Désaffectée en décembre 2004, la carrière de Restaumont n'a pu être inventoriée dans le cadre de la convention «Inventaire des carrières et sablières de la Région wallonne». Les premières observations biologiques disponibles datent de 2005 (obs. T. Paternoster – SPW). A cette époque, ce site privé était inaccessible et seules quelques visites tardives ont pu être effectuées à la demande du DNF, dans le contexte d'un projet de réhabilitation de la carrière. Différents habitats potentiels de substitution y furent déterminés: des pentes sableuses abruptes; une falaise calcaire; des friches calcicoles; des pierriers; des zones sablonneuses et argileuses dénudées; des flaques temporaires peu profondes sur argiles; des mares permanentes bordées d'hélophytes; un fossé; des friches et fourrés rudéraux; des zones boisées.
La végétation et la flore ont été décrites très schématiquement dans le cadre d'un travail de fin d'études réalisé durant l'été 2008 et le printemps 2009 (GILLIAUX, 2009).
Les friches constituent l'habitat dominant de la carrière de Restaumont, où elles couvrent plus de 50 % de la surface. Elles rassemblent des espèces herbacées variées, souvent rudérales, y compris nombre d'exotiques naturalisées: carotte sauvage (Daucus carota), armoise commune (Artemisia vulgaris), tussilage (Tussilago farfara), tanaisie (Tanacetum vulgare), vipérine (Echium vulgare), arbre aux papillons (Buddleja davidii), ray-grass commun (Lolium perenne), mélilots (Melilotus spp.), trèfle des prés (Trifolium pratense), plantain lancéolé (Plantago lanceolata), bouton d'or (Ranunculus acris), cabaret des oiseaux (Dipsacus fullonum), cirse commun (Cirsium vulgare), pâturin comprimé (Poa compressa), cirse des champs (Cirsium arvense), calamagrostis commun (Calamagrostis epigejos), fraisier des bois (Fragaria vesca), dactyle commun (Dactylis glomerata), gaillet mou (Galium mollugo), ortie dioïque (Urtica dioica), linaire commune (Linaria vulgaris), séneçon du Cap (Senecio inaequidens), potentille rampante (Potentilla reptans), matricaire inodore (Matricaria maritima subsp. inodora), épilobe à petites fleurs (Epilobium parviflorum), séneçon commun (Senecio vulgaris), réséda jaune (Reseda lutea), érythrée petite centaurée (Centaurium erythraea), mauve musquée (Malva moschata), etc.
Sur les substrats rocheux ou sableux les plus arides, ce sont des formations apparentées à des pelouses sèches qui s'installent, avec la carline commune (Carlina vulgaris), le liondent des rochers (Leontodon saxatilis), le pâturin comprimé (Poa compressa), l'alchémille des champs (Aphanes arvensis), le céraiste nain (Cerastium pumilum), le saxifrage tridactyle (Saxifraga tridactylites), la vulpie faux brome (Vulpia bromoides), l'inule conyze (Inula conyzae), la drave printanière (Erophila verna), ...
Des buttes et talus boisés sont présents principalement dans l'extrémité nord-est et dans la partie orientale de la carrière, occupant environ 15% du site. Ces colonisations sont le fait de divers feuillus tels que l'érable sycomore (Acer pseudoplatanus), le chêne pédonculé (Quercus robur), le charme (Carpinus betulus), l'érable champêtre (Acer campestre), le frêne commun (Fraxinus excelsior), le marronnier d'Inde (Aesculus hippocastanum), le bouleau verruqueux (Betula pendula), l'orme champêtre (Ulmus minor), le saule marsault (Salix caprea), des peupliers (Populus spp.), l'aubépine à un style (Crataegus monogyna), le merisier (Prunus avium), le robinier faux-acacia (Robinia pseudoacacia), le châtaignier (Castanea sativa), le groseillier à maquereau (Ribes uva-crispa), le lierre (Hedera helix), le troène commun (Ligustrum vulgare), le cornouiller sanguin (Cornus sanguinea), le sureau noir (Sambucus nigra), la viorne obier (Viburnum opulus), etc. Dans ces boisements, s'épanouissent des herbacées forestières dont la fougère mâle (Dryopteris filix-mas), le lierre terrestre (Glechoma hederacea), la mercuriale vivace (Mercurialis perennis), le lamier jaune (Lamium galeobdolon), le gouet tacheté (Arum maculatum), la benoîte commune (Geum urbanum), le fraisier des bois (Fragaria vesca), localement aussi la langue de cerf (Asplenium scolopendrium). Par ailleurs, de jeunes saulaies et boulaies de colonisation se développent en divers secteurs de la carrière.
