Si la Rouge Croix de Han-sur-Lesse a été parcourue à de nombreuses reprises au cours des dernières décennies, en raison de son intérêt botanique bien connu, très peu de choses ont été écrites sur la flore et la végétation de ce site, hormis ce qu'en dit THILL (1964) et les quelques comptes rendus publiés entre autre dans les Barbouillons, la revue des Naturalistes de la Haute Lesse.
La première synthèse sur l'intérêt botanique et phytosociologique du site est due à GODEFROID et VERHELPEN (1997). Ces auteurs y distinguent les groupements suivants:
1. La pelouse à brome érigé:
Constitué d'une pelouse relativement ouverte mélant des espèces des pelouses calcicoles mésophiles et des espèces de pelouses acidophiles, ce groupement pose problème quant à sa position phytosociologique (variante silicicole du Mesobrometum ou association du Brachypodio-Sieglingietum ?). Il présente d'ailleurs sur le site plusieurs faciès plus ou moins bien caractérisés:
- Faciès à Luzula campestris, premier groupement traversé lorsqu'on aborde le site par le nord-ouest, renferme de nombreuses calcicoles comme Bromus erectus, Briza media, Helianthemum nummularium, Phleum bertolonii, Trifolium montanum, Potentilla neumanianna, Cirsium acaule, Carex flacca, Anthyllis vulneraria, Koeleria macrantha, Koeleria pyramidata, Genista tinctoria, Prunella laciniata, Hieracium pilosella, ... ainsi que quelques acidophiles, surtout Luzula campestris, particulièrement abondant.
- Faciès à Aster linosyris et Avenula pratensis, très semblable au faciès précédent, mais dans lequel prend place les deux espèces précitées ainsi que l'acidophile Danthonia decumbens. On y observe aussi d'abondants semis spontanés de Pinus sylvestris.
- Faciès à Orchis morio, qui correspond à une pelouse à Bromus erectus dans laquelle apparait plusieurs dizaines de pieds d'Orchis morio ainsi que Viola canina et Primula veris.
2. Ourlet à Digitalis lutea:
La lisière nord du site est constituée par un talus où l'on observe un ourlet herbacé avec Carlina vulgaris, Ononis repens, Cirsium acaule, Leontodon hispidus, Scabiosa columbaria, Digitalis lutea (bien représenté), Senecio erucifolius, Melilotus altissimus, Galeopsis angustifolia, ...
3. Fourrés à Prunus spinosa:
Ce groupement résulte d'une évolution naturelle des pelouses vers le climax forestier. Il est formé de divers arbustes épineux: Prunus spinosa, Crataegus monogyna, Pyrus pyraster, Rosa rubiginosa, ... Orchis mascula en lisière ou à l'intérieur de ces fourrés.
4. Chênaie-charmaie:
Ce groupement représente le stade forestier issu de l'évolution spontanée des pelouses laissées à l'abandon. La strate arborée est relativement basses (10-15 m). Quercus robur, Carpinus betulus y sont dominant, en mélange avec Prunus avium, Fraxinus excelsior et quelques Fagus sylvatica qui annoncent l'évolution de la chênaie vers la hêtraie climacique. Différents arbustes sont présents dans le sous-bois dont Crataegus monogyna, Viburnum lantana, Malus sylvestris. Hedera helix s'y développe en nappes sur le sol. Parmi les herbacées: Brachypodium pinnatum, Geum urbanum, Viola hirta, Euphorbia cyparissias, Bromus erectus, Dactylis glomerata, Alliaria petiolata, Geranium robertianum, Platanthera chlorantha, ...
5. Pinède à Pinus sylvestris:
Ce jeune boisement artificiel couvrant la partie sud du site ne présente qu'un faible intérêt botanique, avec une strate arbustive dominée par Rubus spp. Rosa canina s.l., Prunus spinosa, Crataegus monogyna, etc.
Depuis cette synthèse de GODEFROID et VERHELPEN (1997), la végétation a sans doute évolué suite à diverses interventions mises en oeuvre dans le cadre du plan de gestion de cette RND (déboisements, débroussaillages, pâturage ovin, ...). L'actualisation des données serait donc nécessaire. Malgré la disparition de la petite astéracée Antennaria dioica, l'intérêt de la Rouge Croix demeure assez exceptionnel.
Ainsi, dix ans plus tard, la pelouse à Bromus erectus renfermait encore Orchis morio, Globularia bisnagarica, Prunella laciniata, Avenula pratensis, Genistella sagittalis, Genista tinctoria, etc. Aster linosyris y est représentée par une plage d'une dizaine de m2, à l'est de la croix.
On observe également des fragments de pelouse calcicole du Mesobromion à Brachypodium pinnatum, Bromus erectus, Thymus pulegioides, Centaurea scabiosa, Galium pumilum, Ononis repens, Lotus corniculatus, Galium verum, Campanula rotundifolia, Scabiosa columbaria, Pimpinella saxifraga, Teucrium chamaedrys, etc.
Sur les rares affleurements rocheux visibles sur le site, en particulier le long de la route à l'est de la croix, se développe un lichen crustacé peu répandu et très localisé, Rhizocarpon petraeum (det. J.-P. Duvivier).
Le sommet du coteau est couvert par une chênaie calcicole secondaire, éclaircie et pâturée récemment dans le cadre du plan de gestion du site.
Le bas du versant ouest est occupé par des fourrés bas à Prunus spinosa, Crataegus monogyna et Rubus sp.
L'intérêt faunistique de la Rouge Croix est important mais aucune synthèse des données ne semble exister. Le site accueille notamment une belle diversité d'espèces de papillons de jour: près de 40 espèces observées entre 1991 et 2007 dont l'argus nain (Cupido minimus), le point de Hongrie (Erynnis tages), le bleu nacré (Lysandra coridon), le fluoré (Colias alfacariensis), etc.