La description qui suit est largement inspirée du dossier de demande d'agrément (TAYMANS, 2013). Les Prés de la Wamme sont situés à cheval sur les territoires des communes de Marche-en-Famenne (ancienne commune de Hargimont) et de Nassogne (ancienne commune de Harsin), dans le nord de la province de Luxembourg. Ils s'étendent sur une trentaine d'hectares, dont une partie (13,6 ha) appartient à Natagora et constitue la réserve naturelle des «Prés de la Wamme», correspondant à la partie occidentale du site (lieu-dit A Thiriri).
Le site, quoique très proche de la Famenne, fait partie du district phytogéographique ardennais, lequel forme ici une enclave sur la bordure méridionale du district mosan. Il occupe la portion aval du bassin versant de la Wamme, rivière de 1ère catégorie et principal affluent de rive droite de la Lomme, laquelle est rejointe à Jemelle, à environ 6 kilomètres. D'une largeur d'un à deux mètres, la Wamme coule ici selon un axe est-ouest et se caractérise par un cours naturel et des berges très peu artificialisées, avec un lit constitué principalement de limons et de pierres. Au sein de la réserve, elle reçoit en rive gauche les eaux d'un petit affluent, le Ri des Aunes, et celles d'un fossé sans nom, tous deux classés en 3ème catégorie. Malgré le fait que la Wamme traverse plusieurs zones urbanisées et agricoles situées en amont, notamment le village de Harsin, sa qualité biologique globale est considérée comme excellente.
D'un point de vue infrastructure, la vallée est parcourue au nord par la route nationale N896 Hargimont-Nassogne et au sud par une petite route agricole, la rue de Binte. La zone incluant la réserve naturelle est à peu près indemne de toute construction.
Le dénivelé est assez faible allant de 255 mètres d'altitude au niveau des parcelles situées sur les versants de la vallée, à environ 240 mètres dans le fond de la vallée.
D'après la carte géologique, les Prés de la Wamme reposent sur des alluvions modernes des grandes vallées du système quaternaire. Les versants de la vallée voient quant à eux affleurer des roches du système primaire, datées du Dévonien inférieur : grès banc de Mormont et grès et schistes noir verdâtre de Vireux (étage Coblencien) en amont et grès et schistes rouges de Winenne (étage Burnotien) en aval.
Les sols sont essentiellement constitués d'alluvions limoneuses peu caillouteuses fortement à très fortement gleyifiées à engorgement en eau permanent avec zone de battement (sigles pédologiques Gep et Gip). Les versants sont quant à eux caractérisés par des sols limono-caillouteux à drainage naturel modéré, à horizon B structural comprenant par endroits une charge schisto-gréseuse à plus de 80 cm de profondeur (sigles pédologiques Gcbr1 et Gcb1). En amont, on constate la présence d'une petite lentille de sol remanié, à proximité du talus de route.
Les Prés de la Wamme prennent place au sein d'une vallée ouverte dont le versant nord est relativement escarpé et principalement boisé (Bois Marengo), tandis que le versant sud est en pente moins prononcée avec une alternance de boisements (Bois de Binte, Bois Thiriri), de zones cultivées et de prairies entrecoupées de haies. Les bois environnants comportent autant de feuillus que de résineux (épicéas en particulier).
La flore et la végétation des parcelles incluses dans la réserve naturelle des Prés de la Wamme sont décrites dans le dossier de demande d'agrément (TAYMANS, 2013).
Les communautés végétales présentes au sein de la réserve naturelle des Prés de la Wamme peuvent être réparties en trois grands groupes:
- les habitats aquatiques (rivière, ruisseaux et fossés)
- les habitats prairiaux
- les habitats liés à la dynamique forestière (essentiellement boisements alluviaux)
Les milieux aquatiques
La réserve naturelle des Prés de la Wamme est axée autour de la Wamme, qui s'apparente à un ruisseau famennien à forte pente et aux eaux eutrophes. Cette rivière comporte encore des berges naturelles et un lit caractérisé par la présence de nombreux bancs de galets peu végétalisés et d'embâcles naturels (bois morts et arbres déracinés). Des phénomènes d'érosion naturelle s'y produisent encore spontanément.
Dans la partie amont de la réserve s'observe un bras mort de la Wamme, constituant un chapelet de petites dépressions inondées présentant un intérêt certain pour la faune, et notamment pour les batraciens.
