• F0 - Condroz

A compléter

Site classé par Arrêté Royal du 18 juillet 1980

Commune de Dinant.

Privé(s)   ONG   Communes   Région   Autres publics 

Ardenne et Gaume ASBL siège Maison J.Duvigneaud - 9 rue de la Chapelle - B-5670 Vierves-sur-Viroin.

Responsable du site (conservateur) : Chistophe GOFFIN tél : 082/22.34.77

Protection d'un site calcaire prestigieux de la basse vallée de la Lesse renfermant des phénomènes karstiques, un parc archéologique ainsi que des milieux calcicoles d'une très grande valeur scientifique.

Le piétinement des nombreux visiteurs (plus de 20.000) pourrait avoir un effet défavorable sur les pelouses qui bordent les chemins. Les nombreux kayaks qui descendent la Lesse pendant l'été sont particulièrement dérangeant pour la faune.

Maintenir des buissons en bordure du chemin qui longe le plateau de Hauterecenne pour canaliser le public.

Plan de gestion visant à rétablir, entretenir et développer les pelouses calcaires.

Le site se compose de deux parties bien distinctes :
- le 'parc' accessible au public mais uniquement le long d'une promenade balisée décrite dans deux publications ;
- la réserve botanique, interdite au public, où des visites guidées sont organisées régulièrement.

Le massif de Furfooz se trouve dans la basse vallée de la Lesse, sur la rive droite de la rivière. Il correspond au synclinal de calcaire viséen et tournaisien d'Anthée-Falmignoul. Le faciès récifal du Waulsortien (Tournaisien) et le "marbre noir" de Dinant (Viséen) y sont particulièrement bien représentés. Le site comporte un plateau contourné par la Lesse à l'est, au sud et à l'ouest et coupé en deux parties par le ri des Vaux, petit ruisseau de débit irrégulier (plateau de Hauterecenne à l'est; plateau de la montagne de Chalet ou de Chaleux à l'ouest). Les versants de ce ruisseau et de la Lesse ont des orientations et des pentes variées qui créent des biotopes contrastés. Le synclinal d'Anthée-Falmignoul est longé par deux crêtes (tiges) de psammites famenniens, l'anticlinal de Dréhance-Anseremme au nord; l'anticlinal d'Hulsonniaux au sud. En aval de Furfooz se dresse le site des "Aiguilles de Chaleux".

La région est truffée de grottes qui ont livré des vestiges préhistoriques importants (ex.Trou de la Naulette : vestiges du Paléolithique moyen). Les phénomènes karstiques y sont nombreux, le plus spectaculaire d'entre eux est le bras souterrain de la Lesse, qui traverse tout le massif. Il fut exploré pour la première fois, il y a une trentaine d'années, par des spéléologues. Plusieurs salles et galeries y furent découvertes (salle Frans Foulon, galerie d'Ardenne et Gaume ... ) ainsi qu'un lac dont l'extrémité ouest est visible au Fond des Vaux. Les grottes et cavernes du massif de Furfooz (et des massifs environnants) ont été occupées par l'homme depuis des millénaires (14.000 ans environ).

La réserve naturelle de Furfooz présente une flore et une végétation très variées, à dominance calcicole, d'un intérêt patrimonial exceptionnel. Ce site remarquable est parcouru depuis longtemps par les naturalistes si bien que de nombreuses données biologiques sont disponibles, aussi bien historiques que contemporaines.

Végétation et flore

Les parties boisées sont formés de chênaies-charmaies thermophiles sur les pentes bien exposées, de frênaies-érablières de ravin sur les versants ombragés et humides, d'aulnaies-frênaies alluviales le long de la Lesse.

Les cultures qui avaient été établies sur le plateau de Hauterecenne et sur le plateau de la Montagne du Chalet pendant la guerre de 1940-45 ainsi que les pelouses pâturées jadis par les moutons sont en voie de recolonisation forestière. On y trouve tous les stades de transition entre les pelouses postculturales et postpastorales et la forêt.

Les fourrés d'épineux à Prunus spinosa, Crataegus spp., Rosa canina (etc.) caractérisent les sites laissés à l'abandon, tandis que les manteaux forestiers des bois établis sur calcaire sont riches en espèces thermophiles qui tendent à envahir les pelouses : Viburnum lantana, Rhamnus cathartica, Cornus mas, Euonymus europaeus, etc. Les ourlets présentent un grand intérêt: à côté des espèces habituelles de ce type de milieu comme Polygonatum odoratum et Vincetoxicum hirundinaria, on peut observer notamment les rares Hypericum montanum et Carex humilis...

