Cette vaste zone bocagère, traversée au sud et à l'ouest par la Semois et à l'est par le ruisseau des Prés Thibaut, regroupe une mosaïque complexe de pâtures, de prairies de fauche, de prés humides, de petites parcelles cultivées, de bosquets, d'aulnaies et de saulaies marécageuses, de haies, de mares, roselières frangeantes et autres fonds humides, le tout inscrit dans un paysage globalement peu altéré par les infrastructures et activités humaines.
Flore et végétation
La cartographie des habitats du périmètre inscrit dans le site Natura 2000 BE34050 (Bassin de la Semois entre Tintigny et Jamoigne) a été réalisée selon la typologie Waleunis sur base de relevés de terrain datant de 2008 essentiellement (S. Pierret et P. Verté - DEMNA).
Pour les parcelles incluses dans la réserve naturelle de Breuvanne, les données ont été synthétisées dans les dossiers de demande d'agrément des RNOB (ANONYME, 1989 et 1992). Très schématiquement, on y observe:
- des prés mésophiles très fleuris avec notamment Lychnis flos-cuculi, Centaurea jacea, Myosotis scorpioides, Rhinanthus minor, Ranunculus acris, Cardamine pratensis, Leucanthemum vulgare, Briza media, etc.;
- des prairies humides à Persicaria bistorta, Ranunculus flammula, Dactylorhiza majalis, Mentha aquatica, Galium palustre, Carex div. sp., Succisa pratensis, Juncus acutiflorus, Juncus effusus, Valeriana dioica, Caltha palustris, ...;
- des mégaphorbiaies abandonnées à Lysimachia vulgaris, Epilobium hirsutum, Angelica sylvestris, Iris pseudacorus, Filipendula ulmaria, ...;
- d'anciens méandres isolés de la Semois, colonisés par Oenanthe aquatica, Hottonia palustris, Scutellaria galericulata, Rumex hydrolapathum, Equisetum fluviatile, etc. ;
- un réseau important de haies mélangées.
La Semois coule ici essentiellement en situation ouverte, au milieu des prairies, mais certaines portions de rives sont en contact avec des boisements feuillus, plantations d'épicéas et de peupliers. C'est le cas en rive gauche au nord de Breuvanne, du versant gauche du méandre de la ferme de Ménil, et de la rive droite au pont Charrau.
Dans ses eaux prospèrent des herbiers de Nuphar lutea, Ranunculus fluitans, Potamogeton perfoliatus, Potamogeton crispus, Potamogeton pectinatus, Elodea nuttallii, etc.
Ses berges sont colonisées par divers ligneux (Salix alba, S. viminalis, Alnus glutinosa, e.a.) qui forme une ripisylve linéaire par endroits. La végétation herbacée se compose de Phalaris arundinacea, Lythrum salicaria, Sagittaria sagittifolia, Achillea ptarmica, Sambucus ebulus, Alisma plantago-aquatica, Iris pseudacorus, Filipendula ulmaria, Sparganium erectum, Solidago canadensis, Sinapis arvensis, etc.
Le site comporte également deux bras-mort qui ont fait auparavant l'objet d'une fiche distincte: le bras-mort de Termes, en rive droite de la Semois, et le bras-mort du Gué des Oies en rive gauche, 500 m plus en aval. La flore inventoriée en 1993 par D. Thoen (FUL) compte un mélange de plantes aquatiques et amphibies ainsi que de nombreuses espèces hygrophiles des roselières et des prairies humides.
- bras-mort de Termes: un relevé de juin 1993 regroupe Callitriche platycarpa, Ranunculus peltatus, Carex acuta, Carex vesicaria, Rumex hydrolapathum, Mentha aquatica, Alnus glutinosa, Lemna trisulca, Lemna minor, Persicaria lapathifolia, Valeriana officinalis, Juncus effusus, Phalaris arundinacea, Hottonia palustris, Glyceria maxima, Stellaria alsine, Veronica beccabunga, Oenanthe aquatica, Filipendula ulmaria, Galium palustre s.l., Glyceria fluitans, Elodea canadensis, Lychnis flos-cuculi, Myosotis scorpioides, Stellaria palustris, Scirpus sylvaticus, Alisma plantago-aquatica, Caltha palustris, Epilobium hirsutum, Carex hirta, Persicaria bistorta, Equisetum fluviatile, Bidens cernua, ...
- bras-mort du Gué des Oies: le relevé du 8 avril 1993 compte notamment Lysimachia nummularia, Myosotis laxa subsp. cespitosa, Myosotis scorpioides, Callitriche hamulata, Carex vesicaria, Hottonia palustris, Rumex hydrolapathum, Oenanthe aquatica, Ranunculus peltatus, Sparganium emersum, Ranunculus repens, Rorippa amphibia, Ranunculus flammula, Spirodela polyrhiza, Glyceria maxima, Equisetum fluviatile, Alisma plantago-aquatica, Iris pseudacorus, Alopecurus geniculatus, ...
Cette végétation particulièrement intéressante s'est maintenue jusqu'à ce jour et les espèces les plus remarquables (hottonie et oenanthe, e.a.) sont toujours bien présentes.
Intérêt faunistique
Avec au moins 175 espèces d'oiseaux notées au cours des dernières années, ce secteur de la vallée de la Semois s'inscrit clairement parmi les sites les plus intéressants de la Lorraine du point de vue ornithologique.
