Le site des Prés de Virelles se situe dans l'extrémité sud de la province du Hainaut (région aussi appelée «botte du Hainaut»), entièrement sur la commune de Chimay, entre les villages de Virelles et Robechies. Il s'étend à quelques centaines de mètres à l'ouest de l'Etang de Virelles. Le site est bordé ou traversé par plusieurs petits chemins sans issue, dont la rue Lapeau le longeant au sud et menant au lieu-dit «Longs Préaux». Quelques rares fermes et habitations sont présentes dans les alentours.
On se situe à cet endroit dans le territoire éco-géographique de la Fagne-Famenne, au sein du district phytogéographique mosan.
Cet ensemble prairial entrecoupé de bosquets, de haies et de fossés, occupe une pente légère d'exposition nord-est et jouxte au nord un vaste massif forestier, le bois de Virelles. L'altitude décline du sud au nord, passant de 240 m à 210 m au niveau d'un petit ruisseau qui coule en partie le long de la lisière du bois de Virelles. Prenant sa source à l'ouest du site, au pied d'un versant boisé, ce ruisseau (non nommé sur les cartes topographiques) coule d'abord en direction du nord avant de bifurquer vers l'est au bout de 500 m. Après un parcours d'environ 2,5 km, il se jette dans l'étang de Virelles, dont les eaux se déversent ensuite dans l'Eau Blanche. L'ensemble appartient au bassin versant du Viroin (bassin hydrographique de la Meuse).
On notera aussi l'existence de deux plans d'eau de dimensions modestes: l'un situé dans l'extrémité sud-ouest du bois de Virelles (à proximité de la parcelle Natagora ouest), en milieu forestier, a une forme allongée et une longueur d'environ 50 m, tandis que l'autre, nettement plus étendu et grossièrement rectangulaire, mesure 135 m sur 75 m et s'étend en prairie, contre la lisière forestière.
Le sous-sol est composé de roches des étages Frasnien (partie sud) et Famennien (partie nord) du Système Dévonien. Les roches de ces étages sont composées de schistes noduleux et de schistes violacées avec psammites. Les sols qui s'y sont développés sont de nature argileuse modérément à très fortement gleyifiés, avec par endroit présence d'un horizon réduit. Le développement profil est non défini. On note localement la présence du substrat schisteux à faible profondeur. Ces sols argileux sont plus lourds en profondeur (ETIENNE, 2010).
Au plan de secteur, le site se trouve principalement en zone agricole mais inclus également quelques parcelles en zone forestière. La totalité de la zone est incluse dans le site Natura 2000 BE32036 «Vallée de l'Eau Blanche à Virelles». En outre, environ 17 hectares de terrains bénéficient actuellement d'un statut de protection, à savoir une réserve naturelle propriété de l'asbl Réserves Naturelles RNOB – Natagora (ETIENNE, 2010) et une réserve naturelle domaniale ("Prairies de l'Estrée").
Jusqu'à présent, seules les communautés végétales présentes au sein de la réserve naturelle des «Prés de Virelles» (3 parcelles pour un total de 8,5 ha) ont été identifiées et cartographiées en détail, et ce dans le cadre de l'élaboration de la demande d'agrément de Natagora (ETIENNE, 2010). La description qui suit est tirée de ce rapport. La végétation et la flore des autres parcelles (c'est-à-dire l'essentiel du site) restent à étudier.
Les milieux prairiaux
Le bloc est de la réserve est constitué de prairies fortement fertilisées à vulpin. On y trouve essentiellement Alopecurus pratensis et Holcus lanatus accompagnés d'Anthoxantum odoratum, Agrostis capillaris, Carex hirta, Cerastium fontanum, Phleum arvense, Plantago lanceolata, Ranunculus acris, Rumex acetosa, Taraxacum sp. ...
Plusieurs anciens drains ou fossés parcourent les prairies selon l'axe nord/sud. En bordure de ces drains, la végétation atteste du caractère plus humide avec la dominance d'Angelica sylvestris, Filipendula ulmaria, Juncus conglomeratus, J. effusus, J. inflexus, Lythrum salicaria, Phalaris arundinacea, Stachys palustris, etc.
