Le marais de Genneville constitue l'une des premières réserves naturelles de l'association Natagora (ex Réserves Naturelles RNOB) dans le Brabant wallon, les premières parcelles y furent en effet acquises dès 1976. La partie centrale du site est une ancienne prairie pâturée par des vaches qui, en une quinzaine d'années, s'est profondément transformée. Des observations réalisées les 7 et 27 juin 1990 par J. Saintenoy-Simon et coll. permettent de donner de la végétation la description suivante.
En bordure de la réserve existe une friche nitrophile à fromental (Arrhenatherum elatius), ortie dioïque (Urtica dioica), gaillet gratteron (Galium aparine), cirse des champs (Cirsium arvense), berce commune (Heracleum sphondylium), liseron des haies (Calystegia sepium), ainsi qu'une vaste magnocariçaie très dense dominée par la laiche des marais (Carex acutiformis) qui ne laisse place qu'à peu d'autres espèces végétales. Seuls quelques hautes plantes comme le cirse lancéolé (Cirsium vulgare), l'angélique sauvage (Angelica sylvestris), le gaillet gratteron (Galium aparine), la renouée amphibie (Persicaria amphibia) ou encore la reine des prés (Filipendula ulmaria) parviennent à y croître.
En bordure de cette magnocariçaie se trouve une phragmitaie à roseau commun (Phragmites australis), riche en valériane officinale (Valeriana repens), suivie par une filipendulaie assez étendue avec la reine des prés (Filipendula ulmaria), l'épilobe hirsute (Epilobium hirsutum), la salicaire (Lythrum salicaria), l'eupatoire chanvrine (Eupatorium cannabinum), la scrofulaire aquatique (Scrophularia auriculata), le lychnis fleur de coucou (Lychnis flos-cuculi) principalement.
Des fragments de jonçaies à jonc à tépales aigus (Juncus acutiflorus) sont dispersés çà et là. Les dépressions très humides où l'eau affleure en temps normal sont occupées principalement par un groupement à prêle des eaux (Equisetum fluviatile), la prêle des marais (Equisetum palustre), la menthe aquatique (Mentha aquatica), la patience agglomérée (Rumex conglomeratus), l'âche faux-cresson (Apium nodiflorum) (très petit, sans doute à cause de la sécheresse), le gaillet des marais (Galium palustre), le populage des marais (Caltha palustris), la véronique mouron d'eau (Veronica anagallis-aquatica), la pulicaire dysentérique (Pulicaria dysenterica), la stellaire des sources (Stellaria alsine), la stellaire aquatique (Myosoton aquaticum), la laiche noire (Carex nigra), la laiche distique (C. disticha), etc.
Le ruisselet est envahi par endroits par de vigoureuses populations d'âche faux-cresson (Apium nodiflorum).
Le site qui a une valeur paysagère incontestable, est avoisiné de rangées de saules têtards (Salix alba), de rideaux de saules et d'une haie vive formée de sureau noir (Sambucus nigra), l'aubépine à un style (Crataegus monogyna), l'orme champêtre (Ulmus minor) qui servent de support à la bryone dioïque (Bryonia dioica).
La strate muscinale comporte entre autres Pellia endiviifolia, Kindbergia praelonga (=Eurhynchium stockesii), Oxyrrhynchium hians (=E. swartzii), Plagiothecium succulentum, Tortula truncata, Dicranoweissia cirrata.
Plus récemment, la végétation des parcelles qui constituent l'actuelle réserve naturelle agréée du marais de Genneville a été décrite en détail dans le cadre de la demande d'agrément réalisée par Natagora (TAYMANS, 2014).
Les communautés végétales peuvent être distinguées en trois grands groupes:
- les milieux aquatiques (ruisseaux, fossés, mares et zone inondable);
- les milieux prairiaux;
- les milieux liés à la dynamique forestière (essentiellement boisements alluviaux et marécageux et ancienne coupe à blanc de peupleraie).
Milieux aquatiques
Le marais de Genneville est traversé et bordé par la Trislaine, qui comporte une végétation eutrophe des ruisseaux de sources eutrophes. Le tronçon amont du cours d'eau, juste en aval des sources où l'on note la présence de légères incrustations calcaires, est caractérisé par une pente faible et un lit peu végétalisé, alors que plus en aval, la pente pratiquement nulle induit une sédimentation favorable au développement d'une abondante végétation à base d'âche faux-cresson (Apium nodiflorum) et cresson de fontaine (Nasturtium officinale). Le lit et les berges de ce ruisseau ont encore un caractère naturel, mais les curages intempestifs entrepris par le propriétaire voisin tendent à détériorer la qualité du cours d'eau.
