L'ensemble des coteaux de la Citadelle, depuis Favechamps jusqu'au Bâneu, présente une remarquable diversité d'habitats et accueille diverses espèces animales légalement protégées et/ou rares en Région wallonne. Ce vaste espace de nature a d'autant plus d'intérêt qu'il est situé dans une zone fortement urbanisée, où les éléments semi-naturels et la végétation spontanée sont devenus très rares.
Les coteaux ont été parcourus par différents botanistes au cours de la période contemporaine. Pour les vingt dernières années, on dispose notamment des comptes rendus de LAMBINON (1989) et de LAMBINON et DESTINAY (1990). En revanche, les données disponibles pour la faune sont peu nombreuses et dispersées, aucun groupe taxonomique n'ayant fait l'objet de recensements exhaustifs en dehors des oiseaux qui ont été traités dans une brochure de vulgarisation (BURNEL et TOMASOVIC, 2010).
Le site est très étendu et peut être divisé, de l'ouest vers l'est, en plusieurs secteurs (voir notamment DESTINAY et al., 2006): Favechamps, le Péri avec les terrasses des Minimes, le parc de la Citadelle, le Bois des Carmélites avec les terrains de l'Evêché et des Filles de la Croix, la Ferme Fabry, le coteau de Vivegnis et l'ancien terril du Bâneu.
I. FAVECHAMPS
Le site de Favechamps s'étend à l'ouest de la rue Pierreuse et comprend des prairies, des vergers, un potager communautaire (dépendant de la Ferme de la Vache), un réseau de haies, ainsi qu'une friche comprenant deux petites mares artificielles. C'est un espace au caractère champêtre remarquable, contrastant de manière saisissante avec la ville toute proche.
Le chemin public qui longe les prairies et le verger, parallèle à la Montagne Sainte-Walburge, présente une flore herbacée non dénuée d'intérêt: Knautia arvensis, Anthriscus sylvestris, Lotus corniculatus, Avenula pubescens, Vicia sativa, Ranunculus acris, Bromus hordeaceus, Tragopodon pratensis, Dactylis glomerata et même très localement Bromus erectus. Il est bordé à l'ouest par un boisement nitrophile de talus et à l'est, en limite de la pâture, par des fourrés à Rosa canina, Crataegus monogyna, Fraxinus excelsior, Acer pseudoplatanus, Prunus spinosa, dans lesquels on peut remarquer la présence discrète de Daphne laureola (subspontané) et de Lycium barbarum (naturalisé).
Une friche aménagée par les services communaux dans le cadre du PCDN de Liège, s'étend dans une zone assez étroite comprise entre la prairie-verger et le bois situé au nord des Cliniques de l'IPAL. Deux mares ont été creusées et des amoncellements de pierres ont été mis en place sur la lisière exposée au sud. En juin 2012, un cortège floristique très diversifié y est observé: Lolium perenne, Trisetum flavescens, Poa pratensis, Dactylis glomerata, Bromus hordeaceus, Trifolium pratense, Trifolium dubium, Trifolium repens, Hieracium bauhinii (abondant), Matricaria inodora, Centaurea jacea, Arrhenatherum elatius, Origanum vulgare, Taraxacum sp., Vulpia myuros, Vicia sativa, Vicia hirsuta, Bromus sterilis, Cerastium fontanum, Anthoxanthum odoratum, Hypericum perforatum (dominant par endroit), Leucanthemum vulgare, Glechoma hederacea, Medicago lupulina, Holcus lanatus, Ranunculus bulbosus, Linaria vulgaris, Hypochaeris radicata, Potentilla reptans, Senecio jacobaea, Bellis perennis, Papaver rhoeas, Bromus sterilis, Poa annua, Poa compressa, Plantago lanceolata, Geranium dissectum, etc. On notera en outre deux échappés de jardins, Antirrhinum majus (la gueule de lion) et Lychnis coronaria (la coquelourde).
