La flore phanérogamique du Fond Ficot, dont l'ensemble du tuf au sens strict (paroi suintante, ruisselet et vasques) est d'un intérêt exceptionnel, a été étudiée en détail par DUVIGNEAUD et SAINTENOY-SIMON (1991). Ces auteurs ont distingué plusieurs secteurs:
A. tuf de ruisseau
Dans les eaux s'écoulant en cascades, apparaissent des barrages de tuf calcaire; ils se sont constitués principalement grâce à l'algue Phormidium incrustatum; les deux mousses Bryum pseudotriquetrum et Cratoneuron filicinum envahissent ensuite les vasques à courant ralenti. Les abords du ruisselet voient apparaître Thamnium alopecurum, Mnium undulatum, Pellia endiviifolia,... On note à ce niveau une extension forestière, favorisée d'ailleurs par l'ombrage donné par une vieille plantation d'épicéa. C'est le frêne (Fraxinus excelsior) qui abonde à cet endroit. Les troncs coupés de quelques gros épicéas, dont le débardage est pratiquement impossible étant donné les difficultés d'accès, encombrent le lit du ruisseau et pourraient endommager les fragiles barrages de tuf.
B. Tuf sur dalle rocheuse
Dans la partie aval du Fond Ficot, l'écoulement des eaux se fait sur de grandes dalles calcaires fortement redressées, correspondant peut-être au front de taille d'une ancienne carrière. Le site est envahi par des algues et une végétation bryophytique dominée par Cratoneuron filicinum et Bryum pseudotriquetrum. C'est sur ces coussinets de mousses que s'implantent peu à peu les premières phanérogames liées à ce tuf actif. Une partie du tuf, sans doute soumise à des périodes d'assèchement plus fréquentes, voit apparaître de vastes peuplements de Calliergonella cuspidata. On peut se rendre compte de l'évolution rapide de la colonisation végétale de ce site parcouru par des eaux riches en hydrogénocarbonate de calcium: Colonisation algale des dalles calcaires suintantes > végétation de bryophytes dominées principalement par Cratoneuron filicinum et Bryum pseudotriquetrum dans les zones les plus humides, par Calliergonella cuspidata dans les zones les moins mouilleuses > arrivée progressive des phanérogames liées à ce milieu de tuf actif, entre autres les plantules de Fraxinus excelsior > constitution d'une frênaie embryonnaire.
C. Cône de déjections
L'extrémité aval du Fond Ficot occupe des colluvions de bas de pente, tuffeuses ou limoneuses, plus ou moins remaniées à l'occasion de travaux d'exploitation d'une ancienne carrière. Le ruisselet les parcourt. Une forêt à la fois calcicole et fraîche s'y est implantée.
Contrairement à la physiomie générale des Fonds de Leffe, le vallon du Fond Ficot est remarquablement et densement boisé. Plusieurs types forestiers croissent côte à côte, plus ou moins en mélange, selon la nature du substrat présent. En bas du versant, l'encaissement du Fond Ficot entraîne la présence de dépressions ombragées abritant des fragments de frênaie-érablière de ravin à Asplenium scolopendrium, Polystichum aculeatum, Geranium robertianum, Fraxinus excelsior, Tilia platyphyllos, Acer pseudoplatanus, etc.
Un taillis thermophile se maintient difficilement à la lisière forestière des plantations ou des chênaies-charmaies et chênaies-frênaies, comprenant Berberis vulgaris, Ligustrum vulgare, Viburnum lantana, Cornus mas, C. sanguinea, Corylus avellana, Prunus spinosa, Clematis vitalba, Euonymus europaeus, Brachypodium pinnatum,... outre quelques pieds de Buxus sempervirens.
Les fragments de chênaie-charmaie calcicole soulignent les caractéristiques du substrat calcaire, avec Carpinus betulus, Prunus avium, Primula veris, Hedera helix, Vinca minor, Mercurialis perennis, Lamium galeobdolon subsp. montanum, Polygonatum multiflorum, Euphorbia amygdaloides, Melica uniflora, Brachypodium sylvaticum, Ribes uva-crispa, etc.
Les espèces suivantes sont liées au milieu du tuf calcaire en voie de colonisation forestière ou aux forêts fraîches, de type frênaie: Fraxinus excelsior, Viburnum opulus, Sambucus nigra, Rubus caesius, Ribes rubrum, Eupatorium cannabinum, Geranium robertianum, Poa trivialis, Stachys sylvatica, Scrophularia auriculata, Solanum dulcamara, Potentilla reptans, Angelica sylvestris, Ranunculus ficaria subsp. bulbilifer, Cardamine pratensis, Epilobium parviflorum, Alliaria petiolata, Mycelis muralis, Carex sylvatica, Epilobium ciliatum, etc.
La bryoflore du tuf du Fond Ficot a été curieusement peu étudiée. DE ZUTTERE (1993) mentionne seulement dix espèces observées le 9 janvier 1993: Amblystegium serpens, Aneura pinguis, Bryum pseudotriquetrum, Conocephalum conicum, Cratoneuron filicinum, Eucladium verticillatum, Fissidens adianthoides, Fissidens mildeanus (actuellement nommé Brachythecium mildeanum), Mnium stellare, Pellia endiviifolia.
Un inventaire bryologique plus précis a été réalisé le 29 février 2012 par J.-M. Couvreur (SPW/DEMNA). Aux abords de la source actuelle du tuf, sont notés Aneura pinguis, Fissidens crassipes, Rhynchostegiella teneriffae, Platyhypnidium (=Rhynchostegium) riparioides et Thamnobryum alopecurum. Le cortège présent dans la partie supérieure de la cascade, un peu avant les vasques, comporte Aneura pinguis, Conocephalum conicum, Cratoneuron filicinum, Ctenidium molluscum, Oxyrrhynchium (=Eurhynchium) hians, Lophocolea bidentata, Platyhypnidium riparioides.
En haut de la grande cascade de bas de pente se développent Aneura pinguis, Bryum pseudotriquetrum, Cratoneuron filicinum, Eucladium verticillatum, Oxyrrhynchium hians, Fissidens dubius, Thamnobryum alopecurum. Dans la partie basse du cron (paroi dégoulinante et tablette alluviale) apparaissent Cratoneuron filicinum, Ctenidium molluscum, Fissidens taxifolius et Platyhypnidium riparioides.
La présence de Rhynchostegiella teneriffae (confirmée par A. Sotiaux) sur le tuf du Fond Ficot, aux abords de la source, mérite d'être soulignée car il s'agit d'une espèce rare, présente dans moins de 10 stations en Wallonie, toutes situées dans la vallée de la Meuse du côté de Dinant. Cette mousse est assez strictement inféodée aux suintements calcaires.
La faune du Fond Ficot n'a semble-t-il jamais fait l'objet d'inventaires.
Deux espèces phares de ce type de cours d'eau ont été recensées ces dernières années: il s'agit de la salamandre terrestre (Salamandra salamandra) et d'une libellule très spécialisée et discrète, le cordulégastre bidenté (Cordulegaster bidentata).