Le site est également traversé et/ou longé par deux ruisseaux: le ri des Aunes et un fossé non nommé. Ces deux ruisseaux, alimentés par des sources, ont des eaux de bonne qualité. Leurs berges sont colonisées par une végétation fournie. Une plante aquatique peu commune, la renoncule à feuilles de lierre (Ranunculus hederifolia), y a été observée récemment. En outre, ces ruisseaux et leurs affluents jouent, à travers leur caractère linéaire, un rôle fondamental de corridor écologique.
Les habitats prairiaux
Comme attesté par les anciennes cartes consultées (notamment Ferraris, 1770), les prairies humides occupaient anciennement une grande partie de la plaine alluviale. Du fait de l'abandon récent de certaines de ces prairies, notamment au nord de la Wamme dans la partie amont de la réserve (exploitation difficile pour les engins agricoles actuels), ces milieux ont par endroits été partiellement recolonisés par les ligneux.
Les habitats prairiaux présents dans la réserve de la Wamme sont relativement diversifiés:
- des prairies abandonnées et des mégaphorbiaies rivulaires à reine des prés, végétations herbacées assez hautes caractérisées non seulement par l'abondance de la reine des prés (Filipendula ulmaria), mais également par la présence d'espèces telles que l'eupatoire chanvrine (Eupatorium cannabinum), l'épiaire des marais (Stachys palustris), la lysimaque vulgaire (Lysimachia vulgaris), la balsamine des bois (Impatiens noli-tangere), la baldingère (Phalaris arundinacea) et le lotier des fanges (Lotus pedunculatus). Cette végétation se rencontre essentiellement dans la partie orientale de la réserve, en rive droite de la Wamme, ainsi qu'au niveau du fossé traversant les prairies en rive gauche.
- des prairies de fauche humides moyennement fertilisées s'observent au niveau des dépressions humides au sein des prairies de la rive gauche de la Wamme, en transition avec d'autres types prairiaux. Celles-ci sont caractérisées par la présence du populage (Caltha palustris), du lychnis fleur de coucou (Lychnis flos-cuculi), du jonc acutiflore (Juncus acutiflorus), du lycope (Lycopus europaeus), de la stellaire aquatique (Stellaria alsine), du scirpe des bois (Scirpus sylvaticus), de la renoncule flammette (Ranunculus flammula), du gaillet des marais (Galium palustre), de la laîche vésiculeuse (Carex vesicaria), du lotier des fanges (Lotus pedunculatus), ...
- des prairies pâturées permanentes pas ou peu fertilisées, en transition avec les prairies de fauche humides moyennement fertilisées, regroupent des espèces telles que la luzule champêtre (Luzula campestris), la flouve odorante (Anthoxanthum odoratum), la laîche des lièvres (Carex ovalis), la gesse des prés (Lathyrus pratensis), la laîche en épi (Carex spicata), etc.
- des jonchaies dans les zones les plus fangeuses, dominées par le jonc épars (Juncus effusus) et le jonc acutiflore (Juncus acutiflorus).
- des pâtures permanentes intensives, parfois fortement fertilisées, occupent les parties plus sèches de la réserve. Elles sont dominées par diverses graminées, en particulier le vulpin des prés (Alopecurus pratensis), le fromental (Arrhenatherum elatius), le dactyle aggloméré (Dactylis glomerata) et la fléole des prés (Phleum pratense). Cet habitat peu diversifié sur le plan biologique est actuellement en cours de conversion vers des pâtures pas ou peu fertilisées. Un verger hautes-tiges a été récemment installé dans l'une de ces prairies, dans un souci de diversification de la réserve naturelle.
Les habitats liés à la dynamique forestière
Les parties forestières et préforestières sont représentées par plusieurs habitats plus ou moins bien typés.
En bordure de la Wamme et de son bras mort, un beau cordon rivulaire relevant de l'aulnaie-frênaie alluviale des cours d'eau rapides, renferme notamment la balsamine des bois (Impatiens noli-tangere), la stellaire des bois (Stellaria nemorum), la reine des prés (Filipendula ulmaria) et la bistorte (Persicaria bistorta). On observe également, au niveau du bras mort, la présence de trois cypéracées intéressantes: la laîche faux-souchet (Carex pseudocyperus), la laîche allongée (Carex elongata) et la laîche vésiculeuse (Carex vesicaria)
Cette aulnaie-frênaie alluviale est, par endroits, mélangée à des éléments de chênaie-frênaie subatlantique neutrophile sur sol hydromorphe (paraclimacique) et d'aulnaie marécageuse sur substrat méso- à eutrophe.