Ce caractère humide, avec abondance de Juncus effusus et d'autres Carex sp., se retrouve localement par petites zones et caractérise la partie sud du bloc prairial, d'autres plantes apparaissant alors comme Carex cuprina, C. disticha, C. ovalis, Epilobium tetragonum, E. parviflorum, Potentilla anserina, Ranunculus repens, Cirsium arvense, C. palustre, Mentha aquatica, Persicaria amphibia (sous sa forme terrestre), Lotus pedunculatus, Glyceria fluitans,... Ce type de prairie s'apparente donc à une prairie de fauche humide moyennement fertilisée.
La présence localement abondante de certaines plantes à tendance rudérale comme Urtica dioica, Rumex sp., Phleum pratense atteste d'un passé de pâturage ou surtout de fauchage intensif où, le rendement primant, les amendements étaient importants. Ces amendements ont débordé dans les fossés et le ruisseau et ont quelque peu banalisé la flore. Une dynamique de recolonisation par des plantes diverses s'installe cependant et permet de supposer un potentiel de restauration d'une prairie humide sur sol pauvre à court terme et d'une mégaphorbiaie à flore diversifiée le long du ruisseau et des fossés.
Les haies bordent la réserve sur plusieurs centaines de mètres. Il s'agit de haies indigènes pauvres en espèces, composées essentiellement de Crataegus monogyna et de Prunus spinosa. Le long du cours d'eau, au nord des prairies, la haie est plus diversifiée avec Alnus glutinosa, Salix caprea, S. x rubens, S. x multinervis et diverses plantes herbacées comme Rubus caesius, Iris pseudacorus, Phalaris arundinacea, Epilobium hirsutum, Calystegia sepium,... Sur quelques dizaines de mètres, elle constitue une lisière feuillue avec le bois d'épicéa situé au nord de la prairie.
Les milieux forestiers et pré-forestiers
Parmi les parcelles à l'ouest de la réserve, un bloc de prairie abandonnée d'environ 2 ha est actuellement colonisé par un fourré sur sol neutrophile frais très diversifié, avec Cornus sanguinea, Crataegus monogyna, Euonymus europaeus, Prunus spinosa, Rhamnus cathartica, Rosa canina, Viburnum opulus,...
Le deuxième bloc est occupé par de la chênaie-charmaie famennienne sur sol hydromorphe.
Par plage et en lisière, apparaissent des espèces typiques des prairies humides oligotrophes du Molinion comme Succisa pratensis.
Au nord de ce bloc, une petite roselière à Phragmites australis s'est développée mais est actuellement fortement ombragée.
La réserve naturelle domaniale des Prairies de l'Estrée, située de part et d'autre de la rue du Bois de Virelles, s'étend sur 8,5 ha et comprend plusieurs habitats remarquables:
- une prairie de fauche humide à caractère oligotrophe, peu à moyennement fertilisée, abritant Dactylorhiza majalis et Scorzonera humilis;
- une prairie abandonnée à Filipendula ulmaria;
- des fossés colonisés par des éléments de mégaphorbiaies et de sources sur substrat mésotrophe;
- un pré de fauche ("Pré communal"), géré depuis des années par l'asbl "Virelles Nature";
- un réseau de haies.
La flore actuelle de la réserve Natagora est peu remarquable, l'intérêt actuel du site étant surtout d'ordre ornithologique et entomologique. Les inventaires menés jusqu'à présent ont permis d'identifier 80 espèces de plantes supérieures, la plupart étant répandues et communes. On épinglera néanmoins deux espèces intéressantes que sont Succisa pratensis et l'arbuste calcicole Rhamnus cathartica.