Cette friche accueille par ailleurs un hôte de marque, l'orchis bouffon (Orchis morio), dont un pied a été observé en 2012, mais qui était déja signalé il y a quelques années dans le même site (obs. Ph. Destinay). Il s'agit d'une orchidée rare et fortement menacée en Région wallonne, non connue historiquement de la région liégeoise! Cependant, l'installation d'un rucher à cet endroit a sans doute entraîné la disparition de cette espèce remarquable (et strictement protégée!)
Les pourtours de la friche sont occupés par un boisement à Acer pseudoplatanus, Acer campestre, Quercus robur, Fraxinus excelsior, Castanea sativa, Betula pendula, Crataegus monogyna, Prunus avium, Clematis vitalba, etc. On signalera également la présence de deux arbustes à caractère invasif, Buddleja davidii et Cotoneaster horizontalis.
Les deux mares sont situées en lisière de bosquet et le fond est constitué d'une bâche qui apparaît largement sur leurs berges. Elles sont largement envahies la végétation, laissant peu d'espaces d'eau libre. Issu de plantations, le trèfle d'eau (Menyanthes trifoliata) est particulièrement dynamique, aux côtés d'autres plantes comme Iris pseudacorus, Eleocharis palustris, Sparganium erectum.
Le peuplement faunistique de ces mares semble assez pauvre, hormis toutefois un important peuplement de tritons constitué de deux espèces: triton alpestre (Ichthyosaura alpestris) et triton ponctué (Lissotriton vulgaris). Un premier inventaire des invertébrés aquatiques en mai 2013 n'a permis de recueillir qu'une petite dizaine de taxons: un crustacé, Asellus aquaticus; trois espèces d'odonates: Aeshna cyanea, Pyrrhosoma nymphula et Ischnura elegans; plusieurs coléoptères: Hydroporus palustris, Hydrobius fuscipes, Helophorus minutus, Anacaena lutescens, par ailleurs tous très communs en Wallonie; enfin, deux hétéroptères de surface, Gerris lacustris et Hydrometra stagnorum.
II. LE PERI
Le Péri ici pris au sens large est compris entre la rue Pierreuse à l'ouest, la rue Hors-Château au sud et les escaliers de la Montagne de Bueren à l'est. L'endroit probablement le plus attractif est constitué par les anciennes terrasses des Minimes, jouissant de conditions microclimatiques très favorables en raison de leur orientation plein sud. Certaines plantes sensibles au gel, comme Ficus carica et Vitis vinifera y sont d'ailleurs cultivées historiquement. Longtemps inaccessible et remis en état par la ville de Liège assez récemment, le site a été visité rapidement par LAMBINON (1989) - surtout au niveau de la tour des Vieux Joncs - et plus récemment par BAUGNEE (2008, non publié).
Les vieux murs de pierres portent une flore intéressante: Cymbalaria muralis, Antirrhinum majus, Diplotaxis tenuifolia, Cheiranthus cheiri, Artemisia absinthium, Ruta graveolens, Verbascum densiflorum, Senecio inaequidens, Buddleja davidii, Reseda lutea, Mercurialis annua, Bryonia dioica, Poa compressa, Asplenium ruta-muraria, etc. Ces murailles, hautes de 2 à 4 mètres, sont couvertes d'épaisses nappes de lierre, très attractives pour l'entomofaune notamment durant l'automne, au moment de la floraison massive de cette plante grimpante.
Entre les parcelles de gazon régulièrement tondues, des parterres ont été semés de plantes sauvages et sont occupés actuellement par des friches. En septembre 2008, ces petites zones refuges rassemblaient une flore variée, à tendance nitrophile-rudérale: Malva moschata, Malva sylvestris, Artemisia vulgaris, Achillea millefolium, Hypericum perforatum, Lamium album, Senecio vulgaris, Sonchus oleraceus, Calystegia sepium, Prunella vulgaris, Verbascum thapsus, Ranunculus repens, Aethusa cynapium, Origanum vulgare, Polygonum aviculare, Mercurialis annua, Leucanthemum vulgare, Urtica dioica, Taraxacum sp., Chelidonum majus, Lathyrus latifolius, Atriplex patula, Papaver rhoeas, Chenopodium album, Silene latifolia subsp. alba, Stellaria media, Setaria verticillata, Persicaria maculosa, Lolium perenne, Anagallis arvensis, Linaria vulgaris, Rumex obtusifolius, Arrhenatherum elatius, Artemisia absinthium, Cirsium arvense, Alopecurus myosuroides, Stachys sylvatica, etc. Plusieurs néophytes s'y développent dont Conyza canadensis, Conyza sumatrensis (récemment arrivé à Liège), Fallopia japonica et l'omniprésent Senecio inaequidens.