Un élément de chênaie-frênaie subatlantique neutrophile de substitution de la hêtraie est présent sur le versant en contrebas de la route. On peut y voir une petite mise à blanc récente en milieu oligotrophe.
Sur ce talus sous la route s'observe en outre un fourré à Prunus spinosa, Crataegus sp., Salix caprea, Malus sylvestris.
La réserve des Prés de la Wamme se trouve dans le site Natura 2000 BE34022 «Basse Vallée de la Wamme». Elle renferme plusieurs habitats d'intérêt communautaire:
- Rivières des étages planitiaires à montagnard avec végétation du Ranunculion fluitantis et du Callitricho-Batrachion (3260)
- Mégaphorbiaies hydrophiles d'ourlets planitiaires et des étages montagnards à alpin (6430)
- Hêtraies de l'Asperulo-Fagetum (9130)
- Chênaies pédonculées ou chênaie-charmaies subatlantiques et médio-européennes du Carpinion betuli (9160)
- Forêts alluviales à Alnus glutinosa et Fraxinus excelsior (Alno-Padion, Alnion incanae, Salicion albae) (91E0).
La flore de la réserve naturelle est riche de près de 150 espèces végétales. Cette diversité sera sans doute encore accrue en multipliant les inventaires, en particulier dans les secteurs les moins prospectés. Parmi elles, plusieurs montrent un intérêt patrimonial particulier et sont considérées comme rares voire très rares dans le district ardennais, comme la laîche vésiculeuse (Carex vesicaria), la renoncule à feuilles de lierre (Ranunculus hederaceus) (espèce «en danger» sur la liste rouge wallonne), la laîche allongée (Carex elongata), la laîche faux-souchet (Carex pseudocyperus), la véronique à écus (Veronica scutellata), ou encore la grande prêle (Equisetum telmateia).
La faune peuplant le site est aussi fort diversifiée mais elle n'est que très imparfaitement connue, en dehors de quelques rares groupes de vertébrés et d'insectes.
Une quarantaine d'oiseaux, la plupart nicheurs avérés ou potentiels, ont été recensés sur le site, incluant plusieurs espèces d'intérêt patrimonial, comme la pie-grièche écorcheur (Lanius collurio), la locustelle tachetée (Locustella naevia), le pipit farlouse (Anthus pratensis), la bondrée apivore (Pernis apivorus), le cincle plongeur (Cinclus cinclus), la bergeronnette des ruisseaux (Motacilla cinerea), le martin-pêcheur d'Europe (Alcedo atthis), ces trois derniers ne s'écartant guère de la Wamme où ils peuvent être observés plus ou moins aisément. La pie-grièche grise (Lanius excubitor), de plus en plus rare, ne s'observe plus qu'occasionnellement durant la période hivernale.
L'herpétofaune est représentée par au moins une espèce de reptile, à savoir le lézard vivipare (Zootoca vivipara), et quatre espèces d'amphibiens.
Parmi les invertébrés, seul le groupe des papillons de jour, ou Rhopalocères, a fait l'objet d'inventaires particuliers dans la réserve naturelle. Pas moins de 20 espèces ont été recensées, dont quatre présentent une valeur patrimoniale. L'une d'elles, la grande violette (Brenthis ino), est liée aux mégaphorbiaies à reine des prés et est largement répandue en Ardenne. Deux autres, le cuivré fuligineux (Lycaena tityrus) et le demi-deuil (Melanargia galathea), sont typiques des prairies de fauche et divers types de pelouses sèches. La quatrième espèce intéressante est un élément forestier, la grande tortue (Nymphalis polychloros), dont la chenille se développe sur les ormes et d'autres feuillus.
Un autre groupe d'insectes, les orthoptères, a été partiellement documenté dans ce secteur de la vallée de la Wamme et ce dès le début des années 1990, lorsqu'une population de criquet marginé (Chorthippus albomarginatus) y fut découverte, à une époque où cette espèce était considérée comme disparue de Wallonie (GOSSERIES, 1993). Les autres espèces observées étaient le criquet des pâtures (Chorthippus parallelus), le criquet mélodieux (Chorthippus biguttulus), le criquet des clairières (Chrysochraon dispar) et la grande sauterelle verte (Tettigonia viridissima). Plus récemment, trois espèces plus ou moins en expansion dans la région ont été découvertes sur le site: le conocéphale bigarré (Conocephalus fuscus), le criquet ensanglanté (Stethophyma grossum) et la sauterelle cymbalière (Tettigonia cantans).