Occupant près d'un quart de la carrière, le plan d'eau est quasiment dépourvu de végétation aquatique, ce qui s'explique par ses berges verticales et sa profondeur importante. Seuls quelques arbustes comme des bouleaux verruqueux (Betula pendula) et saules (Salix spp.) et de petits massifs de massettes à larges feuilles (Typha latifolia) prennent place çà et là.
Les mares accueillent une flore plus ou moins développées, selon qu'elles sont temporaires ou permanentes. Sur leurs bords poussent habituellement des plantes basses comme la gnaphale des mares (Gnaphalium uliginosum), une forme particulière du grand plantain (Plantago major subsp. intermedia), la renoncule rampante (Ranunculus repens), le jonc des crapauds (Juncus bufonius), l'agrostis stolonifère (Agrostis stolonifera). Mais certaines mares et dépressions sont davantage colonisées par des espèces plus élevées, entre autre le roseau commun (Phragmites australis), la massette à larges feuilles (Typha latifolia), la salicaire (Lythrum salicaria), l'épilobe hirsute (Epilobium hirsutum), la véronique des ruisseaux (Veronica beccabunga), etc. En dehors de l'algue Chara vulgaris, les deux seules plantes réellement aquatiques observées sur le site sont le potamot crépu (Potamogeton crispus) et le potamot de Berchtold (Potamogeton berchtoldii).
Récemment, la carrière de Restaumont a été parcourue le 29 juin 2014 par les membres de l'AEF, qui ont inventorié près de 100 espèces végétales (SIRJACQ, 2015). Parmi elles, quatre méritent d'être signalées pour leur intérêt au niveau régional: l'érythrée petite centaurée (Centaurium erythraea), espèce partiellement protégée, globalement assez rare en Région wallonne mais fréquemment rencontrée dans les carrières; la grande prêle (Equisetum telmateia), rare partout en Wallonie sauf, curieusement, dans l'ouest de la région limoneuse; le liondent des rochers (Leontodon saxatilis), astéracée des sols filtrants, assez à rare en dehors de la Campine et des dunes du littoral, mais apparemment en expansion; la vulpie faux brome (Vulpia bromoides), graminée assez rare typique des pelouses silicicoles, colonisant aussi les terrils et autres sites thermophiles.
Comme dans beaucoup d'autres sites d'origine anthropique, la carrière est colonisée par plusieurs espèces de plantes exotiques: l'arbre aux papillons (Buddleja davidii), y est très abondant, en plus du séneçon du Cap (Senecio inaequidens), des onagres (Oenothera spp.), de la renouée du Japon (Fallopia japonica), du robinier faux-acacia (Robinia pseudoacacia), du peuplier de l'Ouest (Populus trichocarpa), de la potentille de Norvège (Potentilla norvegica), de l'aulne blanc (Alnus incana), de la vergerette du Canada (Conyza canadensis), du mélilot blanc (Melilotus albus), etc. On peut y ajouter le lotier à feuilles étroites (Lotus corniculatus subsp. tenuifolius), abondant et sans doute semé pour verduriser le site.
Différents inventaires faunistiques ont été réalisés dans la carrière de Restaumont depuis l'arrêt de l'exploitation, surtout à partir de 2006, auxquels ont contribué plusieurs observateurs, en particulier T. Paternoster, P. Jenard, A. Marin, L. Moreels, F. Stocman, M. Garin ainsi que des membres de la section locale des CNB. Fin des années 2000, un travail de fin d'études (GILLIAUX, 2009) a rassemblé les données disponibles pour plusieurs groupes (oiseaux, herpétofaune, coccinelles, lépidoptères rhopalocères, odonates, principalement). Ces inventaires ont révélé une richesse faunistique remarquable incluant de nombreuses espèces patrimoniales.
