Heyoule fait partie du complexe de la Montagne Saint-Pierre. Le site est inséré dans le versant occidental de la terrasse principale de la Meuse, dite 'terrasse campinienne'. Ce versant a été creusé par le Geer au Pleistocène moyen dans les craies organo-détritiques du Maastrichtien (Crétacé supérieur), riche en fossiles. Certaines couches renferment d'importants bancs de silex.
De PETIT et RAMAUT (1978), nous extrayons le passage suivant : 'Le site est constitué principalement de pelouses sèches profondément entaillées par des carrières de silex et de marne dont l'exploitation est actuellement abandonnée. La nature du sol (marne, tuffeau, silex appartenant au Crétacé supérieur), la configuration topographique (exposition sud de la plus grande partie du terrain, à l'abri des vents froids) font bénéficier ce site d'un microclimat exceptionnellement favorable aux espèces thermophiles. En outre, les déblais marneux des anciennes carrières ont été remarquablement recolonisées par une végétation calcicole très variée'.
La réserve naturelle de Heyoule domine des vergers établis sur la rive droite du Geer. D'une superficie d'environ 4 hectares, cette réserve comprend également une carrière souterraine de silex, la carrière de Robin-Thier, d'un développement de 230 mètres de galéries (d'après la fiche RNOB, 1999).
La Montagne Saint-Pierre est considérée, à juste titre, comme une station où vivent des plantes et des animaux à caractère méridional, voir subméditerranéen. Pour ces espèces, la Montagne Saint-Pierre constitue souvent la limite septentrionale de leur aire de répartition. Ces espèces recherchent des habitats chauds et ensolleillés (espèce thermophiles); elles sont adpatées à la sècheresse (espèces xérophiles) et au sol calcaire (espèces calcicoles).
Le site de Heyoule se compose de trois parties appelées par convention (du nord au sud) Heyoule I, pelouse intermédiaire et Heyoule II.
Heyoule I. Ce site se compose :
- d'un replat situé à l'endroit d'un ancien atelier de débitage de silex (épinçage) que l'on a recouvert d'une couche de 50cm de marne. Il était jadis occupé par une friche à Tanacetum vulgare, Rubus sp., en voie de colonisation par les saules (principalement Salix caprea) et par Rosa canina.
Actuellement, il est caractérisé par la présence de nombreux éléments des Molinio-Arrhenatheretea et de l'Arrhenatherion (CORINE 38.2) (Plantago lanceolata, Holcus lanatus, Trifolium pratense, Medicago lupulina, Dactylis glomerata, Arrhenatherum elatius, Festuca pratensis, Picris hieracioides). Rhinanthus minor y est assez abondant (LEJEUNE et VERBEKE, 1984, tableau I, relevés 1A à 5A);
- d'un versant exposé à l'ouest et au nord-ouest colonisé par un inextricable mélange d'espèces relevant de l'Arrhenatherion et du Mesobromion et même du Violion caninae. Lors de la création de la réserve, ce versant était colonisé par Betula pendula, Quercus robur, Crataegus monogyna et Brachypodium pinnatum. Après abattage des arbustes et 5 années de fauchage, le site était occupé déjà en 1984 par une pelouse ouverte, riche en espèces de l'Arrhenatherion (voir plus haut) et du Mesobromion (Avenula pubescens, Lotus corniculatus, Carex flacca, Pimpinella saxifraga, Sanguisorba minor, Brizia media, Rhinanthus minor, Linum catharticum, Bromus erectus,...) et du Violion caninae (Potentilla erecta, Danthonia decumbens,...). Parnassia palustris y a connu un très grand développement (LEJEUNE et VERBEKE, 1984, tableau I, relevés 1B à 9B);
- d'un deuxième replat dominant le site, encore cultivé pendant la dernière guerre, envahi maintenant par Brachypodium pinnatum, Lotus cornicularus, Hypericum dubium, Galium verum, Pimpinella saxifraga, Centaurea gr. jacea, Festuca rubra, Avenula pubescens, Agrostis capillaris, Cuscuta epithymum, Colchicum autumnale, etc.
