Le site considéré ici s'étend sur le territoire de la commune de Nassogne, au sud-ouest du village de Grune, de part et d'autre de la rue du Laveu. Le périmètre englobe les lieux-dits Spinet, Basse Cormont, Laid Vivier, Thier à la Croix, Au Laveu, Champ Colette, Divai et Pré Morai, et recouvre la partie aval de la vallée du Ri d'Eure et de ses affluents le Ruisseau de la Prévôté et le Ruisseau du Pré Morai.
Affluent de la Wassoie rattaché au sous-bassin de la Wamme et au bassin de la Lesse, le Ri d'Eure et ses affluents sont des cours d'eau de 3ème catégorie présentant les caractéristiques des eaux salmonicoles. Ils font partie de la zone piscicole protégée dite de « La Lesse et ses affluents, à l'exception du Biran et du Serpont, de leurs sources jusqu'au confluent avec la Meuse, à Dinant ». Ces ruisseaux naissent vers 450 m d'altitude dans le Bosteubois, au sein du Bois de Grune qui fait partie du vaste massif forestier s'étendant jusque Saint-Hubert et Champlon.
Localisé sur les contreforts de l'Ardenne, à environ 2 km de la limite avec Famenne, le site repose principalement sur des grès et schistes du Dévonien donnant des sols de type limono-caillouteux à charge schisteuse et à drainage naturel principalement favorable en ce qui concerne les zones cultivées, et des sols limoneux peu caillouteux à drainage naturel modéré à assez pauvre le long des ruisseaux. La région est caractérisée par un relief collinéen dont l'altitude varie de 360 à 290 m.
Du point de vue biogéographique, le site appartient à la Région continentale et au district phytogéographique ardennais.
Le périmètre concerné ici englobe la vallée du Ri d'Eure et ses deux affluents le Ruisseau de la Prévôté et le Ruisseau du Pré Morai, depuis la lisière du Bois de Grune (intégré au vaste massif forestier qui s'étend jusque Saint-Hubert) jusqu'à la confluence de la Wassoie, au pied du Thier des Renards. Il se compose surtout de prairies, de bosquets et de linéaires arborés de part et d'autre de la rue du Laveu, mais devient nettement plus forestier dans la partie basse.
Située hors Natura 2000 (le site le plus proche, le BE34029 "Haute Wamme et Masblette", s'arrête à la lisière du Bois de Grune), cette zone reste peu documentée sur le plan biologique et n'est que succinctement décrite dans le rapport final du Plan Communal de Développement de la Nature (PCDN) de Nassogne (BAILLY & MELIN, 2015), lequel identifie trois sites principaux dénommés « Au Laveû » (Gru2), « Basse Cormont, Thier à la Croix » (Gru3) et « Laid Vivier » (Gru4). On y observe:
- dans la réserve éducative L.R.B.P.O. « Au Laveû », ensemble d'aulnaies, de mégaphorbiaies et de mares creusées, avec la reine des prés (Filipendula ulmaria), le crépis des marais (Crepis paludosa), l'iris jaune (Iris pseudacorus), la laîche pendante (Carex pendula), ...
- dans la zone de « Basse Cormont et Thier de la Croix » : ensemble de forêts feuillues dont des aulnaies, quelques plantations de résineux et des éléments de mégaphorbiaies. On y observe la reine des prés (Filipendula ulmaria), le scirpe des bois (Scirpus sylvaticus), la lysimaque commune (Lysimachia vulgaris), l'angélique des bois (Angelica sylvestris), le lotier des fanges (Lotus pedunculatus), etc.
- dans le refuge naturel L.R.B.P.O. du « Laid Vivier » : haies, prairie et verger planté, avec aussi une mare creusée dans la partie basse ; présence notamment du lotier des fanges (Lotus pedunculatus) et développement important de la centaurée jacée (Centaurea jacea).
Une visite de terrain le 21 septembre 2019 (obs. J.-Y. Baugnée, M. George et al.) a permis de réunir des informations sur les habitats en place et diverses observations d'ordre biologique pour la partie aval du Ruisseau de la Prévôté jusqu'à sa confluence avec le Ri d'Eure. A cette occasion, les habitats suivants ont été identifiés:
- la frênaie-aulnaie des ruisselets et des sources, un type de forêt assez répandu en Région wallonne mais couvrant généralement des surfaces très limitées et se présentant le plus souvent comme un cordon linéaire le long des petits cours d'eau. Cet habitat est bien développé le long du Ruisseau de la Prévôté (où il est cependant dégradé par le piétinement et le pâturage du bétail) et dans la basse vallée du Ri d'Eure. L'aulne glutineux (Alnus glutinosa) est l'arbre dominant, en mélange avec le frêne commun (Fraxinus excelsior) et plus localement le bouleau verruqueux (Betula pendula) ainsi que quelques saules (Salix spp.). On y observe en outre le noisetier (Corylus avellana), l'aubépine à deux styles (Crataegus laevigata), le pâturin des bois (Poa nemoralis), la viorne obier (Viburnum opulus), la patience des bois (Rumex sanguineus), le dryoptéris dilaté (Dryopteris dilatata), la cardamine amère (Cardamine amara), l'herbe à Robert (Geranium robertianum), la laîche espacée (Carex remota), la laîche pendante (Carex pendula), le lierre terrestre (Glechoma hederacea), le séneçon de Fuchs (Senecio ovatus), la fougère femelle (Athyrium filix-femina), la benoîte commune (Geum urbanum), la reine des prés (Filipendula ulmaria), la moehringie à trois nervures (Moehringia trinervia), etc.