Cette végétation composée d'espèces indigènes côtoye diverses plantes cultivées ou échappées des jardins comme Malus domestica, Rosa sp., Rosmarinus officinalis, Ficus carica, etc. Certains parterres sont délimités par des haies basses constituées notamment d'Acer campestre et de Rubus idaeus.
Un petit bois proche, le Bois des Minimes, renferme notamment Tilia platyphyllos, Acer pseudoplatanus, Ulmus minor, Corylus avellana, ... ainsi que plusieurs touffes de la fougère Polystichum aculeatum qui se remarquent dans le sous-bois.
III. LE PARC DE LA CITADELLE
Entourant l'Hôpital de la Citadelle, il s'agit de la zone la plus artificialisée du site des coteaux. Toutefois, ce parc arboré montre une belle diversité d'espèces et divers arbres remarquables et ne manque pas d'intérêt, entre autre sur le plan ornithologique.
Les vieilles murailles qui ont été conservées portent une flore variée dont Poa compressa, Reseda lutea, Mycelis muralis, Arabidopsis thaliana, Cymbalaria muralis, Sedum cf rupestre, Erysimum cheiri, Hypericum perforatum, Asplenium ruta-muraria, Clematis vitalba, Chelidonium majus, Arenaria serpyllifolia, Hedera helix, Senecio inaequidens, Geranium robertianum, etc.
Ces remparts sont coiffés par un boisement plus ou moins spontané: Quercus robur, Acer pseudoplatanus, Salix caprea, Ulmus minor, Fraxinus excelsior, Carpinus betulus, Aesculus hippocastanum, Prunus avium, Crataegus monogyna, etc.
Aux endroits éclairés apparaissent très localement de petites pelouses mésophiles à Bromus erectus, Plantago lanceolata, Achillea millefolium, Lotus corniculatus, Inula conyzae, Knautia arvensis, Centaurea jacea, etc.
Les espaces de gazons sont tondus régulièrement et ne présentent pas d'intérêt floristique particulier.
IV. LE BOIS DES CARMELITES
Le Bois des Carmélites (au sens large) est situé à l'est de la Montagne de Bueren, approximativement jusqu'au niveau de l'esplanade Saint-Léonard. Très escarpé, il occupe une bonne partie du versant d'exposition sud dominant la rue Hors-Château.
La partie orientale, le Bois des Carmélites au sens strict, est essentiellement forestière.
La partie occidentale du site, juste à l'est des escaliers de Bueren, comprend un ancien verger en friche appartenant à l'Evéché, auquel succède une prairie en pente ponctuée de vieux arbres fruitiers, propriété de la congrégation des Filles de la Croix.
Le Bois des Carmélites sensu stricto
Installée sur des sols superficiels surmontant des schistes houillers, la végétation forestière s'est reconstituée spontanément suite aux diverses occupations du sol qui s'y sont succédées au fil du temps. Les strates arborescente et arbustive sont constituées d'Acer pseudoplatanus, Quercus petraea, Quercus robur, Prunus avium, Prunus serotina, Aesculus hippocastanum, Cornus sanguinea, Cornus mas, Corylus avellana, Ulmus minor, Fraxinus excelsior, Crataegus monogyna, Crataegus laevigata, Robinia pseudoacacia (très abondant par endroits). S'y mélangent diverses autres espèces ornementales plantées jadis comme Syringa vulgaris, Ribes sanguineum, Juniperus communis, Taxus baccata, Ulmus x hollandica, Cydonia oblonga, Ligustrum ovalifolium, etc. Dans le sous-bois on observe selon les situations et l'éclairement Sambucus nigra, Urtica dioica, Hedera helix, Veronica hederifolia subsp. lucorum, Galeopsis tetrahit, Alliaria petiolata, Stachys sylvatica, Circaea lutetiana, Poa nemoralis, Geranium robertianum, Vicia sepium, Silene dioica, Rubus div. sp., Allium ursinum, Geum urbanum, Anthriscus sylvestris, etc.
