La réserve naturelle de la Basse Wimbe est localisée au centre de la dépression de la Basse Famenne ou Famenne schisteuse (district phytogéographique mosan). La réserve est composée d'une série de prairies et de bois, s'étendant depuis le NE du hameau de Génimont jusqu'au S de la Station des Télécommunications de Lessive, au centre du triangle formé par les villages de Lavaux-Sainte-Anne, Ave-et-Auffe et Lessive.
Le site est limité au N par le Bois de la Héronnerie (au SE duquel s'est implanté le Centre des Télécommunications de Lessive), et au S, par les collines calcaires de la Calestienne. Vers l'O et le NO, s'étendent de vastes surfaces herbagères au centre desquelles coule la Wimbe. La route entre Eprave et Ave-et-Auffe limite la partie orientale du site.
Le site adopte un profil topographique régulier : les zones les plus élevées culminent à une altitude d'environ 175 m, et les plus basses, à une altitude d'environ 150 m. Depuis la route entre Lavaux-Sainte-Anne et Lessive, les terrains ont ainsi un dénivelé de plus ou moins 25 m, jusqu'à la Wimbe ou le Bois de la Héronnerie.
Cette partie de la Famenne, installée sur des argiles lourdes peu perméables (résultant de l'altération des schistes frasniens, plus rarement famenniens), est essentiellement à vocation herbagère. Le paysage y est très ouvert, seulement interrompu par quelques lambeaux forestiers, dont plusieurs petites plantations de conifères. Ici, comme ailleurs en Famenne, la végétation a été plus ou moins profondément altérée par des opérations de remembrement, de drainage et d'amélioration des herbages.
La plaine de la Basse Wimbe est entièrement incluse dans la Zone de Protection Spéciale 'Lesse et Lomme' désignée par le Gouvernement wallon en novembre 1987, en exécution de l'article 4 de la Directive Européenne 79/409.
En fonction des espèces recensées dans les diverses prairies en réserve, il est possible de reconnaître la présence de certains groupes socio-écologiques.
La classe des Molinio-Arrhenatheretea, regroupant des prairies fauchées et/ou pâturées, fertilisées ou non, sur sols moyennement frais à très humides, comprend des espèces à large répartition, ubiquistes comme la fétuque rouge (Festuca rubra), la houlque laineuse (Holcus lanatus), le plantain lancéolé (Plantago lanceolata)...
Deux ordres sont bien représentés. L'Arrhenatherion elatioris se rencontre dans les prairies grasses, en général fauchées, régulièrement entretenues et amendées, sur des sols fertiles riches en éléments minéraux, moyennement secs à moyennement humides. Les espèces qui en font typiquement partie sont par exemple : le fromental (Arrhenatherum elatius), le crépis des prés (Crepis biennis), la berce commune (Heracleum sphondylium), l'avoine dorée (Trisetum flavescens)... Le vulpin des prés (Alopecurus pratensis), omniprésent, fait partie aussi de cet ordre. Son abondance est à mettre en relation avec l'importance d'azote disponible dans le sol. La végétation des prairies au lieu-dit 'Elly' sont représentatives de cet ordre. L'Arrhenatherion est aussi particulièrement développé dans les prairie situées au lieu-dit 'Justice'.
Le Cynosurion s.l., quant à lui, concerne des prairies pâturées régulièrement entretenues et fertilisées. La présence d'espèces de cet ordre est la conséquence d'épisodes plus ou moins prolongés de pâturage : pâturage du regain ou pâturage permanent. La crételle (Cynosurus cristatus), le ray-grass commun (Lolium perenne), la fléole des prés (Phleum pratense) ou le trèfle blanc (Trifolium repens) en sont caractéristiques. Le Cynosurion est spécialement développé dans les prairies au lieu-dit 'Derrière le Bois' à Lessive, régulièrement pâturées.
L'ordre des Brometalia erecti est très faiblement représenté (pelouses et steppes sur sols calcimorphes, moyennement humides à secs, non amendés, pauvres en azote minéral). Les zones en haut de pente, plus sèches, en abritent quelques éléments épars. La gestion devrait mener à terme au développement de cette végétation à cet endroit.
Les espèces mésophiles des ourlets forestiers (lisières des bois et des taillis) appartenant aux Origanetalia sont tout aussi peu fréquentes.
Les espèces des Molinietalia caeruleae étaient sans doute jadis beaucoup plus abondantes, avant le développement des pratiques de drainage et de fertilisation. Les prairies hygrophiles semi-naturelles de fauche, non amendées ni fertilisées, sur sols à niveau phréatique élevé au moins une partie de l'année (alternance sec-humide), ne sont guère plus présentes qu'à l'état de fragments. Ces groupements sont écologiquement les plus précieux. A défaut d'en posséder des surfaces significatives dans la réserve naturelle de la Basse Wimbe, on peut espérer que la gestion mise en oeuvre sera favorable à la restauration de ces milieux. Ce groupement est toutefois sensible aux apports de phosphore, et l'on sait combien est lente l'élimination de cet élément. Mentionnons pour le Molinion caeruleae quelques rares colchiques (Colchicum autumnale) ainsi que ophioglosse vulgaire (Ophioglossum vulgatum), orchis bouffon (Orchis morio) et silaüs des prés (Silaum silaus), disséminés surtout dans les prairies au lieu-dit 'Dri le Plantis d'Elly'.