La réserve comporte deux mares creusées en octobre 2012 dans sa partie orientale. Celles-ci, de superficie respective de 50 et 250 m², voient leurs berges être progressivement recolonisées par des espèces de mégaphorbiaies et de roselières. En 2013, une algue du genre Chara sp. s'y est développée de façon exubérante.
La partie occidentale de la réserve comprend une large dépression inondée en hiver mais s'asséchant en été, occupée par une belle phragmitaie (ou « roselière vraie »).
Milieux prairiaux
Les milieux les mieux représentés au sein de la réserve, en termes de surface, sont les milieux prairiaux. D'après les cartes topographiques les plus anciennes (notamment celles de Ferraris vers 1770 et Vandermaelen vers 1850), il apparaît que ces prairies sont caractérisées par une continuité historique et ne semblent donc jamais avoir été converties en cultures. La partie orientale de la réserve comporte divers types de prairies humides, plus ou moins enfrichées ou abandonnées, alors que la partie occidentale a été plantée de peupliers (Populus x canadensis) au cours des dernières décennies, ceux-ci ayant été exploités fin 2011, ce qui a permis la régénération des espèces végétales des milieux ouverts, en rapide évolution.
Les milieux prairiaux présents du marais de Genneville sont relativement diversifiés et comprennent les végétations suivantes:
- une prairie de fauche de basse à moyenne altitude; cet habitat est essentiellement représenté dans la partie plus sèche et est dominé par le fromental (Arrhenatherum elatius) et le vulpin des prés (Alopecurus pratensis). En raison de la proximité de terres agricoles, cet habitat est fortement rudéralisé, et on y observe une abondance d'ortie (Urtica dioica) et de liseron des haies (Calystegia sepium), fort envahissants. On y observe encore néanmoins la berce commune (Heracleum sphondylium) et la gesse des prés (Lathyrus pratensis).
- une prairie de fauche humide moyennement fertilisée occupe une partie conséquente du site, en transition avec d'autres habitats prairiaux (mégaphorbiaies, roselières et magnocariçaies). Celle-ci est caractérisée par la présence de l'angélique sauvage (Angelica sylvestris), le populage des marais (Caltha palustris), le lychnis fleur de coucou (Lychnis flos-cuculi), la stellaire des sources (Stellaria alsine), le scirpe des bois (Scirpus sylvaticus), l'eupatoire chanvrine (Eupatorium cannabinum), la salicaire (Lythrum salicaria), le lotier des fanges (Lotus pedunculatus), la canche cespiteuse (Deschampsia cespitosa), etc.
- des éléments de prairies abandonnées à reine des prés (Filipendula ulmaria), dans les zones où la prairie humide n'a plus fait l'objet de gestion par fauche depuis plusieurs années.
- des éléments de magnocariçaies à laiche des marais (Carex acutiformis) en mosaïque avec les autres milieux prairiaux, témoignant d'un certain abandon.
- une roselière sèche, en mosaïque avec les précédents types prairiaux, présente localement, et témoignant de l'absence de gestion, elle est caractérisée par une plus faible diversité floristique.
- une phragmitaie ou roselière «vraie» au sein de la zone inondable, constituée par un peuplement presque pur de roseau commun (Phragmites australis).
- des éléments de mégaphorbiaies nitrophiles et hygrophiles dans les secteurs les plus rudéralisés, composés de peuplement d'ortie (Urtica dioica), liseron des haies (Calystegia sepium), gaillet gratteron (Galium aparine), cirse maraîcher (Cirsium oleraceum), galéopsis tétrahit (Galeopsis tetrahit), etc.
Les milieux liés à la dynamique forestière
Les milieux liés à la dynamique forestière sont essentiellement :
- des éléments d'aulnaie marécageuse sur substrat méso- à eutrophe, représentés localement par un stade jeune constitué de fourrés de saule cendré (Salix cinerea), mais également présents en dehors des parcelles de la réserve, entre ses parties orientale et occidentale. Outre l'aulne glutineux (Alnus glutinosa), les espèces typiques de ce boisement marécageux sont le houblon (Humulus lupulus), le populage des marais (Caltha palustris), la primevère élevée (Primula elatior), la morelle douce-amère (Solanum dulcamara), etc.
- des haies bien développées, riches en espèces dominées par l'aubépine à un style (Crataegus monogyna) et le sureau noir (Sambucus nigra), occupent la bordure nord de la réserve.
- des mises à blanc, clairières, trouées récentes en milieu marécageux et non marécageux, qui caractérisent la partie occidentale de la réserve, celles situées en milieu marécageux évoluant rapidement vers la mégaphorbiaie et la magnocariçaie.