Localement de petites friches à caractère rudéral sont présentes, dans les clairières ou sur les lisières, avec notamment Galium aparine, Glechoma hederacea, Heracleum sphondylium, Urtica dioica, Lamium album, ...
Une gestion particulière de ce bois, dans l'optique du PCDN, permet le maintien de bois mort et d'arbres dépérissants favorable à la microfaune sapro-xylophage, aux oiseaux cavernicoles et aux champignons lignicoles, ainsi que le développement de ronciers, source de nectar et de nourriture pour de nombreuses espèces animales.
Le versant est en outre parcouru, perpendiculairement aux courbes de niveau, par une épaisse muraille constituée de blocs de grès houiller et de calcaire. Il s'agit des vestiges de la seconde enceinte de Liège, appelée muraille de Païenporte ou rempart des Six cents Degrés, datant du 13ème siècle. Actuellement sous couvert forestier, elle porte notamment Hedera helix, Erysimum cheiri ainsi que Cotoneaster salicifolius, amené ici par les oiseaux et bien naturalisé depuis de nombreuses années.
En bas de pente, sur les murs délimitant l'ancien parc Jules Destrée, on observe Pseudofumaria (= Corydalis) lutea, Senecio inaequidens, Asplenium ruta-muraria, Dryopteris filix-mas, Cystopteris fragilis, ...
L'ancien verger de l'Evéché
Ce terrain largement à l'abandon depuis de nombreuses années, est occupé par un ancien verger dont subsistent encore divers arbres fruitiers, poiriers et pommiers surtout. Sa physionomie actuelle s'apparente davantage à un boisement en raison d'un enfrichement et d'un reboisement progressif par Acer pseudoplatanus, Fraxinus excelsior, Quercus robur, Prunus avium, Crataegus monogyna, Robinia pseudoacacia, Sambucus nigra, Fagus sylvatica, Taxus baccata, Cornus sanguinea, entre autres. Le sous-bois renferme Alliaria petiolata, Geum urbanum, Rubus sp., Dryopteris filix-mas, Ilex aquifolium, etc.
Dans les quelques zones ouvertes qui subsistent poussent Urtica dioica, Epilobium angustifolium, Heracleum sphondylium, Chaerophyllum temulum, Galium aparine, Rosa canina, Malva sylvestris, Taraxacum sp., Melissa officinalis, Vicia sepium, Chelidonium majus et Clematis vitalba qui forme d'épaisses nappes sur la végétation arbustive.
La plante invasive Fallopia japonica est présente dans la partie supérieure du terrain où elle couvre une quinzaine de mètres carrés, à proximité du mur longeant la rue du Péri.
Les murailles qui entourent le terrain portent quelques fougères, dont Asplenium trichomanes, ainsi que des plantes à fleurs comme Pseudofumaria lutea, Poa compressa, Hedera helix, Chelidonium majus, etc.
Peu de données faunistiques existent pour ce site enclavé et difficile d'accès. On y signale toutefois la présence du lézard des murailles (Podarcis muralis), observé en 2011, de l'orvet fragile (Anguis fragilis), de l'escargot petit-gris (Cornu aspersum) et de l'escargot de Bourgogne (Helix pomatia), ces deux dernières espèces étant fort communes sur l'ensemble des coteaux de la Citadelle.
