Carte d'identité
Les plantes aquatiques invasives sont dotées d'une forte capacité de dispersion dans l'environnement. Elles s'échappent facilement des pièces d'eau dans lesquelles elles ont été introduites. Un petit fragment de tige de quelques centimètres à peine suffit à régénérer une plante entière. Graines et boutures voyagent avec une facilité déconcertante, emportées par l'eau, les oiseaux ou l'homme... Mètre par mètre, kilomètre après kilomètre, elles colonisent les milieux aquatiques aux eaux stagnantes ou faiblement courantes.
Dans les eaux chaudes et bien ensoleillées, ces plantes sont dotées d'une vigueur exceptionnelle et présentent un développement exubérant. Partant des berges où elles s'enracinent, elles développent un front qui progresse vers l'eau libre durant toute la saison de végétation. Dépourvues d'ennemis naturels et peu consommées par les poissons, rien ne semble pouvoir freiner leur croissance. En été, ces plantes doublent leur masse en l'espace de 2 à 3 semaines seulement et leurs rameaux s'accroissent de plusieurs centimètres par jour. Certaines d'entre elles sont même parfaitement amphibies: elles s'étendent sur et sous la surface de l'eau ainsi que sur la terre ferme.
En quelques semaines seulement, l'hydrocotyle fausse-renoncule est capable de recouvrir complètement une pièce d'eau. Photos: Provincie Antwerpen. |
[LIEN] Télécharger l'article du Pêcheur belge (PDF-2032 ko)(juin 2013) |
Capsule vidéo "Halte à la prolifération des plantes aquatiques invasives"
(Octobre 2015)
Nuisances
Les plantes aquatiques invasives sont à l'origine de multiples nuisances qui affectent tant la biodiversité que les activités socio-économiques.
Altération des écosystèmes aquatiques
Les plantes aquatiques invasives ont la mauvaise habitude de former des herbiers très denses tant à la surface que dans la colonne d'eau. Elles interceptent la lumière et réduisent la disponibilité en oxygène, ce qui conduit progressivement à la mort biologique des milieux aquatiques qu'elles colonisent. Très compétitives, elles tendent à étouffer et à supplanter les autres espèces végétales. Elles ont un impact négatif très marqué sur les populations de poissons et d'invertébrés aquatiques.
Invasion d'un étang par le myriophylle hétérophylle: les plantes visibles en surface ne constituent que la pointe émergée de l'iceberg! La vie aquatique se trouve profondément affectée par le développement exubérant de la plante. Photos: Andreas Hussner. |
Des dommages socio-économiques
Elles sont aussi une source de nuisances pour l'homme car elles perturbent l'écoulement de l'eau, provoquent l'enrichissement et le comblement accéléré des eaux stagnantes, constituent une gêne pour les activités nautiques et réduisent considérablement l'accessibilité aux zones de pêche. Une fois installées, ces plantes sont très difficiles à maîtriser du fait de leur important pouvoir de propagation et de régénération. Elles sont à l'origine d'une charge de travail importante pour les gestionnaires des milieux aquatiques: leur présence multiplie par dix les coûts ordinaires d'entretien des voies d'eau.
Photos: Emmanuel Delbart. |
Plantes oxygénantes ou asphyxiantes?
Les vertus oxygénantes et épuratrices de nombre de plantes aquatiques invasives comme le cabomba, la crassule, les élodées ou les myriophylles sont souvent ventées dans les «garden centers» et les magasins d'aquariophilie. Qu'en est-il exactement? L'idée avancée est que l'activité photosynthétique de ces plantes immergées assure l'équilibre des bassins aquatiques et aide à maintenir une eau claire. Ces plantes produiraient et renouvelleraient l'oxygène essentiel à la vie des poissons. Toutefois, cette fonction importante ne peut être remplie que si elles ne se développent pas de manière excessive. Quand elles se mettent à proliférer, elles réduisent fortement la pénétration de la lumière dans l'eau et produisent de grandes quantités de matière organique qui tend à s'accumuler au fond des bassins aquatiques. Si cette matière organique n'est pas régulièrement évacuée, sa décomposition conduit à une consommation excessive de l'oxygène dissous dans l'eau par les micro-organismes et mène graduellement à... l'asphyxie du milieu aquatique! Vous avez dit oxygénant?
Le cabomba de Caroline est une plante fréquemment utilisée en aquariophilie pour ses vertus oxygénantes. Sa prolifération entraîne pourtant une asphyxie progressive des milieux aquatiques naturels suite à la décompostion de la biomasse importante qu'elle produit. Photos: Alex Kawazaki et Eyeweed. |
Enquête
Avis de recherche ! La plupart des plantes aquatiques invasives ont été introduites récemment et sont encore peu répandues en Wallonie. Leur répartition est assez mal connue. Une information pourtant essentielle si l'on veut agir de manière précoce pour enrayer leur progression. Aidez-nous à y voir plus clair...
