Le site de la Praie se trouve au nord du village de Cour-sur-Heure, dans la plaine alluviale de l'Eau d'Heure, affluent de la Sambre. Il est limité à l'ouest par la ligne de chemin de fer Charleroi-Couvin qui le sépare physiquement du cours de la rivière. Au sud se trouvent les premières habitations de la rue du Loto, ainsi qu'un plan d'eau privé. A l'est, la réserve s'arrête au pied du versant droit concave de la vallée assez redressé, où pointent des affleurements rocheux.
Au nord-est du village, l'Eau d'Heure décrit deux méandres successifs. La vallée a été creusée dans les roches de la formation de Burnot, dominée par des schistes, poudingues et grès d'âge emsien, identifiés à leur couleur rouge caractéristique. Le fond de la vallée est constitué d'alluvions modernes, c'est-à-dire des limons alluviaux, dont l'épaisseur n'excéderait pas 10 m. L'altitude est de 140 m au centre du site.
Selon C. DELMARCHE (Centre scientifique de la Région wallonne, avis site, mai 1998), cette zone naturelle d'intérêt paysager au plan secteur comporte un ensemble de prairies alluviales abandonnées.
L'espèce dominante est la reine des prés (Filipendula ulmaria). Elle est accompagnée de diverses hautes herbes comme l'achillée sternutatoire (Achillea ptarmica), l'angélique sauvage (Angelica sylvestris), le cirse des marais (Cirsium palustre), l'épilobe hirsute (Epilobium hirsutum), l'eupatoire (Eupatorium cannabinum), la lysimaque commune (Lysimachia vulgaris), la salicaire (Lythrum salicaria), la baldingère (Phalaris arundinacea), la renouée bistorte (Persicaria bistorta), la valériane officinale (Valeriana repens), etc. Il s'agit du cortège typique de la mégaphorbiaie du Filipendulion.
Quelques espèces du Calthion se rencontrent plus localement: populage des marais (Caltha palustris), jonc épars (Juncus effusus), fleur de coucou (Lychnis flos-cuculi), menthe aquatique (Mentha aquatica).
Le site présente également quelques fossés colonisés par le lycope d'Europe (Lycopus europaeus), l'iris jaune (Iris pseudacorus), le rubanier (Sparganium sp.), la menthe aquatique (Mentha aquatica), la massette à larges feuilles (Typha latifolia), la glycérie aquatique (Glyceria maxima).
Dans les secteurs plus élevés et donc plus secs, ce sont des espèces du Cynosurion et de l'Arrhenatherion elatioris qui dominent. A l'approche des habitations, la prairie prend un caractère plus eutrophe marqué par l'abondance de l'ortie dioïque (Urtica dioica), un collecteur déversant des eaux usées à ce niveau.
En l'absence de fauchage ou de pâturage, la prairie humide tend à se refermer progressivement au profit de fourrés de saules (Salix sp.) et de prunelliers (Prunus spinosa). Il faut y ajouter la présence de conifères sur une partie du site.
La réserve naturelle de la Praie a été décrite plus en détail par J. DUVIGNEAUD dans un document non publié adressé à l'administration wallonne au début des années 2000.
1. A l'est du site, le bas du versant droit de la vallée est occupé par une prairie de fauche dense et haute dominée par des graminées cespiteuses, surtout le fromental (Arrhenatherum elatius) et dans une moindre mesure la houlque laineuse (Holcus lanatus). Les espèces de l'Arrhenatherion y sont dominantes et devaient, dans le passé, fournir un foin abondant et de qualité. La cardamine des prés (Cardamine pratensis), le gaillet croisette (Cruciata laevipes), le vulpin des prés (Alopecurus pratensis), la patience des prés (Rumex acetosa), la berce commune (Heracleum sphondylium) et la gesse des prés (Lathyrus pratensis) font partie du cortège caractéristique. Le raccord à la plaine alluviale proprement dite se marque par l'apparition progressive de la reine des prés (Filipendula ulmaria). Le versant est partiellement couvert par des groupements forestiers qui constituent le prolongement occidental du bois communal de Cour.
