La végétation du site des mares de Ben-Ahin est remarquablement variée. Elle a été étudiée notamment par SAINTENOY-SIMON (1982) et SAINTENOY-SIMON & ROUSSELLE (1986).
A - Autour et dans les étangs, mares et marécages, on observe:
- une végétation flottante à Lemna minor, peu importante;
- une végétation aquatique fixée à Myriophyllum verticillatum, Ceratophyllum demersum, Ranunculus circinatus et Hottonia palustris. Ces espèces n'ont cependant pas été revue depuis les années 1980. Hottonia palustris était encore très abondant il y a quelques années, mais un curage intempestif l'a pratiquement éliminé; l'espèce subsiste encore en aval de la réserve (c'est la dernière population connue en val de Meuse);
- une végétation plus ou moins amphibie à Menyanthes trifoliata (unique station mosane de cette espèce plus typiquement ardennaise!);
- des roselières à Typha latifolia, à Glyceria maxima, à Phalaris arundinacea, à Iris pseudacorus, à Sparganium erectum subsp. neglectum, à Rumex hydrolapathum;
- des magnocariçaies qui rassemblent des cyperacées extrêmement rares dans la vallée de la Meuse. Ainsi, aux côtés de taxons relativement courants comme Carex acuta, Carex acutiformis, Carex riparia, Carex remota, on trouve à Ben-Ahin des formations de laîches devenues exceptionnelles dans la région tels que Carex elata, Carex pseudocyperus, Carex paniculata, Carex vesicaria; dans l'aulnaie, on note en plus Carex elongata;
- des saulaies occupant les zones régulièrement inondées lors des fortes pluies. De nombreuses espèces de saules (et différents hybrides) s'y rencontrent: Salix aurita, S. cinerea, S. atrocinerea, S.triandra, S. x. rubens;
- une aulnaie fragmentaire, réfugiée sur les étroites séparations entre les mares et le long du ruisseau de Gisves et une aulnaie relativement étendue située au pied du versant. La première est une aulnaie à Carex remota et C. elongata dans laquelle on rencontre Scutellaria galericulata, Solanum dulcamara avec quelques arbustes et plantes grimpantes typiques comme Frangula alnus, Viburnum opulus, Ribes rubrum, R. nigrum, Humulus lupulus,... La seconde aulnaie, quasi inaccessible, est envahie par une vaste magnocariçaie;
- une mégaphorbiaie plus ou moins fragmentaire riche en Filipendula ulmaria, Lythrum salicaria, Epilobium hirsutum, Angelica sylvestris, Lycopus europaeus, Eupatorium cannabinum, Symphytum officinale, Mentha aquatica et abritant également une magnifique population de Thalictrum flavum, espèce jadis abondante dans les prairies de fauche des plaines alluviales, mais actuellement cantonnée dans les rares fragments de berges encore plus ou moins naturelles de la Meuse;
- des peuplements de Caltha palustris, Lychnis flos-cuculi, Myosotis scorpioides, Ranunculus flammula,...
B - Sur le versant boisé (bois de Goesnes):
- une chênaie et chênaie-hêtraie établie sur le sommet, à strate herbacée dominée par Luzula sylvatica, avec en outre Dryopteris carthusiana, Luzula pilosa, Vaccinium myrtillus, Deschampsia flexuosa, ..
- des ronciers occupant les replats du versant, melés de Sambucus racemosa et de Lonicera periclymenum;
- une chênaie-charmaie à Betula pendula et Ilex aquifolium, à strate herbacée pauvre;
- une chênaie-charmaie mésophile occupant les colluvions à strate arbustive comprenant Corylus avellana, Sambucus nigra et avec dans la strate herbacée Arum maculatum, Lamium galeobdolon, Mercurialis perennis, Ranunculus ficaria, R. auricomus, Milium effusum, Stellaria holostea, Anemone nemorosa, Oxalis acetosella, Corydalis solida, Ornithogalum umbellatum, ainsi que diverses fougères dont le rare Polysticum setiferum;
- une frênaie formant une galerie le long du chemin bordant le bas du versant. On y rencontre notamment Carex sylvatica, Ranunculus ficaria,...; lors des crues, la limite extrême des dépôts d'alluvions se situe à ce niveau; cette frênaie se raccorde aux groupements de la plaine alluviale proprement dite (aulnaie à Carex elongata et à C. elata).
La faune aquatique est très bien représentée, les mares de Ben-Ahin constituant un des derniers milieux humides de la vallée mosane entre Namur et Liége.