Six espèces font l'objet d'un inventaire détaillé sur le territoire wallon (voir tableau). La plupart sont originaires d'Amérique du Sud et sont dotées d'une nature amphibie qui leur permet de coloniser à la fois les milieux rivulaires et les milieux aquatiques proprement dits. Avec un peu d'entrainement, il est possible de les reconnaître facilement sur base des fiches d'identification à télécharger à partir d'ici.
Nom français | Nom latin | Ecologie | Identification | |
Cabomba de Caroline | Cabomba caroliniana | Fiche | pdf (PDF-872 ko) | |
Crassule des étangs | Crassula helmsii | Fiche | pdf (PDF-3031 ko) | |
Hydrocotyle fausse-renoncule | Hydrocotyle ranunculoides | Fiche | pdf (PDF-1851 ko) | |
Jussie à grandes fleurs Jussie rampante | Ludwigia grandiflora Ludwigia peploides | pdf (PDF-2678 ko) pdf (PDF-2678 ko) | ||
Myriophylle du Brésil | Myriophyllum aquaticum | Fiche | pdf (PDF-623 ko) | |
Myriophylle hétérophylle | Myriophyllum heterophyllum | Fiche | pdf (PDF-536 ko) |
Toute observation peut être signalée en cliquant sur le lien ci-dessus. Il est demandé de joindre un document photographique permettant de valider les données récoltées. Merci d'avance pour votre collaboration !
Prévention
Une série de recommandations pratiques permettent de limiter les risques de dispersion des plantes aquatiques invasives dans l'environnement. Elles peuvent être mises en pratique par chacun d'entre nous.
Avant d'aménager un milieu aquatique, renseignez-vous sur l'origine des plantes que vous voulez introduire et privilégiez autant que possible les espèces indigènes,
Apprenez à reconnaître les plantes aquatiques invasives et évitez à tout prix de les introduire dans les milieux aquatiques,
Lors des travaux d'entretien des mares et des aquariums, veillez à ne rejeter aucun fragment de plante aquatique dans le milieu naturel et privilégiez le compostage du produit de fauche ou d'arrachage sur sol sec, en dehors des zones inondables.
Bon à savoir: des actions sont aujourd'hui menées dans toute la Belgique pour limiter la production, la vente et l'utilisation de ces plantes dans le cadre du code de conduite sur les plantes ornementales invasives (AlterIAS). Pour chacune d'entre elles, des espèces alternatives non ou peu envahissantes peuvent être facilement trouvées. Une initiative qui est soutenue par toute une série de producteurs et de distributeurs de plantes aquatiques dans notre pays.
Téléchargez le dépliant
Voir aussi: AlterIAS, Be plant wise!
Gestion
La lutte contre les plantes aquatiques invasives se fonde généralement sur un arrachage manuel ou mécanique de celles-ci, à répéter plusieurs fois dans le temps jusqu'à épuiser complètement leurs populations.
Lorsque la surface contaminée ne dépasse pas quelques mètres carrés (fossés, mares, bassins, etc.), on peut envisager de traiter les plantes par un arrachage manuel. On veillera à prélever l'entièreté des plantes (tiges et racines) et à limiter la production de fragments. Dans certains cas, un bâchage de longue durée (> 6 mois) ou un comblement de la dépression envahie peut être envisagé. Bien qu'assez efficaces, ces techniques sont souvent évitées car elles modifient fortement le site géré.
Les sites de plus grande taille doivent être gérés par un arrachage mécanique. On utilise une grue munie d'une pince hydraulique, le tout étant monté sur une barge flottante lorsque le site n'est pas accessible depuis les berges. Cette technique est efficace pour éliminer les tapis denses de plantes invasives mais présente le désavantage d'être peu sélective. Elle est aussi destructrice pour les milieux aquatiques (berges, déstructuration du fond) et génère beaucoup de fragments de plantes. Elle doit être suivie de finitions manuelles afin d'éliminer les repousses. L'arrachage mécanique doit être mené par du personnel préalablement formé pour ces tâches.
D'autres techniques sont parfois préconisées. Nous déconseillons la mise en œuvre de techniques de lutte biologique et de lutte chimique car elles peuvent être très dommageables pour l'environnement. Le faucardage ne doit pas non plus être préconisé; peu efficace, il génère un grand nombre de fragments susceptibles de favoriser la dispersion de la plante.
Plus d'informations?
Le groupe de travail français «Invasions biologiques en milieux aquatiques» - GT IBMA - a publié une soixantaine de fiches de retours d'expériences de gestion. Ces fiches sont consultables en ligne sur le site web du GT IBMA. | |
GT IBMA (2015) connaissances pratiques (volume 1) (PDF-16823 ko) et expériences de gestion (volume 2) (PDF-26862 ko) sur les espèces exotiques envahissantes dans les milieux aquatiques. | |
Delbart, E. & Monty, A. (2012) Guide de gestion des plantes aquatiques invasives en Wallonie. Gembloux Agro Bio-Tech, 28 pp. A télécharger ici (PDF-17697 ko). | |
Agence de l'eau Rhin-Meuse (2008) Gestion des plantes aquatiques envahissantes. A télécharger ici (PDF-1593 ko). |