Pelouse intermédiaire. La pelouse intermédiaire montre aussi des espèces caractéristiques du Mesobromion et de l'Arrhenatherion (LEJEUNE et VERBEKE, 1984, tableau IV).
Heyoule II. Cette partie comprend quelques petits versants à exposition sud-ouest ou sud. Après débroussaillement du site et plusieurs années de fauchage on y trouve une végétation appartenant au Mesobromion erecti (présence de Rhinanthus alectorolophus), enrichie ici aussi d'éléments de l'Arrhenatherion et du Violion caninae (Viola canina, Potentilla erecta, Danthonia decumbens,...). La partie supérieure de Heyoule II est pâturée par des vaches depuis longtemps. Il s'agit d'un pré riche en espèces du Lolio-Cynosurion. Cynoglossum officinale est abondant dans ce site (LEJEUNE et VERBEKE, 1984, tableau III).
LEJEUNE & VERBEKE (2015) ont récemment documenté l'évolution d'une friche à brachypode vers une véritable pelouse calcicole avec le cortège floristique caractéristique. La station correspond à la partie nord du versant surplombant le chemin des Meuniers et repose sur des rejets de stériles d'une carrière en activité durant les années 1960. Avant 1985, une seule espèce, le brachypode penné, dominait au sein de la végétation qui subissait des incendies printaniers. A cette époque, une expérience de pâturage ovin fut mise en place, maintenue jusqu'à présent, consistant à faire pâturer la friche de manière intensive durant deux courtes périodes, généralement au printemps et à l'automne. Cette gestion a entraîné une forte modification de la flore, suivie par la méthode des carrés permanents. En trente ans, le nombre d'espèces a doublé et de nombreuses espèces typiques de la pelouse calcaire ont fait leur apparition, tandis que les peuplements de brachypode penné et de brome dressé (Bromus erectus) s'y trouvèrent progressivement en équilibre.
D'après Ferraris, cultures. A la Montagne Saint-Pierre, le déboisement, commencé déjà au Néolithique, s'étendit surtout à partir du XIe siècle. Le défrichement favorisa l'installation de pelouses calcaires qui furent destinées au pacage par les moutons. De petits troupeaux pâturant de manière extensive persistèrent jusqu'au milieu du XXe siècle. Une race de mouton spécialisée s'y est développée, les 'Mergellandschapen' (utilisés aujourd'hui pour la gestion des pelouses). Le berger entretenait les parcours par brûlis, recépage des arbustes, etc. L'abandon des pratiques agro-pastorales provoqua une extension et une diversification de la flore et aussi l'embroussaillement des pelouses (d'après Saintenoy-Simon, 1994).
La présence humaine à la Montagne Saint-Pierre est attestée avec certitude dès le Paléolithique inférieur.
De nombreuses fouilles témoignent d'une présence humaine, très dense à certaines époques, depuis le Paléolithique jusqu'au XXe siècle. A Eben, un squelette du Néolithique fut découvert. Etudié par l'Université de Liège, il fut établi qu'il appartenait au type de Furfooz II. A peu de distance de cette tombe, les archéologues mirent au jour un cimetière mérovingien. C'est cependant la période romaine qui fournit le plus imortant matériel archéologique. Dans la vallée du Geer, chaque village compte une ou plusieurs villas romaines.
Cette importante densité de peuplement a influencé la diversification des écosystèmes. Ce sont surtout les pratiques agro-pastorales (pacage extensif des versants par les moutons), qui ont permis l'établissement et ensuite le maintien des associations végétales originales : les pelouses calcaires.
De petits troupeaux pâturant de manière extensive persistèrent jusqu'au milieu du XXe siècle. Une race de mouton spécialisée s'y est développée, les 'Mergellandschapen' (utilisés aujourd'hui pour la gestion des pelouses). Le berger entretenait les parcours par brûlis, recépage des arbustes, etc. Si l'abandon des pratiques agro-pastorales provoqua une extension et une diversification de la flore, il fut également responsable de l'embroussaillement des pelouses (d'après la fiche RNOB, 1999).