Les mares de Ben-Ahin présentent un intérêt exceptionnel sur le plan odonatologique avec 31 espèces dont 20 reproductrices signalées par TITEUX (2000). Les inventaires ultérieurs ont fait monter ce nombre à 38 espèces, soit plus de la moitié de la faune belge, ce qui en fait un site majeur en Wallonie. A ce titre, il est aussi l'un des plus visités par les amateurs et photographes, ce qui ne va pas toujours sans mal pour ce milieu sensible.
L'espèce phare est sans doute l'agrion délicat (Ceriagrion tenellum) dont Ben-Ahin a longtemps constitué sa seule station wallonne (GOFFART et al., 2006). L'agrion gracieux (Coenagrion pulchellum), la libellule fauve (Libellula fulva), l'orthétrum bleuissant (Orthetrum coerulescens), l'aeschne printanière (Brachytron pratense) et le leste brun (Sympecma fusca) sont les autres espèces d'intérêt patrimonial présentes dans la réserve.
Récemment, plusieurs autres espèces sont apparues sporadiquement sur le site, en particulier l'aeschne isocèle (Aeshna isoceles), très occasionnel au niveau régional et observé en 2010 seulement, l'orthétrum brun (Orthetrum brunneum), une espèce jadis très localisée en Wallonie mais de plus en plus présente depuis une vingtaine d'années, et le sympétrum jaune d'or (Sympetrum flaveolum), fort rare dans la vallée de la Meuse et noté pour la première fois en 2014.
L'évolution du peuplement odonatologique jusqu'en 2011 a été analysée en détail par MOTTE et al. (2012) qui ont montré que la diversité spécifique a très peu varié au cours du temps, depuis le début des observations sur le site (années 1990).
En dehors des libellules, les autres groupes d'invertébrés aquatiques n'ont encore jamais fait l'objet d'études.
D'après un rapport de synthèse réalisé en 2014 par X. Vandevyvre, conservateur de la réserve naturelle, l'avifaune de Ben-Ahin est constituée de près de 100 espèces, principalement forestières et paludicoles. Quarante d'entre-elles sont considérées comme nicheuses régulières sur le site ou à proximité immédiate, et trois comme nicheuses possibles. La zone humide accueille notamment le martin-pêcheur d'Europe (Alcedo atthis), la gallinule poule d'eau (Gallinula chloropus), la foulque macroule (Fulica atra), le canard colvert (Anas platyrhynchos), la mésange nonnette (Parus palustris), la rousserolle verderolle (Acrocephalus palustris), le coucou gris (Cuculus canorus), etc. Trois palmipèdes exotiques sont également présents sur le site: la bernache du Canada (Branta canadensis), nicheuse depuis quelques années, ainsi que le canard mandarin (Aix galericulata) et le canard carolin (Aix sponsa) qui sont régulièrement notés mais sans indices de reproduction.
D'autres espèces plus forestières se reproduisent également dans les limites du site, dont la chouette hulotte (Strix aluco), le grimpereau des jardins (Certhia brachydactyla), le pigeon colombin (Columba oenas), le roitelet huppé (Regulus regulus), la grive draine (Turdus viscivorus), la sittelle torchepot (Sitta europaea), le verdier d'Europe (Carduelis chloris), le pic épeichette (Dendrocopos minor), l'accenteur mouchet (Prunella modularis), l'étourneau sansonnet (Sturnus vulgaris), la mésange à longue queue (Aegithalos caudatus). On peut ajouter des nicheurs locaux qui fréquentent régulièrement la zone tels que la bondrée apivore (Pernis apivorus), le pic noir (Dryocopus martius), l'épervier d'Europe (Accipiter nisus) ou encore le bouvreuil pivoine (Pyrrhula pyrrhula).
Les autres espèces d'oiseaux exploitent la réserve comme source de nourriture (rapaces e.a.), comme lieu de repos ou de halte migratoire, ou encore comme site d'hivernage. Certaines sont purement occasionnelles comme par exemple le rare bihoreau gris (Nycticorax nycticorax) noté en 2003, tandis que d'autres semblent être des hivernants rares comme le râle d'eau (Rallus aquaticus).
Les mares sont peuplées de plusieurs espèces de poissons qui ont été introduites pour la pratique de la pèche, en particulier des carpes (Cyprinus carpio).
Deux espèces de mammifères sont particulièrement actives sur le site. Le sanglier (Sus scrofa), en surdensité partout, utilise les zones marécageuses comme souille et occasionne de nombreux boutis en périphérie. Le rat musqué (Ondatra zibethicus), espèce d'origine nord-américaine, altère la végétation rivulaire et aquatique et fragilise les berges en creusant ses galeries.