L'avifaune nicheuse locale compte le grèbe castagneux (Tachybaptus ruficollis), le canard colvert (Anas platyrhynchos), la gallinule poule-d'eau (Gallinula chloropus), le foulque macroule (Fulica atra), le martin-pêcheur d'Europe (Alcedo atthis), le pic épeichette (Dendrocopos minor), le faucon crécerelle (Falco tinnunculus), le faucon hobereau (Falco subbuteo), le loriot d'Europe (Oriolus oriolus), le corbeau freux (Corvus frugilegus), la mésange boréale (Poecile montanus), le pouillot fitis (Phylloscopus trochilus), l'hirondelle de rivage (Riparia riparia), la rousserolle verderolle (Acrocephalus palustris), la locustelle tachetée (Locustella naevia), la fauvette babillarde (Sylvia curruca), la pie-grièche écorcheur (Lanius collurio), le gobemouche gris (Muscicapa striata), le rougequeue à front blanc (Phoenicurus phoenicurus), le tarier pâtre (Saxicola rubicola), le pipit farlouse (Anthus pratensis), le bruant des roseaux (Emberiza schoeniclus), le moineau friquet (Passer montanus), ...
De grandes espèces emblématiques, telles la cigogne noire (Ciconia nigra), la cigogne blanche (Ciconia ciconia), le balbuzard pêcheur (Pandion haliaetus), le milan royal (Milvus milvus), le milan noir (Milvus migrans), le grand corbeau (Corvus corax), le faucon pèlerin (Falco peregrinus), le héron cendré (Ardea cinerea) ou encore la grande aigrette (Ardea alba), exploitent très souvent la zone comme terrain de chasse, les deux dernières étant présentes toute l'année.
En période hivernale et migratoire, les oiseaux d'eau font couramment escale dans la vallée, voire y séjournent un certain temps. C'est le cas de troupes de plusieurs dizaines de sarcelles d'hiver (Anas crecca) et de groupes plus modestes de sarcelle d'été (Anas querquedula), canard colvert (Anas platyrhynchos), canard souchet (Anas clypeata), canard chipeau (Anas strepera), canard siffleur (Anas penelope), canard pilet (Anas acuta), harle bièvre (Mergus merganser), fuligule milouin (Aythya ferina), grand cormoran (Phalacrocorax carbo), etc.
D'autres oiseaux paludicoles sont régulièrement notés comme le râle d'eau (Rallus aquaticus), le vanneau huppé (Vanellus vanellus), la bécassine des marais (Gallinago gallinago), le chevalier cul-blanc (Tringa ochropus), le chevalier sylvain (Tringa glareola), le chevalier guignette (Actitis hypoleucos), le chevalier gambette (Tringa totanus), le chevalier aboyeur (Tringa nebularia), etc. D'autres s'y arrêtent plus rarement, entre autres le pluvier doré (Pluvialis apricaria), le grand gravelot (Charadrius hiaticula), le petit gravelot (Charadrius dubius), le courlis cendré (Numenius arquata), la barge à queue noire (Limosa limosa), le combattant varié (Calidris pugnax), le bécasseau variable (Calidris alpina), la bécassine sourde (Lymnocryptes minimus), l'aigrette garzette (Egretta garzetta), le héron pourpré (Ardea purpurea), etc.
La pie-gièche grise (Lanius excubitor), espèce fortement menacée en Région wallonne, ne niche plus localement mais l'un ou l'autre individu trouve encore ici une zone d'hivernage favorable.
Depuis les années 2000, des groupes de grues cendrées (Grus grus) s'y reposent régulièrement mais au cours de l'hiver 2021-2022, c'est une troupe de 650 grues qui a accomplit le premier hivernage complet de l'espèce en Belgique (WEISERBS et al., 2021).
Enfin parmi les raretés récentes, citons encore l'observation d'un élanion blanc (Elanus caeruleus) fin mars 2021, de deux pygargues à queue blanche (Haliaeetus albicilla) respectivement en 2018 et 2021, le séjour d'une pie-grièche à tête rousse (Lanius senator) en juillet 2022, ou encore une rousserolle turdoïde (Acrocephalus arundinaceus) en halte à la mi-août 2022.
Le peuplement entomologique est certainement très riche mais, comme souvent, les données manquent largement, sauf pour quelques groupes populaires comme les papillons de jour et les libellules.
Parmi les papillons diurnes, citons entre autres le cuivré des marais (Lycaena dispar), espèce emblématique de la Lorraine, le demi-deuil (Melanargia galathea), l'échiquier (Carterocephalus palaemon), le thècla du prunier (Satyrium pruni), le gazé (Aporia crataegi), etc.
Pour les libellules, près de 20 espèces ont été signalées jusqu'ici, dont le caloptéryx éclatant (Calopteryx splendens), le gomphe à pinces (Onychogomphus forcipatus), l'anax napolitain (Anax parthenope), l'aeschne printanière (Brachytron pratense), l'orthétrum bleuissant (Orthetrum coerulescens), l'agrion gracieux (Coenagrion pulchellum).
La faune orthoptérologique compte notamment la sauterelle cymbalière (Tettigonia cantans), le criquet vert-échine (Chorthippus dorsatus), le criquet marginé (Chorthippus albomarginatus), le gomphocère roux (Gomphocerippus rufus), le conocéphale des roseaux (Conocephalus dorsalis) et le criquet ensanglanté (Stethophyma grossum).
Toujours en ce qui concerne l'entomofaune, citons encore des observations récentes de la coccinelle à 13 points (Hippodamia tredecimpunctata), une espèce protégée liée aux zones humides, ainsi que deux bourdons également protégés par la législation régionale, à savoir le bourdon grisé (Bombus sylvarum) et son parasite le bourdon vétéran (Bombus veteranus).