La mare de Sohier se trouve à environ 600 m au sud-ouest du centre du village de Sohier, sur le piémont de l'Ardenne au contact avec la Fagne schisteuse. Couvrant 25 ares, elle est de forme triangulaire et est limitée d'un côté par l'accotement de la route et des deux autres côtés par de grosses haies qui l'isolent des prairies pâturées voisines.
Le substrat est formé d'une argile très peu vaseuse provenant de l'altération des schistes et grès de l'Emsien moyen (assise de Winenne). En 1995 cependant, une couche de vase atteignant 1 m d'épaisseur couvrait le fond de la mare. En 2013, la profondeur d'eau oscille entre 0,85 et 1 m et l'épaisseur de vase n'est plus que de 10 à 25 cm, résultat du curage effectué de façon progressive de 2009 à 2011 (LIMBOURG et LEURQUIN, 2013).
Les eaux sont mésotrophes, en voie d'eutrophisation. Elles sont de nature alcaline (pH de 7,6 en août 2013).
La végétation de la mare de Sohier a été étudiée en détail par OVERAL (1978; 1996) et une cartographie précise des groupements végétaux a été réalisée par LEURQUIN (2003). Le site a été visité à plusieurs reprises par les Naturalistes de la Haute Lesse (historique dans LIMBOURG et LEURQUIN, 2013).
Historiquement, cette mare communale était périodiquement curée, action qui permettait d'entretenir la dynamique végétale en limitant son envasement. Le dernier curage ayant été opéré dans les années 1970, elle s'est progressivement atterrie et envasée jusqu'au récent curage progressif qui a eu lieu en deux phases en 2009 et 2011.
Durant les années 1990-2000, on distingue, du centre de la mare vers ses berges:
- une végétation aquatique à Potamogeton natans qui a progressivement fait place à un herbier à Elodea canadensis qui occupe toute l'eau libre.
- un groupement flottant à Lemna minor, à developpement estival;
- une sparganaie à Sparganium emersum, toujours bien caractérisée en 1995 et associée à Eleocharis palustris;
- une glycéraie à Glyceria fluitans, subsistant principalement dans la partie sud de la mare;
- un groupement à Eleocharis palustris, abritant en outre Agrostis stolonifera, Veronica scutellata, Bidens cernua;
- une jonchaie à Juncus effusus melé de Solanum dulcamara;
- des fragments du Bidention à Bidens tripartita (non revu récemment), B. cernua, Alopecurus aequalis (en très forte régression au début des années 2000), etc.;
- des fourrés de saules (Salix x multinervis) et d'épineux (Rubus caesius, entre autre).
Par rapport aux premières observations datant de 1977, le milieu a évolué dans le sens d'une eutrophisation sensible des eaux. Cette eutrophisation est favorable à Bidens cernua ainsi qu'à Elodea canadensis. Par contre, une espèce comme Lemna trisulca, affectionnant les eaux pauves en nitrates et phosphates, semble avoir disparu.
En août 2013, deux ans après le curage de la mare, il a été constaté (LIMBOURG et LEURQUIN, 2013):
- une densification des herbiers d'Elodea canadensis (tapis épais et continu de 50 cm d'épaisseur) et de Potamogeton natans;
- une présence plus importante de Bidens cernua et de Veronica scutellata;
- le maintien d'Alopecurus aequalis en pieds isolés;
- la disparition du groupement fragmentaire à Juncus acutiflorus.
La mare de Sohier présente un intérêt important pour la faune aquatique, notamment les amphibiens et les odonates qui sont les groupes pour lesquels les données sont les plus abondantes. Les autres groupes taxonomiques (coléoptères aquatiques, hétéroptères, trichoptères, ...) ont été beaucoup moins étudiés et mériteraient un inventaire détaillé.
Le site est fréquenté notamment par plusieurs espèces d'amphibiens dont les quatre tritons de Wallonie. Le rare triton crêté (Triturus cristatus) était déjà signalé dans les années 1980 et est toujours bien présent. D'après des captures par nasses au printemps 2013 (voir le relevé de MAREE et PAQUAY in LIMBOURG et LEURQUIN, 2013), la population peut être estimée à 500 individus ou davantage (comm. A. Laudelout). On notera aussi l'importante population de la petite grenouille verte (Pelophylax lessonae).
Parmi les mollusques dulcicoles, on signale la présence de Sphaerium lacustre, Pisidium nitidum, Pisidium personatum, Anisus vortex, Gyraulus albus, Lymnaea stagnalis. Notons que cette dernière et grande espèce ne semble être apparue que récemment sur le site où elle est maintenant bien présente (MAREE, 2003).