La prairie des Filles de la Croix
Avec la Ferme Fabry, cette prairie est l'un des secteurs les plus attractifs des coteaux, tant sur le plan paysager qu'au niveau biologique. La strate herbacée est assez riche en espèces avec notamment Dactylis glomerata, Carduus crispus, Agrostis capillaris, Festuca rubra, Achillea millefolium, Arrhenatherum elatius, Crepis capillaris, Trifolium pratense, Vicia sepium, Hypericum perforatum, Cirsium arvense, Verbascum thapsus, Carex muricata subsp. lamprocarpa, Plantago lanceolata, Daucus carota, Avenula pubescens, etc. La présence d'Avenula pubescens, l'avoine pubescente, et de Carex muricata, la laîche de Paira, est intéressante à souligner car ces deux espèces thermophiles sont peu communes dans la région liégeoise.
Cette prairie est régulièrement parcourue par un troupeau itinérant de moutons dont le pâturage extensif participe à l'hétérogénéité du tapis végétal.
Le site comporte une trentaine d'arbres fruitiers vieillissants ou mourants, très attractifs pour les animaux cavernicoles ainsi que pour divers insectes saproxyliques très spécialisés (notamment cétoines, longicornes, élatérides du genre Ampedus et certains Anthocoridae dont le rare Dufouriellus ater).
Localement, on assiste à une colonisation arbustive parfois assez active par Crataegus monogyna, Rosa canina, Fraxinus excelsior, Rubus sp., Clematis vitalba et autres, en particulier dans le bas de la prairie. Une ancienne haie de cornouiller mâle (Cornus mas) est présente près de l'ancien mur, parmi des ronciers denses.
V. LA FERME FABRY
Ce site à caractère rural, d'une très grande valeur paysagère, occupe la crête de la colline, séparant ici le Fond des Tawes du sillon mosan. Il présente une vaste prairie à Holcus lanatus, Dactylis glomerata, Arrhenatherum elatius, Festuca arundinacea, Calamagrostis epigejos, Senecio jacobaea, Cirsium arvense, Odontites vernus subsp. serotinus, etc. Cette prairie mésophile est entrecoupée de zones à sols plus superficiels colonisées par des pelouses maigres à Agrostis capillaris, Hieracium pilosella, Hypochaeris radicata, notamment.
Une boulaie pionnière à Betula pendula se développe surtout sur le flanc exposé au nord. Plusieurs fourrés d'épineux à Crataegus monogyna, Rosa canina s.l., Prunus spinosa, Rubus spp. ponctuent ce vaste espace prairial et lui donnent un aspect de pré-bocage.
Quelques très gros chataigniers (Castanea sativa) dominent le paysage. Ces arbres remarquables sont classés mais certains sont dépérissants. Il est possible que certains d'entre-eux permettent le développement larvaire du lucane cerf-volant (Lucanus cervus) mais cela doit encore être établi. Une cavité située dans une branche haute accueille certaines années une colonie d'abeilles domestiques (Apis mellifera).
A l'ouest, entre les prairies et le terrain de football de la Citadelle, s'étend un verger regroupant de vieux pommiers et poiriers. De jeunes arbres fruitiers ont été plantés récemment afin d'assurer la continuité du milieu. Le gui (Viscum album) est présent quoique discret sur certains pommiers, mais aussi robiniers. Le verger est limité partiellement par d'épaisses haies d'aubépines.
L'ensemble du site de la Ferme Fabry accueille une faune entomologique d'une remarquable diversité pour la région. On y recense notamment une dizaine d'espèces de criquets et de sauterelles, des abeilles solitaires dont l'espèce estivale peu commune Melitta tricincta spécialisée dans le butinage des odontites (Odontites spp.), la coccinelle Platynaspis luteorubra dont la larve est soignée par certaines fourmis.
