveau européen et très rare et menacée en Région wallonne, et Riccia canaliculata, également rarissime et qui n'a plus été recensée après 1985 qu'aux étangs des Epioux (SOTIAUX et VANDERPOORTEN, 2015). Ces deux espèces ont encore été observées en octobre 2016, en même temps que Pseudephemerum nitidum (très abondant), Leptobryum pyriforme et Bryum sp. (det. J.-M. Couvreur).
Les petites banquettes herbeuses sont colonisées par diverses espèces du groupement précédent, mais aussi par des plantes du Cicendietum comme Isolepis setacea, Hypericum humifusum, Lythrum portula, Gnaphalium uliginosum, Cicendia filiformis, Juncus tenageia, Veronica scutellata, etc. Plusieurs de ces plantes comme Cicendia filiformis et Juncus tenageia ne semblent plus présentes actuellement.
Une frange assez étroite d'hélophytes montre surtout Phalaris arundinacea accompagné du rare Leersia oryzoides. En octobre 2016, cette dernière était présente sur la berge exondée sous une forme prostrée assez inhabituelle (obs. J.-M. Couvreur et L.-M. Delescaille). Carex vesicaria se développe aussi localement sur les berges mises à nu.
A quelque distance de la berge (1-2 m), se forme une prairie dense dominée par Molinia caerulea et Agrostis canina, où quelques arbres annoncent le début d'une colonisation forestière. Sur les berges herbeuses se développent différents bryophytes tels que Climacium dendroides, Fontinalis antipyretica, Mnium hornum, Kindbergia praelonga, Calliergonella cuspidata.
Des bosquets de Salix aurita, des fragments d'aulnaie à sphaignes colonisent principalement les queues d'étang, au débouché des ruisselets.
J. Duvigneaud avait aussi noté sur un petit replat surélevé une lande à Calluna vulgaris et Deschampsia flexuosa où apparaissent, aux côtés de plantes plus courantes, Nardus stricta, Danthonia decumbens, Melampyrum pratense, etc. Cette lande semble cependant avoir disparu depuis.
Si la flore du site est relativement bien connue, la faune peuplant l'étang de la Fourchinée demeure en revanche peu étudiée, en dehors des odonates, papillons de jour et oiseaux.
Avec au minimum 21 espèces recensées à ce jour, l'étang de la Fourchinée constitue un site odonatologiquement important à l'échelle de l'Entre-Sambre-et-Meuse. L'espèce la plus remarquable est sans conteste la cordulie à deux taches (Epitheca bimaculata), un anisoptère difficile à détecter et dont la reproduction n'a été constatée qu'en quelques rares localités wallonnes (entre autre à Virelles, non loin d'ici). On notera également l'observation d'autres odonates intéressants comme le gomphe à forceps (Onychogomphus forcipatus), l'anax napolitain (Anax parthenope) et la naïade au corps vert (Erythromma viridulum).
Les jonchaies sont fréquentées par un orthoptère intéressant, le criquet ensanglanté (Stethophyma grossum).
La périphérie forestière n'est pas dépourvue d'intérêt, notamment pour les papillons de jour qui regroupent plusieurs éléments intéressants comme le petit mars changeant (Apatura ilia), le grand mars changeant (Apatura iris), le nacré de la ronce (Brenthis daphne).