Le site considéré dans cette fiche (suite à la fusion du SGIB 365 "Frayère du Petit Gravier") s'étend en rive gauche de la Meuse juste au nord du village de Lanaye, à environ 20 km en aval de la ville de Liège. A cet endroit, la Meuse marque la frontière entre le territoire belge et celui des Pays-Bas, à hauteur du plan d'eau d'Oostmaarland, un peu en amont de Maastricht. Le fleuve atteint ici une largeur d'environ 130 m et n'est séparé du canal Albert que par une langue de terre de maximum 330 m de large. L'altitude est comprise entre 50 et 70 m.
A l'origine, la Meuse circule librement au fond de sa vallée, dans l'axe général sud-nord, et est parsemée d'iles et de bancs de galets. La plupart des villages actuels étaient déjà bien développés au 18ème siècle et reliés par des chemins ruraux.
A partir du milieu du 19ème siècle, en lien avec le fort développement du bassin industriel liégeois, la vallée de la basse Meuse subi de profondes modifications suite aux travaux hydrauliques successifs destinés à améliorer constamment la circulation fluviale des marchandises. Le premier ouvrage majeur fut le creusement à l'ouest de la Meuse du canal Liège-Maastricht, ouvert en 1850, et censé assuré une liaison plus sûre avec les ports d'Anvers et de Rotterdam via Den Bosch. En 1939, est inauguré un nouveau canal, le canal Albert, qui remplace le canal de Maastricht au niveau de la double écluse de Lanaye, portée alors à 600 tonnes. Le creusement du canal Albert, qui assure une jonction plus directe et rapide avec le port d'Anvers, a entamé le massif crayeux de la Montagne Saint-Pierre en créant la tranchée - ou percée - de Caster. A partir de 1960, d'importants travaux de génie civil sont menés par le M.E.T. en vue de rectifier le cours de la Meuse et d'augmenter les capacités de l'écluse de Lanaye par la construction d'une troisième écluse à 2000 tonnes. C'est de cette époque que date la création de la "Vieille Meuse" et de la presqu'ile du Petit Gravier.
Trois décennies plus tard, l'implantation d'un quatrième sas sur le complexe existant est entreprise pour répondre au déploiement économique de la région. Ces travaux ont entrainé la destruction d'une partie de la Vieille Meuse et à titre compensatoire, une nouvelle gravière est aménagée un peu en amont, à partir de 1985, afin de recréer un milieu de substitution pour la flore et la faune. L'historique et les différents aspects biologiques de ces aménagements et de leur évolution ont été détaillés dans deux études successives de KEULEN et al. (1994) et KEULEN et al. (1996).
Les derniers travaux en date qui ont encore impacté un peu plus le site et ses environs ont consisté en l'aménagement d'une 4ème écluse à partir de 2011, avec une mise en service en 2015, autorisant désormais le passage de bateaux de 9.000 tonnes et permettant ainsi une forte augmentation du trafic entre le bassin liégeois et Rotterdam. Ces travaux d'envergure ayant coûté plus de 65 millions d'euros ont touché essentiellement la langue de terre séparant le canal Albert et la Meuse, soit toute la bordure ouest du site considéré ici.
La physionomie actuelle du site peut être schématisée de la façon suivante:
- juste au nord de Lanaye, dans le prolongement de la rue Maison Blanche, la "nouvelle gravière" a été aménagée en 1986: elle se présente comme une anse de 450 m de long sur 100 m de large, pourvue d'un ilot central d'une quinzaine d'ares, et séparée de la Meuse par une presqu'île en triangle allongé qui se prolonge par une étroite digue de galets de 190 m de long sur 16 m de large. Le plan d'eau est connecté à la Meuse à son extrémité nord (aval) par un chenal d'une cinquantaine de m. En outre, en 2016, un diverticule latéral a été creusé au nord de l'anse sur un peu plus de 200 m de long, entre la saulaie du Petit Gravier et les remblais consécutifs à la construction de la nouvelle écluse.
- à peine 200 m plus au nord, commence la "Vieille Meuse" et la presqu'ile du Petit Gravier. Par rapport aux années 1990-2000, le plan d'eau, vestige de l'ancien méandre de la Meuse avant sa rectification, a été amputé de la moitié de sa superficie par les travaux d'agrandissement de l'écluse de Lanaye débutés en 2011. Son allure actuelle est plutôt celle d'un bras-mort allongé dans l'axe sud-nord sur près de 535 m pour une largeur moyenne de 70 m, avec un chenal tourné vers la Meuse à son extrémité aval. La rive ouest est maintenant en grande partie rectiligne et limitée par un mur bétonné qui sépare la Vieille Meuse du canal des Pays-Bas. La digue du Petit Gravier, actuellement entièrement boisée, sépare le fleuve de son ancien méandre sur une longueur de 520 m pour une largeur de 55 m; elle n'a pas été impactée directement par les travaux précités.
