Conservation du caractère des paysages fagnards, de leurs habitats, de leurs biocénoses, de leur flore et de leur faune, d'une manière qui soit compatible avec la dynamique naturelle du tapis végétal et la circulation croissante des visiteur.
'La principale menace est la régression de la partie active de la tourbière. La menace d'incendies en cas de sécheresse printanières ou durables en été existe; toutefois, les mesures prises se sont révélées efficaces.
L'interprétation de photos aériennes sur 654ha des Fagnes de l'Est entre et 1988 a donné les résultats suivants (SCHUMACkER, 1969) :
1. Une extension de la molinie dans la frange extérieure des tourbières actives, contigües à des fosses ou des tranches d'exploitation ou encore l'existence de fossés de drainage; c'est sans doute les sécheresses des dernières décennies qui ont favorisé la minéralisation de la couche de tourbe superficielle et dès lors l'installation de cette graminée. C'est peut-être aussi
la cause de l'extension du Narthecium dans les tourbières actives (Misten et Fagne Wallonne). Les processus seraient sans doute réversibles si l'humidité du climat redevenait plus régulière. Ceci confirme la sensibilité des tourbières actives, mais la possibilité d'une récupération. De fait, certaines tourbières allemandes ont connu des phases à molinie au cours de leur croissance et celles des Hautes Fagnes ont d'ailleurs connu un arrêt et un embruyèrement au Subboréal, ce qui ne les a pas empêché de reprendre ultérieurement leur croissance.
2. Une extension notable des faciès à molinie dans les landes tourbeuses, de 75 à 286ha, qui procèdent des mêmes causes ou des incendies.
3. Une extension des fougeraies à Pteridium aquilinum dans les landes sèches, de 7 à 12ha, peut-être due à l'incursion des feux.
4. Dans les landes tourbeuses incendiées en 1947, régression notable du faciès du Polytricho-Salicetum, de 385 à 2,5ha au profit du bouleau (de 14 à 30ha). Dans les portions de landes brûlées, la recolonisation par le bouleau est passée de 0 à 17ha. Cette tendance au reboisement des landes est accélérée par les incendies; par contre les colonies de ligneux (bouleau, sorbier, pin, épicéa) sont éparses surtout dans les landes tourbeuses, plus dynamiques dans les landes sèches, mais visiblement le voisinage de peuplements ou d'arbres semenciers est déterminant : épicéas, pins, alignements de sorbiers plantés le long des routes.
Par contre, les anciens usages, par exemple le fauchage des 'prairies' à molinie et Gentiana pneumonanthe ou le pâturage des nardaies par les moutons ont fait régresser les espèces qui les caractérisaient. Le fauchage des bruyères pour la litière d'étable (improprement désignée comme 'étrepage', qui ne concerne que les landes sablonneuses de Campine), l'essartage en vue d'une culture d'un an ou de deux (sites à genêts à balais ou à fougère-aigle). Vouloir recréer et perpétuer sur des grandes surfaces, au profit de ces faciès de flore et de faune devrait de toute façon être précédé par des expériences sur de petites surfaces expérimentales pour en tester la faisabilité.
Ces fagnes sont soumises à une recolonisation arbustive spontanée très intense et avancée. En outre, la fermeture progressive des mares des palses hypothèque à moyen terme l'avenir des populations d'Odonates les plus rares et remarquables. On dispose, par contre, de très peu d'informations récentes sur la situation actuelle des populations de Rhopalocères spécialisés dans ces fagnes (d'après Goffart, Mars 1999: Rapport ISB).'
D'après Goffart (mars 1999: Rapport ISB): Il serait opportun d'envisager le rajeunissement de certains palses en y recréant des mares, soit manuellement, soit au moyen d'engins chenillés, soit en obstruant les exutoires (d'origine anthropique) des murailles, soit encore à l'aide d'explosifs. Ce rajeunissement pourra être entrepris selon un rythme périodique long (dizaines d'années), en rotation sur plusieurs palses. Une telle gestion ne doit en aucun cas concerner tous les palses et bon nombre de ceux-ci (50%?), choisis sur base d'un inventaire préalable, seront laissés à leur évolution naturelle. La coupe des ligneux (notamment épicéas subspontanés, bouleaux et saules) apparaît urgente sur ces sites. Certaines des mesures proposées ci-dessus vont à l'encontre des options définies dans le plan des gestion des réserves des Hautes-Fagnes: il serait souhaitable cependant de ne pas les écarter sans les avoir étudiées attentivement. Le suivi des populations d'Odonates remarquables et la recherche de colonies de reproduction des papillons spécialisés colonisant ces sites sont par ailleurs recommandés. La conservation du paysage et des biocénoses doit prendre en compte la dynamique naturelle des végétations et des tendances du climat qui peuvent les infléchir, en particulier les sécheresses des dernières décennies.