- le cours d'eau rapide de la zone salmonicole: habitat apparemment en bon état en ce qui concerne le Ri d'Eure mais assez dégradé dans la partie aval du Ruisseau de la Prévôté (enrochements, piétinement par le bétail) lequel était d'ailleurs quasiment à sec lors de la visite, avec seulement quelques poches d'eau subsistant ici et là. Aucune plante aquatique n'a été détectée. Sur les grèves exondées poussent entre autres le poivre d'eau (Persicaria hydropiper), la renoncule rampante (Ranunculus repens) et quelques touffes de glycéries (Glyceria sp.). En bordure de prairie défoncée par le bétail on observe aussi quelques peuplements de véronique des ruisseaux (Veronica beccabunga).
- la mégaphorbiaie rivulaire: communauté de hautes herbes colonisant les berges des petits cours d'eau non ou occasionnellement soumises aux inondations. Cet habitat était sans doute plus largement présent sur le site auparavant, mais il ne subsiste plus que sous forme de fragments. Il regroupe diverses espèces comme la baldingère (Phalaris arundinacea), le scirpe des bois (Scirpus sylvaticus), la scutellaire toque (Scutellaria galericulata), la reine des prés (Filipendula ulmaria), l'ortie dioïque (Urtica dioica), l'angélique des bois (Angelica sylvestris), le lycope (Lycopus europaeus), la valériane officinale (Valeriana officinalis), etc.
- la végétation enracinée flottante des eaux mésotrophes: ce groupement a été noté uniquement dans le petit plan d'eau du refuge naturel du Laid Vivier sous la forme d'un herbier aquatique à potamot nageant (Potamogeton natans).
- la prairie de fauche de basse altitude peu à moyennement fertilisée: cette formation n'a été reconnue qu'au sein du refuge naturel du Laid Vivier et apparaît dans différents faciès d'abandon. La flore comporte notamment le fromental (Arrhenatherum elatius), la centaurée jacée (Centaurea jacea), la berce commune (Heracleum sphondylium), la gesse des prés (Lathyrus pratensis), la knautie des champs (Knautia arvensis), etc. Ce type de prairie compte parmi les biotopes semi-naturels les plus menacés en Région wallonne. Elles disparaissent à grands pas du paysage agricole actuel et leur flore se banalise de plus en plus en raison de leur fertilisation (engrais et dépôts atmosphériques azotés).
Une description détaillée des différents groupements végétaux présents dans le périmètre du site reste à réaliser.
Sur le plan faunistique, cette zone accueille diverses espèces patrimoniales et notamment:
- parmi les oiseaux: la pie-grièche grise (Lanius excubitor), notée à plusieurs reprises sur le site du Laid Vivier e.a. de septembre à novembre 2012, en juillet 2013 et en décembre 2015; le busard Saint-Martin (Circus cyaneus), rapace nicheur très rare en Région wallonne observé surtout durant les migrations et en hiver et régulièrement noté en chasse au-dessus du versant cultivé (jusque 3 individus ensemble en février 2015); le milan royal (Milvus milvus), rapace nicheur rare en Région wallonne, il est régulièrement noté sur le secteur tout au long de l'année; le grand corbeau (Corvus corax) : rare mais assez répandu dans le sud de la Wallonie, de présence très régulière sur le secteur; le tarier des prés (Saxicola rubetra), l'un des passereaux les plus menacés de la Région wallonne, probablement non nicheur dans la zone mais noté fréquemment en halte migratoire (jusque 5 ex. ensemble, en septembre 2014).
- parmi les poissons: le chabot (Cottus gobio s.l.) et la petite lamproie (Lampetra planeri) apparemment bien présente sur le bassin du Ri d'Eure.
- chez les amphibiens: au minimum la grenouille rousse (Rana temporaria), le triton alpestre (Ichthyosaura alpestris) et le triton palmé (Lissotriton helveticus).
- parmi les insectes: le carabe à reflets d'or (Carabus auronitens), noté en plusieurs endroits de l'aulnaie rivulaire; le rhynchite des fruits (Rhynchites bacchus) obtenu au battage d'un pommier dans le site du Laid Vivier; le dytique des ruisseaux (Agabus guttatus) par dizaines de spécimens réfugiés sous les pierres dans le lit asséché du Ruisseau de la Prévôté, en compagnie du Trichoptère Halesus radiatus; le Plécoptère Leuctridae Leuctra digitata, dont un mâle a été capturé en bordure du ruisseau de la Prévôté, en lisière du site du Laid Vivier, l'espèce, particulièrement rare en Europe occidentale, n'étant connue que de cinq localités belges toutes situées en Haute Ardenne (Hockai, Butgenbach, Grand-Halleux, Robertville et Bullange) (K. Lock, in litt.)!