Le site correspond à d'anciennes prairies de fauche dont l'abandon remonte au début des années 1960, époque à laquelle elles furent plantées de peupliers hybrides. DUVIGNEAUD (1966: pp. 434-436) y a reconnu les groupements suivants:
- une prairie à Glyceria maxima, avec Equisetum fluviatile, Mentha aquatica, Lycopus europaeus, Calystegia sepium, Rumex hydrolapathum, Galium palustre subsp. elongatum, etc.;
- une prairie à Carex riparia avec Eupatorium cannabinum, Persicaria amphibia, Symphytum officinale, Filipendula ulmaria, Angelica sylvestris, Lathyrus pratensis, Stachys palustris, Scutellaria galericulata, Lythrum salicaria, Calystegia sepium, Rubus spp., ...;
- une prairie à Phalaris arundinacea, Equisetum palustre, Solanum dulcamara, Rumex x heterophyllus ainsi que diverses espèces du groupement précédent;
- une prairie à Carex acuta, Scirpus sylvaticus, Lotus pedunculatus, Juncus acutiflorus, etc.;
- une prairie fraîche à Carex disticha;
- une prairie fraîche à Festuca arundinacea, Angelica sylvestris, Cirsium oleraceum, Juncus inflexus, Carex cuprina, etc.
- dans les zones les mieux drainées, une prairie à Arrhenatherum elatius, Leontodon hispidus, Pimpinella major, Hypochaeris radicata, Festuca rubra, Alopecurus pratensis, Centaurea jacea, Convolvulus arvensis, Lotus corniculatus, Dactylis glomerata, Holcus lanatus, Elymus repens, Anthoxanthum odoratum, Phleum pratense, Heracleum sphondylium, Cruciata laevipes, etc.
Dans son article, DUVIGNEAUD mentionne aussi les suintements forestiers situés sur le versant couvert par le Bois de l'Abbaye (ou Bois Jean Banval) et souligne le caractère remarquable de la flore qui comprenait, à l'époque, plusieurs espèces réputées calcicoles.
Même si la description de DUVIGNEAUD concerne vraisemblablement un périmètre plus large que la réserve naturelle domaniale actuellement délimitée, la végétation de la banquette alluviale semble avoir évolué, comme l'atteste un relevé botanique effectué en septembre 2000 par C. DELMARCHE (avis sur site du SPW). Plusieurs espèces prairiales comme Alopecurus pratensis, Festuca rubra, Holcus lanatus, Arrhenatherum elatius, Pimpinella major, Phleum pratense, semblent avoir déserté le secteur mais elles subsistent probablement en d'autres endroits de la rive droite de la Sambre.
L'ensemble du site est aujourd'hui humide, voire même marécageux selon les endroits; la partie centrale est occupée par plusieurs groupements herbacés en mosaïque:
- une cariçaie dense à Carex riparia;
- une roselière sèche à Phragmites australis;
- une roselière à Glyceria maxima;
- une mégaphorbiaie à hautes herbes à Angelica sylvestris, Filipendula ulmaria, Calystegia sepium, Cirsium oleraceum, Cirsium palustre, Eupatorium cannabinum, Galium palustre, Lysimachia nummularia, Phalaris arundinacea, Urtica dioica, Rubus caesius, Rubus idaeus, Stachys sylvatica, Scrophularia umbrosa, Symphytum officinale, Valeriana repens, etc.
La plupart des peupliers plantés dans les années 1960 ou antérieurement, sont morts ou dépérissants.
Des plantes comme Phragmites australis, Carex paniculata ou encore Scrophularia umbrosa ne sont pas mentionnées par DUVIGNEAUD (1966). Il s'agit probablement d'une installation relativement récente. Notons que Carex paniculata n'est présent que sous forme de touradons isolés.
La berge de la Sambre ainsi que la portion sud de la réserve sont à présent colonisées de fourrés de saules (Salix aurita, Salix triandra, Salix viminalis, ...) et d'une aulnaie-ormaie marécageuse à Alnus glutinosa, Ulmus minor, Stellaria nemorum, Chrysosplenium alternifolium, Solanum dulcamara, etc.
