Les prés de la «Fontaine Paulus» s'étendent sur la frange sud du plateau de l'Ardenne condruzienne, à l'ouest de Rotheux-Rimière, sur le territoire de la commune de Neupré, à une dizaine de kilomètre de la ville de Liège.
Situées à une altitude comprise entre 240 et 260 mètres, ces prairies couvrent environ deux hectares sur un versant sud offrant des conditions écologiques variées, liées au gradient topographique du vallon. Le sous-sol est composé de roches dévoniennes (alternance de grès, psammites et schistes) sur lesquelles se sont développés des sols limoneux modérément à fortement gleyifiés. La nappe perchée sur cette assise imperméable est à l'origine de différentes sources à mi-versant, responsables du caractère très marécageux d'une partie du site. Le drainage est nettement meilleur sur les zones plus pentues du versant, ce qui permet le développement d'une végétation très contrastée. Au pied du versant s'écoule un modeste ru forestier, affluent du ruisseau du bois des Moges, rejoignant le ruisseau de Bottinfosse et enfin l'Ourthe à Esneux.
Du point de vue biogéographique, le site appartient à la région continentale et au district phytogéographique mosan.
Le site de la «Fontaine Paulus» n'a été porté à la connaissance des naturalistes qu'en 2008 et les données biologiques restent donc fragmentaires. L'essentiel des informations présentées ci-après provient des investigations réalisées dans le cadre du LIFE Pays Mosan (F. Degrave et al. – Natagora).
La richesse botanique remarquable de ces prairies doit son salut au relief chahuté du terrain, limitant fortement les possibilités d'accès aux engins agricoles. Caractéristique remarquable pour cette région, le bocage a été préservé sur quelques hectares, avec des éléments d'intérêt important, comme de vieux alignements de charmes et d'aubépines. Cette zone agricole est actuellement gérée de façon relativement extensive par le propriétaire, mais son avenir n'est pas assuré car ces prairies sont dépourvues de statut de protection et n'ont pas été reprises dans le réseau Natura 2000.
La partie supérieure du site est une pâture humide peu fertilisée, semblable à celles qui caractérisaient autrefois une très grande partie de la crête du Condroz ardennais. On y retrouve bon nombre de plantes hygrophiles : Juncus effusus, Juncus conglomeratus, Cirsium palustre, Lotus pedunculatus, Lychnis flos-cuculi, Equisetum palustre, Carex ovalis, Carex disticha, Carex cuprina, Carex hirta,...
Au sud, le vallon s'encaisse rapidement. L'eau du plateau s'y écoule dans une petite goulotte qui s'évase ensuite pour former un marécage. Cette zone est gorgée d'eau toute l'année, de sorte qu'elle n'est quasiment jamais fréquentée par les bovins. Malgré sa taille (moins de 10 ares), elle présente une grande diversité botanique. Y ont été notés : Dactylorhiza majalis*, Equisetum palustre, Juncus acutiflorus, Juncus conglomeratus, Lychnis flos-cuculi, Mentha aquatica, Scirpus sylvaticus, Lotus pedunculatus, Angelica sylvestris, Valeriana dioica, Carex nigra, Caltha palustris, Carex disticha, Cirsium palustre, Deschampsia cespitosa, Chrysosplenium oppositifolium,... Persicaria bistorta semble par contre absente de cette zone. L'abandon de toute fauche dans les parties les plus humides mène à la colonisation par la reine des prés, Filipendula ulmaria et à l'évolution vers la mégaphorbiaie.
De part et d'autre du marécage, le versant présente une végétation extrêmement maigre, liée à des sols très superficiels. La hauteur maximale de la végétation n'y dépasse guère 20 centimètres. Centaurea jacea, Leucanthemum vulgare et Lotus corniculatus offrent des floraisons abondantes dès le mois de mai. Un cortège assez complet d'espèces nitrofuges est observé: Festuca rubra, Briza media, Luzula campestris, Hypochoeris radicata, Pimpinella saxifraga, Leontodon autumnalis, Rumex acetosella, Hieracium pilosella,...
Dans les parties les plus rases, Succisa pratensis est présente, alors que plus haut, Saxifraga granulata couvre parfois plusieurs mètres carrés. On notera aussi la présence d'espèces végétales connues pour apprécier le calcaire. Rappelons que nous sommes ici en « Ardenne condruzienne », mais à quelques centaines de mètres à peine du « vrai Condroz »., caractérisé par cette alternance de bancs de calcaire et de grès. On n'est donc pas surpris d'observer l'aigremoine eupatoire (Agrimonia eupatoria), le clinopode (Calamintha clinopodium) ou encore la laîche glauque (Carex flacca). Plus rare, un pied de de bugrane rampante (Ononis repens) a été découvert à mi-pente.
L'intérêt faunistique n'est que partiellement documenté vu que le site n'est connu que depuis 2008. Vu la diversité floristique de l'endroit, on peut toutefois préjuger d'une importante richesse entomologique. Ainsi, une population de nacré de la sanguisorbe (Brenthis ino) a été découverte en 2010, à plusieurs dizaines de kilomètres de l'aire de distribution connue. Les lisières épineuses sont fréquentées par le thécla de la ronce (Callophrys rubi) alors que les floraisons abondantes du lotier corniculé attirent d'autres lycènes plus communs comme le cuivré commun (Lycaena phlaeas) et l'argus bleu (Polyommatus icarus). Deux ou trois massifs d'eupatoire chanvrine (Eupatorium cannabinum) se montrent également très attractifs pour les papillons de jour.
Les prés à joncs accueillent en outre de nombreux criquets ensanglantés (Stethophyma grossum), autre espèce en expansion mais restant inconnue localement.
L'herpétofaune bénéficie d'une combinaison de lisières étagées, de zones humides extensives et de zones refuges (tas de bois, ronciers, haies). La couleuvre à collier (Natrix natrix) y a été observée à deux reprises, alors que le lézard vivipare (Zootoca vivipara) est observé très régulièrement. L'orvet fragile (Anguis fragilis) est à rechercher. La salamandre tachetée (Salamandra salamandra) fréquente le versant boisé adjacent. Grenouilles rousses (Rana temporaria) et crapauds communs (Bufo bufo) sont fréquents. L'avifaune comprend les espèces typiques du bocage : fauvettes babillarde (Sylvia curruca), grisette (S. communis) et à tête noire (S. atricapilla), faucon crécerelle (Falco tinnunculus), chevêche d'Athéna (Athene noctua), bruant jaune (Emberiza citrinella), grive musicienne (Turdus philomelos), bouvreuil pivoine (Pyrrhula pyrrhula), etc. Le moineau friquet (Passer montanus) est encore présent aussi, malgré son déclin très important en Condroz.
Du côté des mammifères, toutes les espèces répandues fréquentent l'important massif du bois des Moges, adjacent au site. Notons qu'une importante colonie de blaireaux (Meles meles) est installée à quelques dizaines de mètres de la zone marécageuse. Les lisières et ronciers sont favorables aux petits mammifères ; le muscardin sera recherché dans les prochaines années.