La réserve naturelle RNOB de Comogne est constituée de deux zones bien distinctes: une étendue de prairies de 20,6 hectares et vers le nord-ouest, une surface plus forestière de 8,8 hectares.
Plusieurs faciès sont observés dans la prairie:
- une première zone est constituée par une bande étroite d'environ 3 m, le long de la route Lavaux-Sainte-Anne - Focant. Elle se distingue surtout par l'abondance inhabituelle de Centaurea thuillieri, dûe peut-être au séjour prolongé du bétail dans cette partie du site. La proximité de la nappe à cet endroit est signalée par la présence de Carex cuprina, Carex panicea, Cirsium palustre et Juncus effusus.
- au nord du bâtiment qui sert de grange et de bergerie, une prairie se singularise par l'abondance d'Agrostis capillaris. Cette parcelle est pâturée depuis plusieurs années par des moutons. Ceci est confirmé par la présence d'espèces comme Hordeum secalinum, Cynosurus cristatus, Lolium perenne. On y note également Festuca rubra, Leontodon hispidus, Ranunculus acris, Rumex acetosa,...
- au sud-ouest de la mare, sur un bombement plus sec, un faciès est dominé par Galium verum, Festuca rubra, Trifolium repens, T. pratense, Lotus corniculatus et Luzula campestris ainsi qu'une très grande station d'Ophiogolossum vulgatum.
- une petite zone dans le nord de la prairie mérite une attention particulière puisqu'elle abrite des espèces absentes ou très rares ailleurs sur le site, tels que Carex panicea, Ophioglossum vulgatum, Orchis morio, Polygala vulgaris, Potentilla erecta, Selinum carvifolia, Stachys officinalis, Succisa pratensis, Viola canina (Succiso-Molinietum).
- le reste de la prairie est dominé par Anthoxantum odoratum, Colchicum autumnale, Festuca pratensis, Lychnis flos-cuculi, Ranunculus acris, Rhinanthus minor, Trifolium pratense... Les espèces du Silaeto-Molinietum et du Succiso-Molinietum y sont beaucoup plus rares, voire absentes.
Située dans le centre de la prairie, une mare accueille une végétation sensiblement différente caractérisée par des espèces hygrophiles comme Alopecurus geniculatus, Angelica sylvestris, Carex spp., Eleocharis palustris, Filipendula ulmaria, Lycopus europaeus, ... Une petite magnocariçaie à Carex acuta se trouve près de cette mare, ainsi qu'une petite roselière à Phragmites australis à l'autre extrémité, plus humide encore.
La partie boisée du site est née d'une recolonisation ligneuse récente. Outre plusieurs Carex, on y distingue Angelica sylvestris, Dactylorhiza maculata, Eupatorium cannabinum, Filipendula ulmaria, Lycopus europaeus, témoins des anciennes prairies humides. Quelques trous d'eau subsistent avec diverses plantes aquatiques ou hélophiles, dont Alisma plantago-aquatica.
Plus près du ruisseau du Trîneau, sur des sols plus secs, s'est développé un fourré d'épineux où domine le prunellier (Prunus spinosa). Par endroit, un sol riche, plus forestier a donné lieu à la formation de tapis d'ail des ours (Allium ursinum). L'impact de la fréquentation actuelle des sangliers à cet endroit est considérable et négatif pour le tapis végétal.
Enfin, quelques lambeaux de chênaie-charmaie famenienne s'observent aussi dans cette partie de la réserve.
L'avifaune comprend diverses espèces nicheuses intéressantes. Dans les zones boisées: l'autour (Accipiter gentilis), l'épervier d'Europe (Accipiter nisus), l'hibou moyen-duc (Asio otus), le coucou gris (Cuculus canorus), le pic mar (Dendrocopos medius), le pic épeichette (Dendrocopos minor), le faucon crécerelle (Falco tinnunculus), le loriot (Oriolus oriolus), la bondrée apivore (Pernis apivorus), l'effraye des clochers (Tyto alba), la bécasse des bois (Scolopax rusticola), le pic noir (Dryocopus martius), la tourterelle des bois (Streptopelia turtur), etc. Dans les prairies et les haies: le pipit des prés (Anthus pratensis), la caille des blés (Coturnix coturnix), la pie-grièche écorcheur (Lanius collurio), la locustelle tachetée (Locustella naevia), le rossignol philomèle (Luscinia megarhynchos), le tarier pâtre (Saxicola torquata), le bruant jaune (Emberiza citrinella), etc.
Depuis 1996, le râle des genêts (Crex crex) a été noté à plusieurs reprises comme chanteur dans la réserve naturelle, mais sans preuve de nidification. L'engoulevent d'Europe (Caprimulgus europaeus), jadis présent, a disparu vers 1990.
Parmi l'herpétofaune, on relève la présence régulière du triton crêté (Triturus cristatus) et de plusieurs autres espèces plus courantes. Pour mémoire, la rainette arboricole (Hyla arborea), encore présente sur le site à la fin des années 1980, a disparu depuis lors, comme dans la plus grande partie de la région d'ailleurs.
Les groupes entomologiques les mieux connus sur le site de Comogne sont les lépidoptères rhopalocères (ou papillons de jour), les odonates et les orthoptères.
Les papillons de jour sont représentés par près de 40 espèces, parmi lesquelles figurent des éléments intéressants comme le damier noir (Melitaea diamina), le demi-deuil (Melanargia galathea), le thécla du prunier (Satyrium pruni), le moyen nacré (Argynnis adippe), l'hespérie de la mauve (Pyrgus malvae), ...
Odonate très rare d'intérêt communautaire, l'agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale) a récemment été noté dans la réserve naturelle, probablement en provenance de la population présente dans la plaine de Focant.
La Famenne est une région réputée herbagère. Cette situation fait suite aux défrichements de la forêt primitive, qui était vraisemblablement composée de chênaies-charmaies, et, d'aulnaies dans les zones les plus humides.
La nature schisteuse du sous-sol et l'abondance d'argile ont rendu les sols de cette région imperméables. Ils sont fréquemment inondés, mais subissent également de fortes sécheresses. Sur ces terres peu rentables, les cultures ont toujours été rares, et les prairies dominantes.
La carte IGN levée en 1858 et révisée en 1924 montre le site presqu'entièrement recouvert de conifères. Seule une zone située dans le prolongement du point d'eau (existant toujours aujourd'hui) correspondait vraisemblablement à une prairie marécageuse. Des Picea abies auraient occupé le site jusqu'en 1933.
La pessière fut exploitée, et le terrain transformé en pâture, à l'exception de la zone au nord-est. C'était l'époque où dominaient, en Fagne-Famenne, les prairies herbeuses semi-naturelles, très abondamment fleuries et exploitées de manière extensive. Dès les années 1940, l'agriculture a privilégié les prairies ou pâtures permanentes, beaucoup moins favorables à la biodiversité. La prairie de Comogne peut être considérée comme une exception, car, renseignement pris, les amendements n'ont jamais été très intensifs. Il n'y a plus eu d'exploitation aux machines depuis le début des années 1960! Le site a ainsi pu conserver la plupart de ses valeurs semi-naturelles de jadis.