Le site du Triffoy est localisé dans le Condroz, à une dizaine de km au sud de Huy.
Le Triffoy (ou ruisseau de Goesnes) est un des multiples affluents de rive gauche du Hoyoux et il appartient donc au bassin hydrographique de la Meuse. Il prend sa source au sud de Ohey, dans la « plaine » de Sorée, à une altitude de 260 m, et s'écoule ensuite en direction du nord-est jusqu'à sa confluence, 12 km plus loin, avec le Hoyou au lieu-dit Roiseux, vers 135 m d'altitude. Le bassin versant du Triffoy, très étroit en raison de la brièveté de ses affluents latéraux, a une superficie de 30,3 km2. Il englobe plusieurs villages et hameaux dont Flemme, Hodoumont, Jallet, Goesnes, Jamagne, State et Éreffe, et est à cheval sur les provinces de Namur (portion amont) et de Liège.
Le Triffoy est répertorié comme ruisseau condrusien à pente moyenne. Durant les deux premiers tiers de son parcours, il traverse un paysage agricole ouvert composé de prairies, de cultures et de quelques rares bosquets. Ensuite, en aval de Jamagne, le ruisseau s'engouffre dans une étroite vallée creusée dans des calcaires du dinantien, entre deux tiges de grès famenniens aux versants pentus largement couverts de forêts (voir e.a. BOUXIN et al., 2016).
Le site considéré ici correspond à la partie la plus aval du Triffoy, comprise entre State et Roiseux. A cet endroit, le vallon est étroit (100 m maximum) avec des versants escarpés balafrés de plusieurs carrières creusées dans les psammites famenniens.
Cette portion du Triffoy est célèbre pour ses barrages de travertin, parmi les plus beaux et les plus spectaculaires de Belgique. Un récent inventaire réalisé par T. Pasleau et al. (GRABE asbl) en a dénombré pas moins de 45 entre le moulin de Goesnes et la confluence. Ces barrages de travertin se sont formés à la fin du Préboréal, durant toute la période du Boréal et au début de l'Atlantique. SYMOENS et al. (1951) ont bien résumé les phénomènes qui conduisent à l'édification du tuf par biolithogenèse. Dans les ruisseaux, des organismes incrustants, principalement des Bryophytes et des Cyanobactéries, précipitent le calcaire et forment soit des couches continues de type macadam, soit des petits barrages transversaux ou travertins sur lesquels l'eau coule en cascades. Dans le Hoyoux, ces mêmes auteurs signalent la présence des mousses Brachythecium rivulare et Fissidens crassipes et les Cyanobactéries incrustantes principales Lyngbya calcarea et Phormidium incrustatum. Pour KLEINTEICH et al. (2017), sur base du séquençage moléculaire, Phormidium incrustatum est le principal responsable de la précipitation des carbonates dans les stations étudiées du Hoyoux et du Triffoy.
Le ruisseau du Triffoy est entièrement situé dans le district phytogéographique mosan et dans la région continentale.
La portion aval du vallon du Triffoy constitue l'un des plus beaux sites naturels du Condroz hutois.
Sur le plan botanique, il a été parcouru notamment en 1997 à l'occasion d'une excursion d'Ardenne et Gaume dont le compte-rendu est donné par DUVIGNEAUD & SAINTENOY-SIMON (1998) et synthétisé ci-après. La description se rapporte plus précisément au périmètre de la réserve naturelle du Triffoy créée en 1998 à l'initiative d'Ardenne et Gaume sur des parcelles privées.
Le fond du vallon est occupé par des bois, des pâtures et des prairies humides. Les versants sont couverts par des forêts variées et notamment, en exposition nord, par des érablières. Quelques pelouses calcaires sont en outre présentes sur les éperons rocheux de la vallée.
La végétation présente le long du ruisseau comprend de belles mégaphorbiaies regroupant Petasites hybridus, Epilobium hirsutum, Phalaris arundinacea, Ranunculus repens, Primula elatior, Mentha aquatica, Dipsacus pilosus, Myosotis scorpioides, Glyceria notata, Filipendula ulmaria ainsi que des éléments de groupement fontinal tels que Cardamine amara, Chrysosplenium oppositifolium et C. alternifolium.
Une très belle aulnaie riveraine regroupe, outre Alnus glutinosa, des espèces comme Cardamine amara, Aegopodium podagraria, Caltha palustris, Alliaria petiolata, etc. Le cortège vernal comprend notamment Corydalis solida, Gagea lutea, Anemone ranunculoides.
On distingue également des groupements de frênaie-aulnaie à Stellaria nemorum subsp. nemorum, Primula elatior, Deschampsia cespitosa, Persicaria bistorta, Aegopodium podagraria, Carex sylvatica, Ranunculus ficaria, Ribes nigrum, R. rubrum, etc.
Localement prend place une frênaie à Mercurialis perennis, Hedera helix, Myosotis sylvatica, Ranunculus auricomus, Lamium galeobdolon, Galium aparine, Senecio ovatus, Geranium robertianum, Brachypodium sylvaticum, ...
BOUXIN et al. (2016) ont étudié la végétation aquatique et amphibie du Triffoy pendant l'été 2015, à travers neuf relevés de végétation d'une centaine de mètres de long répartis depuis Fléme jusqu'à la cascade située au lieu-dit Roiseux, à proximité de l'embouchure avec le Hoyoux. La végétation des barrages de travertin et des cascatelles du ruisseau du Triffoy a été comparée sur celle du Hoyou au niveau du grand barrage et des cascatelles du moulin de Roiseux, à quelques centaines de mètres en amont de la confluence du ruisseau du Triffoy.
Les bryophytes ont été étudiés par VANDERPOORTEN (1997) et des données complémentaires plus récentes ont été recueillies par la cellule Hydrobiologie du DEMNA. La présence de Palustriella commutata est particulièrement intéressante en tant qu'espèce caractéristique des crons.
La faune locale a été peu inventoriée jusqu'ici.
L'eau du ruisseau est d'excellente qualité. Il permet à des poissons sensibles comme le chabot (Cottus gobio s.l.) et la truite fario (Salmo trutta fario) d'y prospérer. La salamandre tachetée (Salamandra salamandra) s'y reproduit également.
Les berges sont fréquentées par la discrète musaraigne aquatique (Neomys fodiens).
Les trois espèces d'oiseaux rhéophiles habituelles sont cantonnées dans le secteur, à savoir le martin-pêcheur d'Europe (Alcedo atthis), le cincle plongeur (Cinclus cinclus) et la bergeronnette des ruisseaux (Motacilla cinerea).
Les relevés de macro-invertébrés benthiques réalisés par le DEMNA (R. Cammaerts, 2008) indiquent la présence dans le ruisseau des taxons suivants : Potamopyrgus antipodarum, Ancylus fluviatilis, Lymnaea stagnalis, Gyraulus crista, Gammarus fossarum, Eiseniella tetraedra, Dugesia sp., Serratella ignita, Odontocerum albicorne.