Les tourbières sont des étendues marécageuses au sein desquelles des conditions écologiques particulières permettent l'accumulation de matières organiques mal décomposées (la tourbe), sur lesquelles se développent des végétations spécialisées dominées par des mousses dont la croissance engendre la tourbe.
Des conditions hydrologiques, édaphiques, topographiques et climatiques particulières conditionnent l'apparition et le développement des milieux tourbeux. Un bilan hydrique positif est indispensable à la formation, à la croissance et au maintien des tourbières. Les apports en eaux (sources, ruissellement, précipitations, nappe phréatique, crues) doivent être supérieurs aux pertes par écoulements latéraux ou verticaux, drainage, évaporation et évapotranspiration. Plusieurs facteurs contribuent à l'établissement d'un bilan hydrique positif: une pluviosité élevée combinée à des températures relativement basses; des sols plus ou moins imperméables ou à drainage très faible; une topographie permettant l'accumulation d'eau ou un écoulement lent (dépressions, pentes faibles, cols). Dans ces conditions, le sol est saturé en permanence par une eau stagnante ou peu mobile, très pauvre en oxygène. L'asphyxie du sol (anaérobiose) qui en résulte limite fortement les processus microbiologiques dus aux bactéries et champignons responsables de la décomposition et du recyclage de la matière organique. Ainsi, les matières organiques mortes ne se minéralisent que très lentement et très partiellement et s'accumulent progressivement sous forme de tourbe, au rythme moyen de 0,2 à 1 mm par an. En Wallonie, les dépôts de tourbe les plus anciens datent de la fin de la dernière glaciation (12000 ans) et peuvent atteindre jusqu'à 8 mètres d'épaisseur.
En Wallonie, les milieux tourbeux (sensu lato, y compris les milieux paratourbeux couverts par moins de 40 cm de tourbe) sont marginaux. D'après la carte pédologique, ils ont couvert potentiellement près de 15000 ha, auxquels il faut encore ajouter 1200 ha de sols tourbeux fossiles, aujourd'hui enfouis sous d'autres sédiments. Ces milieux ne couvrent donc potentiellement que moins de 0,9 % du territoire wallon. Sur les sols paratourbeux, les tourbières ne se rencontrent que sur les sols inondés en permanence. Par contre, dès que la couche tourbeuse s'élève au dessus de quelques décimètres de tourbe, les milieux sont exclusivement liés à la série des tourbières (les landes tourbeuses et les chênaies pédonculées à bouleaux et molinie apparaissant sur les sols paratourbeux ne font pas partie de la série des tourbières, même si elles repose sur de minces couches d'humus tourbeux; les boulaies à sphaignes et les aulnaies marécageuses, bien que faisant partie de la série des tourbières sont décrites dans les milieux forestiers).
Beaucoup de tourbières ont été détruites ou dégradées par les activités humaines et leur extension réelle actuelle est bien moindre. Elles apparaissent principalement sur les crêtes ardennaises, depuis le massif de la Croix-Scaille au sud-ouest, jusqu'au massif des Hautes-Fagnes au nord-est, et de manière beaucoup plus localisée dans les hautes vallées d'Ardenne et de Lorraine belge, principalement dans les vallées de la Semois et de la Sûre. Quelques zones faiblement tourbeuses existent également dans le Hainaut, dans la vallée de la Haine.
Les tourbières ont une valeur patrimoniale exceptionnelle. Elles abritent des biocénoses spécialisées uniques que l'on ne rencontre pas dans d'autres écosystèmes et sont très riches en espèces rares. Elles constituent également d'excellents milieux conservateurs qui fossilisent les particules organiques ce qui leur confère un grand intérêt paléoécologique et archéologique. Leur intérêt écologique est aussi très important, car elles assurent une multitude de fonction au sein de la biosphère: purification de l'air et de l'eau, stockage du carbone, régulation des conditions climatiques locales, régulation de l'écoulement des eaux, filtration et épuration des eaux.
On en distingue divers types, en relation avec l'épaisseur de la couche de tourbe, le niveau trophique, l'acidité du milieu et le type d'alimentation en eau.