VI. LE COTEAU DE VIVEGNIS ET LE BÂNEU
Ce coteau qui est le prolongement oriental du Bois des Carmélites, domine le quartier de Vivegnis et est en grande partie boisé, avec une végétation assez comparable à celle du Bois des Carmélites. Le pied du versant, entre la rue du Bâneu et l'impasse Macors, comporte un terril aplani occupé par une friche à Echium vulgare, Leucanthemum vulgare, Achillea millefolium, Tanacetum vulgare, Centaurea jacea, Plantago lanceolata, etc. Le talus situé près de l'ancienne galerie de mine, voisin de cette friche, montre une belle population de Centaurea scabiosa ainsi que diverses autres plantes comme Origanum vulgare, Reseda lutea, Inula conyzae, Elymus repens, Dipsacus fullonum, Oenothera deflexa, Trifolium repens, Hirschfeldia incana, Verbascum densiflorum, Senecio inaequidens, Linaria vulgaris.
Cette zone ouverte et thermophile présente un intérêt particulier pour certains groupes d'insectes comme les Orthoptères dont deux représentants peu communs sont à mentionner: le criquet à ailes bleues (Oedipoda caerulescens) et le tétrix des carrières (Tetrix tenuicornis).
LA FAUNE DES COTEAUX DE LA CITADELLE
Bien que la faune des coteaux de la Citadelle demeure peu étudiée, les données disponibles permettent de souligner la présence de nombreuses espèces rares et intéressantes à divers titres.
Parmi les vertébrés, il existe au moins deux espèces de reptiles, toutes deux intégralement protégées en Région wallonne.
Le lézard des murailles (Podarcis muralis) est proche ici de sa limite nord absolue de son aire de distribution en Europe! Une population assez importante existe au pied des coteaux, au niveau du Bâneu et du Bois des Carmélites. L'espèce est également observée plus occasionnellement aux alentours des escaliers de Bueren, sur les murailles à l'arrière des maisons. Par contre, elle semble absente sur l'ancienne citadelle et dans les prairies de la Ferme Fabry. Ce lézard est une espèce thermophile dont l'habitat primaire est constitué par les rochers et les éboulis, mais qui s'est bien adapté à certains habitats anthropiques bien exposés comme les murs de pierres, les anciennes carrières de calcaires et de grès, le ballast des voies ferrées. Son régime alimentaire est assez varié mais comprend principalement de petits invertébrés (insectes, mollusques, araignées, etc.).
La présence de l'orvet fragile (Anguis fragilis) est également notée à plusieurs endroits, notamment sur le terrain de l'Evéché et les jardins environnants, à Favechamps et au Bâneu. Bien que largement répandu en Wallonie, ce lézard apode peut s'avérer localement plus rare en raison d'une faible disponibilité d'habitats favorables. C'est le cas notamment à Liège, où il subit en plus la prédation de la part des animaux domestiques (chats entre autres) et des Corvidés, quand il n'est pas simplement déchiqueté par les engins de fauche utilisés pour l'entretien des jardins et autres espaces verts. Peu exigente, l'espèce affectionne toutefois les groupements de lisières et les végétations herbacées denses, comme les friches, les prairies abandonnées, les jardins pas trop entretenus, etc.
Les mammifères comportent diverses espèces banales dont l'écureuil roux (Sciurius vulgaris) et le renard (Vulpes vulpes). Depuis peu, le blaireau (Meles meles) fréquente également le site, comme en témoignent les traces de son passage. Les coteaux et les nombreux bâtiments historiques environnants semblent présenter d'assez grandes potentialités d'accueil pour les chauves-souris, mais celles-ci n'ont pas encore été récensées de manière systématique. La sérotine commune (Eptesicus serotinus), chauve-souris menacée en Wallonie, a été repérée à plusieurs reprises en chasse sur le site (obs. G. MOTTE).
Les insectes, qui constituent l'essentiel de la biodiversité de nos régions, comportent de très nombreuses espèces sur les coteaux de la Citadelle mais leur étude est longue et d'ailleurs toujours en cours.