Oiseaux: près de 70 espèces ont été recensées jusqu'à présent sur le site de la carrière, mais certaines n'y sont que de passage ou ne semble pas s'y reproduire chaque année. Un des faits remarquables est l'installation d'une colonie d'hirondelle de rivage (Riparia riparia) comptant une vingtaine de nids occupés en 2007. Cette petite colonie installée dans une paroi sableuse à l'ouest du plan d'eau, a visiblement été mise à mal par un éboulement de la paroi, si bien que depuis 2013, la nidification n'a plus été constatée (P. Jenard, rapport de la CCGRND). Trois espèces palustres sont nicheuses sur l'étang: en 2013, un à trois couples de grèbe castagneux (Tachybaptus ruficollis), un couple de gallinule poule d'eau (Gallinula chloropus) et au moins deux nichées de foulque macroule (Fulica atra), cette dernière pouvant former des troupes de plusieurs dizaines d'individus en période postnuptiale. D'autres, comme le canard colvert (Anas platyrhynchos), le martin-pêcheur d'Europe (Alcedo atthis) et le grèbe huppé (Podiceps cristatus) ont été contactés à plusieurs reprises sur le plan d'eau, apparemment sans s'y reproduire. En hiver et durant les migrations, des groupes parfois importants de canards peuvent y stationner, dont les fuligules milouin (Aythya ferina) et morillon (Aythya fuligula), le canard siffleur (Anas penelope), etc. La rousserolle effarvatte (Acrocephalus scirpaceus) occupe les roselières qui se développent au bord des mares, tandis que quelques cantons de rousserolle verderolle (Acrocephalus palustris) sont recensés dans les friches et fourrés alentours. Ceux-ci sont également fréquentés par d'autres passereaux comme la fauvette grisette (Sylvia communis) avec au moins 7 couples nicheurs en 2013, le bruant jaune (Emberiza citrinella), le pouillot fitis (Phylloscopus trochilus), la linotte mélodieuse (Carduelis cannabina), voire même, certaines années, l'hypolaïs polyglotte (Hippolais polyglotta) et le pipit des arbres (Anthus trivialis). Les parois rocheuses et les vieilles murailles sont utilisées comme sites de nidification par quelques couples de pigeon colombin (Columba oenas). Le faucon crécerelle (Falco tinnunculus) et le rougequeue noir (Phoenicurus ochruros) sont réguliers et susceptibles de nicher dans la falaise.
Amphibiens: 8 espèces sont recensées, incluant le crapaud calamite (Bufo calamita) et l'alyte accoucheur (Alytes obstetricans) qui se reproduisent surtout dans les mares en tête de falaise, au nord-ouest de la carrière. La présence de la grenouille rieuse (Pelophylax ridibundus), espèce non indigène en Région wallonne, demande confirmation.
Reptiles: signalée par GILLIAUX (2009), la présence du lézard vivipare (Zootoca vivipara) est à souligner vu sa rareté en région limoneuse.
Odonates: avec 31 espèces (soit près de la moitié des espèces belges!) identifiées sur une période de huit années, la carrière de Restaumont apparaît comme un site de grand intérêt odonatologique; même si la plupart sont banales en Région wallonne, six d'entre-elles méritent mention: l'agrion nain (Ischnura pumilio), pionnier souvent rencontré dans les carrières récentes; le leste dryade (Lestes dryas), demoiselle rare typique des mares en cours d'atterrissement; l'orthétrum bleuissant (Orthetrum coerulescens), rare en région limoneuse, affectionnant les suintements et écoulements bien éclairés dans des habitats variés (tourbières, fonds de carrières, prairies humides, etc.); les trois autres espèces, le leste brun (Sympecma fusca), le sympétrum noir (Sympetrum danae) et l'orthétrum brun (Orthetrum brunneum), sont peu communes mais apparaissent plus fréquentes qu'avant au nord du sillon sambro-mosan. On ajoutera l'observation d'une espèce d'origine méridionale en expansion vers le nord restant rare en Belgique, l'aeschne affine (Aeshna affinis).
Papillons de jour: pas moins de 27 espèces ont été signalées depuis 2006, parmi lesquelles trois sont particulièrement rares en région limoneuse: le demi-deuil (Melanargia galathea), la piéride de la moutarde (Leptidea sinapis) et le petit nacré (Issoria lathonia), ce dernier, légalement protégé en Région wallonne, étant probablement erratique (ses plantes hôtes, les violettes du groupe de Viola arvensis, étant absentes de la carrière).