En retrait de la berge, une zone dépressionnée inondée l'hiver et détrempée en période estivale accueille des éléments du Calthion comme Caltha palustris, Myosotis scorpioides, Scirpus sylvaticus, ... auxquels se joignent divers hélophytes tels que Carex acuta, Glyceria maxima, Phalaris arundinacea, Rumex x heterophyllus, etc.
En lisière, un ruisselet descendant du Bois Jean Boinval alimente des suintements à Cardamine amara et Chrysosplenium oppositifolium. Ce versant, limitant la réserve à l'est, a sans doute peu évolué depuis les relevés de DUVIGNEAUD mais une étude actualisée serait nécessaire.
Enfin, la partie nord de la réserve, au niveau du barrage, est boisée et semble correspondre à un ancien jardin (présence de ruines). On note d'ailleurs la persistance de plantes cultivées comme Aconit sp. et Prunus cerasifera cv atropurpurea. Cette zone comporte de nombreux sureaux (Sambucus nigra) âgés qu'il convient de respecter pour leur riche cortège de mousses et lichens épiphytiques.
Le Grand Courant accueille une bryoflore d'une richesse assez moyenne, un inventaire réalisé en mars 2015 (A. Sotiaux et al.) au niveau de la banquette alluviale et des suintements de bas de versant ayant permis de recenser près de 35 espèces de mousses et d'hépatiques.
On y trouve diverses espèces épiphytes sur peupliers, saules et sureaux, des espèces hygrophiles indifférentes et des espèces de suintements plutôt acides: Calliergonella cuspidata, Brachythecium rutabulum, Cirriphyllum piliferum, Kindbergia praelonga, Plagiomnium undulatum, Lophocolea bidentata, Polytrichastrum formosum, Orthotrichum affine, Frullania dilatata, Metzgeria furcata, Radula complanata, Isothecium myosuroides, Hypnum cupressiforme, Cryphaea heteromalla, Amblystegium serpens, Ulota crispa, Zygodon rupestris, Homalothecium sericeum, Orthotrichum lyellii, Funaria hygrometrica, Cratoneuron filicinum, Thuidium tamariscinum, Pellia epiphylla, Conocephalum conicum, Brachythecium rivulare, Plagiochila porelloides, Rhizomnium punctatum, Pseudotaxiphyllum elegans, Lophocolea heterophylla, Dicranum tauricum, Eurhynchium striatum, Plagiothecium succulentum, Thamnobryum alopecurum, Mnium stellare, Physcomitrium pyriforme.
Au niveau de l'écluse se développe, entre autre sur poutre en bois sortie de l'eau, Cinclidotus riparius et Leptodictyum riparium (voir aussi DUVIGNEAUD, 1966).
Aucune étude faunistique n'a encore été menée dans ce site peu connu et relativement peu accessible.
La cariçaie à Carex riparia héberge une importante population de maillot de Desmoulins (Vertigo moulinsiana), un minuscule escargot d'intérêt communautaire connu, avant sa découverte en 2006, d'une seule autre localité dans la vallée de la Sambre, à savoir les Marais de Labuissière (KERVYN et al. 2004). L'espèce semble cependant bien présente dans plusieurs autres zones marécageuses subsistant le long de la Sambre, en aval de Thuin. Très hygrophile, il affectionne exclusivement les stations marécageuses et reste actif durant l'hiver! Un autre gastéropode, l'hélice des bois (Arianta arbustorum), est assez abondant et ne semble pas avoir été signalé auparavant de la vallée de la Sambre, sa distribution wallonne étant centrée essentiellement sur la Haute-Meuse et le bassin de la Semois.
Les touradons de laîche paniculée constituent des refuges pour une faune variée dont certaines espèces spécialisées, comme l'hémiptère Delphacidae Stenocranus longipennis.
On relève encore la présence de deux coléoptères peu communs en Wallonie et qui sont essentiellement cantonnés aux roselières: le Carabidae Odacantha melanura et la coccinelle des roseaux Anisosticta novemdecimpunctata, espèce légalement protégée en Wallonie.