Intérêt floristique du marais de Genneville
La flore du marais de Genneville fait l'objet d'inventaires depuis les années 1970 au moins, mais seules les plantes supérieures ont été étudiées à ce jour.
La richesse globale des parcelles en réserve s'élève à 173 espèces, ce qui est assez remarquable pour un site aussi exigu. Bien que comprenant pas d'espèces rarissimes ou protégées, cette liste comporte toutefois plusieurs plantes rares ou tout au moins très localisée dans le contexte de la Région limoneuse: c'est particulièrement le cas de la laîche noire (Carex nigra), de la crépide des marais (Crepis paludosa), de la véronique mouron d'eau (Veronica anagallis-aquatica), mais aussi du jonc à tépales aigus (Juncus acutiflorus), si répandu en Ardenne mais beaucoup plus disséminé ailleurs.
Intérêt mycologique
La fonge n'a encore jamais fait l'objet d'inventaires détaillés et seules 32 espèces de champignons ont été recensées dans la réserve. Parmi elles, notons la présence d'Auriculariopsis ampla, un champignon lignicole poussant surtout sur les brindilles de peuplier tremble et rare en Brabant, ainsi que de Hymenoscyphus albidus, un ascomycète vivant sur les feuilles mortes de frêne.
Intérêt faunistique
La faune n'a été que partiellement documentée et en particulier l'intérêt entomologique n'a été abordé que récemment. Les listes de toutes les espèces recensées jusqu'en 2014 figurent dans le dossier de demande d'agrément de la réserve naturelle. D'autres observations ont été réalisées depuis, notamment par le conservateur de la réserve.
Les mammifères n'ont fait l'objet que d'observations occasionnelles, avec seulement 8 espèces recensées dont le rat des moissons (Micromys minutus), le blaireau (Meles meles) rare en Région limoneuse, ainsi que deux espèces de chauves-souris.
Les oiseaux représentent le groupe le mieux connu, pour lequel on dispose du plus grand nombre de données. Pas moins de 90 espèces d'oiseaux ont été observées dans la réserve ou à proximité immédiate. On soulignera plus particulièrement la présence durant la période de nidification du martin-pêcheur (Alcedo atthis), de la bouscarle de Cetti (Cettia cetti), du bruant des roseaux (Emberiza schoeniclus), de la rousserolle effarvatte (Acrocephalus scirpaceus), la linotte mélodieuse (Carduelis cannabina), le bruant jaune (Emberiza citrinella), la mésange boréale (Poecile montanus), le gobemouche gris (Muscicapa striata), le pic épeichette (Dendrocopos minor), le pigeon colombin (Columba oenas) et, en migration ou pendant l'hiver, la sarcelle d'hiver (Anas crecca), la bécassine des marais (Gallinago gallinago), la bécasse des bois (Scolopax rusticola), le chevalier culblanc (Tringa ochropus), ...
En outre, la chevêche d'Athéna (Athene noctua) est cantonnée en bordure du site, au hameau de Mont-à-Lumay et son maintien est dépendant de l'offre en cavités, notamment dans les vieux saules têtards.
En ce qui concerne les vertébrés aquatiques, le ruisseau de la Trislaine abrite une population d'épinoche (Gasterosteus aculeatus) et les mares hébergent trois ou quatre amphibiens dont la grenouille rousse (Rana temporaria) et le crapaud commun (Bufo bufo).
Au sein de l'entomofaune, qui constitue l'essentiel de la biodiversité de nos régions, on relève au moins 17 espèces de papillons de jour la plupart communes et répandues en Région limoneuse, à l'exception du collier de corail (Aricia agestis) et du thécla du bouleau (Thecla betulae), et 19 espèces de libellules surtout concentrées au niveau des mares creusées en 2012, la plupart étant également communes sauf l'agrion nain (Ischnura pumilio), espèce pionnière qui disparaît assez vite lorsque la végétation devient trop touffue, et le sympétrum noir (Sympetrum danae), libellule rare en Brabant wallon typique des eaux stagnantes oligotrophes pouvant aussi coloniser les mares plus eutrophes entourées de cariçaies.
A ces deux groupes d'insectes très populaires auprès des naturalistes viennent s'ajouter d'autres taxons plus occasionnellement rencontrés ou reconnus, comme les coléoptères avec 25 espèces dont la petite biche (Dorcus parallelipipedus), proche du lucane mais plus répandu et lié à la présence de bois mort, de même que la cétoine dorée (Cetonia aurata), espèce légalement protégée, et la donacie aquatique (Donacia aquatica), inféodée aux végétations rivulaires; les hyménoptères dont les abeilles solitaires Dasypoda hirtipes, Anthophora furcata et Melitta nigricans, ou encore les Diptères avec le syrphe Tropidia scita étroitement lié aux zones humides.