La présence d'arbres vieillissants et dépérissants et l'abondance de bois morts favorisent le développement d'une faune spécialisée incluant de nombreux coléoptères. L'une des espèces les plus prestigieuses est certainement le lucane cerf-volant (Lucanus cervus), observé en 2003 sur le plateau de la Ferme Fabry et revu en 2012 (une femelle) et en 2020 (un mâle) le long du sentier du Bois des Carmélites. La reproduction de ce remarquable coléoptère est probable mais reste à prouver par des recherches orientées. Cette espèce d'intérêt communautaire est par ailleurs bien présente dans certains secteurs de la région liégeoise, notamment sur la colline de Cointe (THOMAES et al., 2010). On rencontre également la cétoine dorée (Cetonia aurata) et surtout la cétoine noble (Gnorimus nobilis), notée récemment au sein des vieux vergers. A Favechamps, Tetrops starkii, un longicorne nouveau pour la faune belge, a été découvert en 2012 sur de petits frênes, en bordure de la friche (voir DRUMONT et al. 2012).
Autre groupe de coléoptères bien connus, les Coccinellidae présentent une diversité assez exceptionnelle sur le site avec au moins 28 espèces recensées au cours des cinq dernières années (2008-2014), soit plus du 1/3 des coccinelles connues en Belgique ! Les éléments les plus remarquables sont Nephus quadrimaculatus, observé sur les nappes de lierre, Platynaspis luteorubra, espèce myrmécophile trouvée dans la prairie de la Ferme Fabry, Vibidia duodecimguttata, découvert récemment au pied des coteaux, et Henosepilachna argus, coccinelle végétarienne inféodée à la bryone dioïque.
Parmi la vingtaine d'espèces de papillons de jour observées ces dernières années, se distingue notamment la grisette (Carcharodus alceae), espèce thermophile en voie d'expansion, à présent bien installée dans les friches où sa chenille se développe sur les mauves et autres plantes apparentées. D'autres espèces peu communes notées récemment semblent occasionnelles sur le site, comme le demi-argus (Polyommatus semiargus), le petit nacré (Issoria lathonia) ou l'azuré du trèfle (Cupido argiades).
Les coteaux ont récemment accueilli un nouvel arrivant en Belgique, la tordeuse du lierre (Clepsis dumicolana), dont les premières observations ont été effectuées en 2008 (DE PRINS et BAUGNEE, 2008). Ce petit papillon "de nuit" plutôt méridional affectionne particulièrement les nappes de lierre couvrant les murs exposés au sud, situation fréquente aux Terrasses des Minimes, notamment.
Autre insecte d'origine méridionale, la cicadelle du laurier (Synophropsis lauri) a été découverte récemment sur le lierre recouvrant les murailles des Terrasses des Minimes, habitat original puisque que cet hémiptère vit normalement sur les lauriers (BAUGNEE, 2011).
Les Hyménoptères ne sont pas en reste en terme de représentation et comptent même des espèces rarissimes, comme par exemple la guêpe solitaire Microdynerus timidus, connue seulement de la Montagne Saint-Pierre et d'une très vieille capture dans une localité de Campine, et qui nidifie dans les vieux fruitiers morts de la Ferme Fabry. Les vergers attirent de nombreuses autres espèces, guêpes et abeilles solitaires et leurs cohortes de parasites (comme les superbes guêpes dorées, ou Chrysides). Sur la prairie des Filles de la Croix, on a par exemple recensé récemment une guêpe terricole, Astata boops, une espèce peu commune et légalement protégée en Région wallonne (Annexe 2b du décret du 6 décembre 2001).
Le site accueille par ailleurs une belle diversité de galles dont certaines sont rarement observées ailleurs en Wallonie. C'est le cas notamment de celle occasionnée par l'acarien Cecidophyes nudus sur les feuilles de Geum urbanum. Cette galle se présentant sous forme de cloques, fut observée sur le site par LAMBINON et DESTINAY (1990) et y est toujours bien visible actuellement sur l'ensemble des coteaux. Pour revenir au lierre, on signalera encore la découverte récente d'une galle florale due à un petit moucheron, Dasineura kiefferi, non encore mentionnée de Belgique.