- entre la nouvelle gravière et la Vieille Meuse se trouve une butte boisée occupée par une saulaie âgée, dite saulaie du Petit Gravier.
Du point de vue géologique, le site repose sur des alluvions modernes des vallées mais les sols actuellement en place sont principalement d'origine artificielle (remblais).
Le site se situe dans le district phytogéographique fluviatile, entre les districts brabançon (à l'ouest) et mosan (à l'est de la Meuse).
La vallée de la basse Meuse liégeoise a subi de profondes modifications au cours du 19ème et surtout 20ème siècles. Dès 1960, les travaux de génie civil consistant notamment en la rectification du cours du fleuve et la construction d'une troisième puis quatrième écluses ont complètement bouleversé la géographie de la région de Lanaye. C'est de cette époque que date la création de la "Vieille Meuse" et de la presqu'ile du Petit Gravier. En outre, pour compenser la destruction d'une ancienne gravière abritant une frayère à poissons, une nouvelle frayère a été aménagée durant les années 1990. L'historique et les différents aspects biologiques de ces aménagements et de leur évolution ont été détaillés dans deux études successives de KEULEN et al. (1994) et KEULEN et al. (1996).
Au début des années 1990, la nouvelle frayère de Lanaye présentait un caractère ouvert avec une végétation globalement pionnière et très dynamique.
Les berges, en pente assez raides, ont été plantées de diverses essences ligneuses, telles que Salix cinerea, S. caprea, S. alba, S. viminalis, Alnus glutinosa, Cornus sanguinea,...
Au sol, se développe une végétation herbacée rassemblant des éléments des friches nitrophiles, des mégaphorbiaies des bords des eaux, des vases exondées, des roseliéres. On observe:
- un Bidention fragmentaire à Persicaria lapathifolia, P. mite, Bidens frondosa, Atriplex prostrata;
- une mégaphorbiaie à Lycopus europaeus, Tanacetum vulgare, Phalaris arundinacea, Lythrum salicaria, Stachys palustris, Aegopodium podagraria, Eupatorium cannabinum, Epilobium hirsutum, Angelica sylvestris, Solanum dulcamara, Symphytum officinale, heracleum sphondylium, Impatiens glandulifera, Urtica dioica, Cuscuta europaea, Artemisia vulgaris,...;
- une roselière amphibie à Rorippa amphibia;
- une roselière à Rumex hydrolapathum;
En contrehaut du site se trouvent de petites mares envahies par Typha latifolia, Agrostis stolonifera et une espèce très rare dans la région, Rumex palustris.
Le long du chemin poussent Senecio inaequidens et Sisymbrium austriacum subsp. chrysanthum.
Il serait intéressant de décrire la végétation actuelle et son évolution, 25 ans après la création de cette frayère.
Une observation floristique remarquable y a été réalisée en juillet 2012, à savoir la découverte assez inattendue du rare oeillet couché (Dianthus deltoides) sur la langue de terre qui sépare la frayère de la Meuse (obs. S. Raymaekers). L'indigénat de cette station, située en dehors de l'aire connue actuellement en Wallonie, reste à établir.
Le site présente un grand intérêt ornithologique. De nombreux oiseaux d'eau, dont plusieurs espèces de canards, y sont régulièrement notés. Le foulque macroule (Fulica atra), le grêbe huppé (Podiceps cristatus) et le grêbe castagneux (Tachybaptus ruficollis) y sont signalés comme nicheurs. Des visiteurs plus rares sont le harle piette (Mergellus albellus) hivernant régulier avec jusqu'à 8 ex. en 2011, le garrot à oeil d'or (Bucephala clangula) également hivernant régulier, l'huitrier pie (Haematopus ostralegus) nicheur dans le site voisin d'Oostmaarland, la grande aigrette (Ardea alba) ou plus occasionnellement le rare bihoreau gris (Nycticorax nycticorax).
La rare rémiz penduline (Remiz pendulinus), espèce orientale en limite d'aire en Région wallonne, a niché à plusieurs reprises sur le site au cours des années 1990 (KEULEN, 1996). Depuis cette époque, il ne semble plus y a voir eu d'indice de reproduction locale.