2. La plus grande partie de la plaine alluviale est couverte, à ce niveau, par de vastes surfaces de Filipendulion très largement dominée par la reine des prés (Filipendula ulmaria). Cette plante rhizomateuse montre des facultés d'extension très rapide mais elle est fort sensible au fauchage mais aussi au pâturage. Plusieurs variantes peuvent se présenter en fonction de l'élévation du terrain. Ainsi, une variante sèche voit le fromental (Arrhenatherum elatius) et la bistorte (Persicaria bistorta) apparaître progressivement. Une autre variante plus humide comporte l'iris jaune (Iris pseudacorus) qui y fleurit abondamment. Les zones déprimées sont marquées par la présence de la glycérie aquatique (Glyceria maxima), de l'épilobe hirsute (Epilobium hirsutum), de la scrofulaire ailée (Scrophularia umbrosa).
3. Deux fossés de drainage traversent une partie de la prairie à reine des prés. Ils sont inondés lors des périodes pluvieuses et leur franchissement n'est pas toujours aisé. La végétation de ces fossés et de leurs abords constitue une roselière assez ouverte caractérisée par la grande patience (Rumex hydrolapathum), le populage des marais (Caltha palustris), l'iris jaune (Iris pseudacorus), la lysimaque commune (Lysimachia vulgaris) ou encore le rubanier (Sparganium erectum). On notera par ailleurs l'absence du roseau commun (Phragmites australis). C'est une roselière d'un type particulier dont la présence dans les plaines alluviales est relativement rare.
4. Un autre fossé situé près de l'entrée de la prairie comporte des peuplements de callitriche à fruits plats (Callitriche platycarpa) et de petite lentille d'eau (Lemna minor), signes d'une certaine eutrophisation.
5. L'entrée de la prairie, dans la partie sud du site, est dégradée par d'anciens dépôts de terres. Il en résulte un enrichissement du milieu qui se marque par le développement de vastes plages d'ortie dioïque (Urtica dioica), de gaillet gratteron (Galium aparine) et d'autres plantes nitrophiles.
6. Outre les groupements prairiaux dominants, la plaine alluviale de la Praie est occupée par quelques éléments arborés. On mentionnera notamment un alignement de peupliers euraméricains (Populus x canadensis), à croissance médiocre car installés sur des sols souvent détrempés et inondés. Des fourrés de prunellier (Prunus spinosa) et de ronces (Rubus spp.) sont présents à divers endroits et annonce la récolonisation préforestière du site, favorisée par l'abandon de l'exploitation des prairies.
7. Un bosquet alluvial à saule fragile (Salix fragilis) représente le groupement végétal le plus remarquable du site et est d'un intérêt incontestable; il souligne la vocation forestière de cette plaine alluviale inondable. Souvent confondu avec d'autres espèces (en particulier avec le saule rougeâtre, Salix x rubens), le saule fragile est très rare en Région wallonne et sa présence dans la vallée de l'Eau d'Heure a suscité beaucoup d'intérêt de la part des botanistes (voir par ex. les travaux de LEBEAU et aussi LAWARLREE, 1952).
La faune peuplant la Praie n'a fait l'objet d'aucune étude à ce jour. Les rares données disponibles concernent surtout l'herpétofaune, indiquant la présence du lézard vivipare (Zootoca vivipara), de l'orvet fragile (Anguis fragilis) et du crapaud commun (Bufo bufo). Quelques observations ornithologiques ont par ailleurs été réalisées durant l'hiver 2015.
Le site était jadis utilisé comme prairie de fauche. Il fut également pâturé par des moutons, des chèvres et même des vaches jusque dans les années 1930. Par la suite, les prairies sont progressivement délaissées par l'agriculture en raison de leur caractère humide et ne sont plus utilisées que comme terrain de chasse.
Au début du 20ème siècle, le site appartenait à la famille Solvay, également propriétaire de nombreux autres biens, terres agricoles et immeubles dans le village de Cour et les environs. Ensuite, une partie de l'exploitation agricole fut rachetée par la famille Defalque, propriétaire du château-ferme.
En 1973, c'est un médecin de la clinique de Châtelet, Mr Defalque, non apparenté semble-t-il avec la famille précédente, qui achète le terrain pour la pratique de la chasse.
En 1998, la plus grande partie du site devient la propriété de Mr et Mme J. Bricoult. Une convention de location est signée le 15 février 1999 entre les actuels propriétaires et la Région wallonne, conduisant à la création de la réserve naturelle domaniale de la Praie. Une petite parcelle appartenant à la Région wallonne ainsi qu'un autre terrain propriété de la Fabrique d'Eglise de la Paroisse de Berzée complètent cette réserve couvrant actuellement un peu plus de six hectares.