Orthoptères: les deux espèces habituellement rencontrées dans carrières calcaires sont présentes à Restaumont, à savoir l'oedipode à ailes bleues (Oedipoda caerulescens) et le tétrix des carrières (Tetrix tenuicornis). Une autre espèce remarquable, le tétrix des vasières (Tetrix ceperoi), a été observée récemment sur le site. Ce petit orthoptère qui ressemble fort à Tetrix subulata fut longtemps considéré comme disparu de Wallonie, mais il semble avoir réapparu récemment et les observations se multiplient, notamment en Hainaut. Il se cantonne au bord de mares et dépressions humides, dans des endroits ouverts et sur substrats fins (sablières, terrils, ...).
Hyménoptères: Colletes cunicularius, Andrena vaga et Sphecodes albilabris, les trois espèces d'abeilles solitaires emblématiques des sablières, ont été notées au printemps 2008 (GILLIAUX, 2009).
L'histoire des carrières de la région d'Ecaussinnes est abordée avec moult détails par BAGUET (1985) dans un gros mémoire publié par le Cercle Archéologique du Canton de Soignies.
Les plus anciennes traces écrites évoquant l'exploitation de la pierre à Ecaussinnes remontent au 14ème siècle. A cette époque, l'exploitation se faisait de manière artisanale par les paysans propriétaires des terrains, principalement grâce à la force chevaline. Au 19ème siècle, l'arrivée de la force vapeur facilita fortement cette exploitation et permit un essor considérable de l'activité extractrice, désormais industrielle. Le raccordement des carrières à la toute nouvelle ligne de chemin de fer Manage–Braine-le-Comte eu ainsi lieu dès 1842. Cette époque voit également l'arrivée dans la région de nombreux ouvriers carriers italiens originaires de Toscane.
Au hameau de Restaumont, plusieurs petites carrières privées étaient exploitées:
- la carrière Blondeau, la plus ancienne, ouvrit en 1837 le long du chemin Mignault; en 1920, elle sera cédée à la S.A. Carrière de Restaumont.
- à l'ouest de celle-ci apparut la carrière Druart, en 1854; elle deviendra la carrière Michaux & Blase, puis la carrière Riez en 1896, date à laquelle elle fut raccordée à la gare d'Ecaussinnes-Carrières; elle est rattachée deux ans plus tard aux Carrières de Restaumont.
- plus au sud, la carrière du Parc commence à être exploitée en 1869; elle deviendra par la suite carrière J. Lenoir et Cie et carrière de Thiarmont.
- à l'est du chemin Mignault, se trouvait la carrière Goffart.
Après plus d'un siècle de prospérité, la forte concurrence et l'épuisement du banc de pierre bleue provoquèrent le déclin des carrières de Restaumont et leur fermeture en 1982.
En 1983, les terrains et le matériel furent vendus à la société carolorégienne Nocarcentre, qui fut à son tour rachetée par un groupe hollandais trois ans plus tard. L'exploitation ne reprit qu'en 1987, et ce n'était plus des blocs de pierre bleue, mais des concassés pour ballast de chemin de fer, fondations de route et constituant du béton qui y furent extraits. Les carrières Riez, du Parc et Blondeau furent comblées avec les stériles de cette nouvelle carrière, tandis que la carrière Goffart fut inondée.
En 2001, un tir de mine entraina la mise à jour d'une source importante si bien qu'il fallut pomper jusqu'à 1000 m3 d'eau par heure jusqu'à la fin de l'exploitation, afin d'éviter l'inondation de la carrière.
L'entente entre l'entreprise Nocarcentre et les riverains fut toujours difficile car le concasseur, situé dans le fond, était très bruyant; les tirs de mine faisaient trembler les maisons et la rupture des digues d'un bassin de décantation en 2001 provoqua l'inondation des jardins avoisinants. La fermeture définitive de la carrière date du 21 décembre 2004.
En 2012, suite à une convention signée le 8 février entre le Groupement d'Intérêt Economique "Valorisation de l'eau d'exhaure des carrières de Soignies et d'Ecaussinnes" et le Service Public de Wallonie, une réserve naturelle domaniale est créée sur la majeure partie du site (57,3 ha), portant le nom de «carrière de Restaumont».