Les parois rocheuses plus ou moins verticales portent les espèces typiques de l'alliance du Festucion pallentis: Festuca pallens, Biscutella laevigata subsp. varia, Melica ciliata, Lactuca perennis, Sisymbrium austriacum subsp. austriacum, ... Les replats qui surmontent les rochers sont colonisés par les espèces de l'Alysso-Sedion avec Sedum album, Potentilla neumanniana et diverses petites annuelles comme Erophila verna subsp. verna, Saxifraga tridactylites, Minuartia hybrida. Les fissures plus ou moins profondes de la roche abritent diverses fougères dont le rare Ceterach officinarum.

Les pelouses qui couronnent les plateaux et les sommets des rochers rassemblent de nombreuses espèces. Les pelouses les plus sèches (Xerobromion) sont constituées principalement par Sesleria caerulea accompagné de Globularia bisnagarica, Anthericum liliago et divers chaméphytes comme Teucrium chamaedrys, Teucrium botrys, Helianthemum nummularium subsp. nummularium, etc.

Sur les sols plus profonds s'établit une pelouse dominée par Brachypodium pinnatum et piquetée en automne de Gentianella germanica. Une décalcification superficielle avec acidification locale se traduit par l'apparition de Genista tinctoria, Stachys officinalis, Cytisus scoparius et même parfois Calluna vulgaris.

Les forêts les plus intéressantes sont les frênaies-érablières de ravin qui, sur les versants de la Lesse, abritent des plantes caractéristiques comme Asplenium scolopendrium, Lunaria rediviva, Polystichum aculeatum, etc., ainsi que la forêt-galerie, où s'observe le rare Ulmus laevis avec en sous-bois Gagea lutea, Aconitum lycoctonum subsp. vulparia, Persicaria bistorta, Lathraea squamaria, Allium ursinum, Corydalis solida, Anemone ranunculoides, etc.

Dentaria bulbifera, dont une petite population existe près du Trou des Nutons, est particulièrement abondant en aval de la buvette, dans la plaine alluviale et en contrebas des versants boisés. A cet endroit, pousse également Dipsacus pilosus.

Une zone de sols plus profonds porte un groupement apparenté à la chênaie-frênaie riche en Carex sylvatica, Geum urbanum, Glechoma hederacea. C'est là, paradoxalement, que pousse Actaea spicata.

Très localement, à l'extrémité nord de la réserve, un passage de psammites famenniens se marque par l'apparition de ronciers (Rubus sp.) ainsi que Hypericum pulchrum et des tapis de Polytrichum formosum.

Juniperus communis est abondant par endroits dans les pelouses sèches, sans toutefois formé de véritables fourrés. Catapodium rigidum, petite graminée annuelle subméditerranéenne, colonise les murs des anciennes fortifications.

Plusieurs espèces d'orchidées sont représentées sur le site, certaines n'ayant toutefois plus été observées récemment comme par exemple Orchis ustulata.

Lors des coupes forestières, diverses plantes intéressantes peuvent apparaître comme Herniaria glabra, Verbascum densiflorum, Carex muricata subsp. lamprocarpa, Aquilegia vulgaris,... Narcissus pseudonarcissus est largement représenté dans les sous-bois.

LEURQUIN (2007) a signalé la présence d'Asplenium trichomanes subsp. pachyrachis, taxon rare des parois calcaires, à frondes fortement appliquées contre le substrat.

En 2019, le site a été le théâtre d'une botanique exceptionnelle, celle d'une petite station de Teucrium montanum, une lamiacée typique des éboulis calcaires ensoléillés et des pelouses rocailleuses et menacée d'extinction en Région wallonne. Signalée il y a plus d'un siècle dans le site voisin des Aiguilles de Chaleux, cette plante n'avait encore jamais été répertoriée sur le site de Furfooz (voir HAEGHENS & PREUD'HOMME, 2019).

La bryoflore y est représentée par de nombreuses espèces intéressantes calcicoles et xérothermophiles. L'une d'elles, Grimmia dissimulata, y a été découverte en 2006 et n'est connue que d'une ou deux autres localités en Région wallonne (DE BEER, 2008).

Intérêt faunistique

La faune du massif calcaire de Furfooz a fait l'objet de nombreuses observations depuis près d'un siècle.