Les zones de prairies mouilleuses inondées en hiver sur sols assez riches en éléments biogènes, mésotrophes à eutrophes, plus ou moins amendés, où se concentrent les espèces du Calthion palustris, sont rares. Elles ne concernent que quelques drains suffisamment profonds, gorgés d'eau en hiver ('Hambay', 'Drie le Plantis d'Elly').
Le Filipendulion (mégaphorbiaies non ou peu exploitées, ni amendées, sur sols constamment humides à très humides, riches en azote) est visible sous la forme d'une frange étroite le long du drain au lieu-dit 'Hambay' et dans le fond plus mouilleux au 'Drie le Plantis d'Elly', récemment débarassé de ses épicéas.
Les haies le long des drains ('Elly', 'Hambay') ainsi que celles délimitant les parcelles au lieu-dit 'Drie le Plantis d'Elly' complètent le système bocager. Elles sont essentielles pour l'avifaune. Leur composition végétale est à mettre en rapport avec ce que l'on observe en lisière des forêts caducifoliées de Famenne. L'aubépine à un style (Crataegus monogyna), le prunellier (Prunus spinosa) et l'églantier commun (Rosa canina) en sont les espèces principales. Le saule marsault (Salix caprea), et le saule cendré (S. cinerea) composent la haie aux endroits les plus frais.
La petite parcelle au SO du Bois de la Héronnerie (lieu-dit 'Hambay'), acquise par les RNOB et incluse dans la réserve naturelle, est caractéristique de la chênaie-charmaie calcaire de Famenne. Parmi les espèces ligneuses du sous-bois, on distingue le cornouiller mâle (Cornus mas), l'aubépine à deux styles (Crataegus laevigata), le bois-gentil (Daphne mezereum), le genévrier commun (Juniperus communis), le poirier sauvage (Pyrus pyraster) ou l'alisier (Sorbus torminalis). Un bois analogue compose quelques petites parcelles au lieu-dit 'Elly'.
La Fagne-Famenne est une région réputée herbagère. Cette situation fait suite aux défrichements de la forêt primitive, qui était vraisemblablement composée de chênaies-charmaies, et d'aulnaies ou d'aulnaies-frênaies dans les zones les plus humides.
La nature schisteuse du sous-sol et l'abondance d'argile ont rendu les sols de cette région imperméables. Ils sont fréquemment inondés, mais subissent également de fortes sécheresses. Sur ces terres peu rentables, les cultures ont toujours été rares, et les prairies dominantes. A la fin du 18ème siècle, et au début du 19ème, il semble que des troupeaux paissaient déjà dans les prairies humides des vallées. A cette époque aussi, de vastes pâtures-sarts, provenant du défrichement de la forêt servaient de terrains de parcours pour les troupeaux de moutons. Ces endroits se sont recolonisés naturellement après l'abandon de l'élevage des moutons au 19ème siècle.
Dans le terroir bocager de la Famenne et de la Fagne, l'exploitation agricole traditionnelle (pacage extensif des troupeaux, fauches tardives...) fut responsable de la formation d'un type particulier de prairie humide, riche en succise des prés (Succisa pratensis), en sélin (Selinum carvifolia), en silaüs des prés (Silaum silaus), et en bien d'autres plantes à fleurs, graminées et laîches. Dans les fonds de vallée, d'autres végétations se sont développées, en rapport avec l'importance des dépôts d'alluvions, et des mouvements de la nappe phréatique : les mégaphorbiaies à reine-des-prés (Filipendula ulmaria), et toutes leurs variantes, entretenues le plus souvent par des fauches, plus rarement pâturées.
Mais après la deuxième guerre mondiale, l'avènement de pratiques agricoles plus modernes (utilisation de fertilisants, drainage, pâturage intensif, fauche précoce, labour, ensemencement) a progressivement transformé ces milieux. En beaucoup d'endroits, les fleurs ont même cédé leur place à la crételle (Cynosurus cristatus) et au ray-grass commun (Lolium perenne).
La carte IGN 59/2 au 1/20.000 levée en 1868 et révisée en 1924 indique que l'occupation des sols de la plaine de la Wimbe au début du siècle était très proche de ce que l'on observe actuellement. A l'époque du levé de la Carte de Ferraris (1771-1778), la zone où est aujourd'hui installée la réserve naturelle de la Basse Wimbe correspond à des 'terrains de culture'. Le Bois de la Héronnerie avait déjà sensiblement les mêmes limites.