Parmi les études récentes, épinglons le remarquable inventaire des Lépidoptères réalisé par CLAEREBOUT & RENNESON (2017) rassemblant pas moins de 660 espèces différentes, dont 48 papillons de jour (Rhopalocères) et 285 microlépidoptères, ce dernier groupe étant souvent négligé, en tous cas jusqu'à ces dernières années.

A souligner également la synthèse sur les Hémiptères hétéroptères, ou punaises, par CLAEREBOUT (2018) qui énumère 87 espèces incluant diverses espèces rares et typiques des zones calcaires thermophiles comme Gonocerus juniperi, Copium clavicorne, Dicranocephalus medius, Ischnocoris hemipterus, Holcostethus sphacelatus, Eurygaster maura, ...

Nombreuses grottes et chantoirs : Trou du Grand Duc, Trou qui Fume, Chantoir des Nutons, Trou des Nutons, Trou du Frontal, Trou de la Mâchoire, Trou du Crâne, Grotte de la Gatte d'Or, Trou Rosette, Trou Reuviau, etc.
Falaises calcaires et phénomènes karstiques variés et souvent spectaculaire (cours souterrain de la Lesse,...).

Cavernes occupées par les populations préhistoriques (- 14.000 ans environ). Vestiges des époques Paléolithique et du Néolithique.
Forteresse romaine de Hauterecenne (éperon barré) datée des IIIème et IVème siècles après J.C.; Etablissement thermal incluant caldarium, tepidarium, frigidarium, hypocauste soigneusement reconstitués (voir notamment SAINT-AMAND, 2004).

Les grottes et cavernes du massif de Furfooz (et des massifs environnants) ont été occupées par l'homme depuis des millénaires (jusque -14.000 ans environ). Des vestiges du Paléolithique et du Néolithique ont été trouvés, notamment :
- dans le Trou des Nutons : outillage en silex, bois de chute de rennes, ossements d'animaux (rennes, faons, chevaux, chamois, bisons, etc...), morceau de bois de renne gravé d'un avant-train de bison, fragment d'oligiste oolithique du Magdalénien ;
- dans le Trou du Frontal : ossements d'animaux (renne, cheval, chamois, etc...), outillage en silex, dalle gravée d'un arrière-train d'aurochs ou de renne, coquilles fossiles, pendeloque du Magdalénien; ossuaire du Néolithique, daté de 2.400 ans avant notre ère, dont deux crânes qui ont servi de base pour établir la 'race de Furfooz'.
Le Trou Reuviau, d'après DEWEZ, 'comprend la séquence la plus complète du Paléolithique de Furfooz. Le matériel archéologique paléolithique indique un mélange de Paléolithique moyen (rare) et de Paléolithique supérieur (plus abondant). On y reconnaît des outils de l'épi-aurignacien, peut-être du Périgordien, peut-être aussi du Magdalénien, mais c'est moins probable, et enfin du creswello-tjongérien'.
Une ancienne exploitation de calcite d'âge néolithique existe sur le plateau de la Montagne de Chaleux.
Le plateau de Hauterecenne a probablement été occupé encore à l'époque proto-historique comme l'attestent des fragments de poteries de la fin du Hallstatt ou de la Tène (milieu du premier millénaire avant notre ère) (BRULET).
L'aménagement du plateau de Hauterecenne en forteresse (éperon barré) remonte à la fin de l'occupation romaine (IIIème et IVème siècles après J.C.). C'est à ce moment qu'il faut situer la construction des thermes servant de dépendance à la redoute. Vers le milieu du IVème siècle, la forteresse a été l'objet de remaniements et a servi de lieu de garnison à de nouveaux venus (une milice d'origine germanique) qui ont enterré leurs morts dans les ruines de l'établissement thermal. Le promontoire a connu une occupation aux périodes mérovingienne et carolingienne. De ces différentes époques datent l'enceinte fortifiée, le retranchement et les deux murs de barrage, les vestiges de deux tours,... En outre, les traces de deux petits édicules occupés à l'époque romaine tardive ont été trouvés au bord de la Lesse.
En 1958, Ardenne et Gaume a procédé à la reconstruction complète de l'établissement thermal qui est 'devenu un document didactique grandeur nature qui mérite la visite' (BRULET). Caldarium, tepidarium, frigidarium, hypocauste y sont soigneusement reconstitués.

RESNAT

Jacqueline SAINTENOY-SIMON (AEF)

Stéphane Claerebout (CNB)