Certaines prairies, notamment celles incluses dans la réserve domaniale, renferment cependant encore diverses espèces sensibles et de grand intérêt patrimonial, dont la simple présence permet de se faire une idée du potentiel de recolonisation des parcelles appauvries de la réserve: on citera en particulier Scorzonera humilis, Dactylorhiza majalis, D. fuchsii, D. maculata, Carex flava, Succisa pratensis, Selinum carvifolia, Silaum silaus, la plupart étant des espèces rares et en forte régression partout en Wallonie... Le potentiel de restauration d'une prairie de fauche oligotrophe est donc évident et constituera un des objectifs du plan de gestion de la réserve.
La faune peuplant les Prés de Virelles n'est que très partiellement connue.
L'intérêt principal est d'ordre ornithologique. Situé à proximité de l'étang de Virelles, le site constitue un lieu privilégié de nidification, d'hivernage et de halte migratoire pour de nombreuses espèces intéressantes.
En période de nidification, les éléments les plus remarquables sont la pie-grièche écorcheur (Lanius collurio) et le râle des genêts (Crex crex). La première espèce niche annuellement dans les haies qui bordent les prairies ainsi que dans les coupes forestières. Le site apparaît particulièrement favorable pour ce passereau prédateur puisqu'au minimum 15 couples nicheurs y sont recensés. Quand au râle des genêts, oiseau emblématique des prairies semi-naturelles de la Fagne-Famenne, sa présence est très discrète et des chanteurs s'y manifestent de temps à autre.
D'autres espèces nicheuses intéressantes sont à noter, dont le bruant jaune (Emberiza citrinella), le bruant des roseaux (Emberiza schoeniclus), la locustelle tachetée (Locustella naevia), le tarier pâtre (Saxicola torquatus), le rougequeue à front blanc (Phoenicurus phoenicurus), la bondrée apivore (Pernis apivorus). En outre, certaines espèces nichant à l'étang de Virelles fréquentent régulièrement le site pour y chasser, comme par exemple le busard des roseaux (Circus aeruginosus), le faucon hobereau (Falco subbuteo), les hirondelles de fenêtre (Delichon urbicum) et de cheminée (Hirundo rustica), etc.
Enfin, plusieurs espèces remarquables fréquentent très régulièrement les prairies humides, soit lors de leur passage migratoire soit durant l'hiver: c'est le cas de la bécassine des marais (Gallinago gallinago), présente parfois par dizaines d'exemplaires, la bécassine sourde (Lymnocryptes minimus), la grande aigrette (Ardea alba), la pie-grièche grise (Lanius excubitor), le pipit spioncelle (Anthus spinoletta) ou encore le tarier des prés (Saxicola rubetra).
L'entomofaune est largement méconnue et seuls deux groupes, habituellement abordés par les naturalistes, peuvent être considérés comme raisonnablement bien documentés: il s'agit des papillons de jour (ou lépidoptères rhopalocères) et des odonates (ou libellules).
En tenant compte de l'état fragmentaire de l'information, la diversité des papillons de jour peut être considérée comme relativement élevée, avec 27 espèces recensées. Parmi celles-ci, figurent divers éléments d'intérêt patrimonial comme la grande violette (Brenthis ino) liée aux prairies humides à reine des prés, le nacré de la ronce (Brenthis daphne), récemment installé en Belgique et confiné aux lisières et ronciers bien ensoleillés, le petit collier argenté (Boloria selene), espèce typique des prairies humides acidophiles et des bas-marais, ou encore le thécla du prunier (Satyrium pruni) dépendant des fourrés, lisières et haies riches en prunelliers. Une autre espèce peu commune, plus forestière, le petit mars changeant (Apatura ilia), a été notée à plusieurs reprises sur la lisière nord du site, en contact avec le bois de Virelles.
Dans le cas des libellules, la synthèse des données disponibles jusqu'en 2015 permet d'établir que le site des Prés de Virelles présente un intérêt élevé puisque pas moins de 26 espèces ont été contactées, essentiellement au niveau du plus vaste des deux plans d'eau. Cette diversité est certainement favorisée par la proximité d'un important réservoir de population, à savoir l'étang de Virelles. On soulignera surtout les mentions répétées de leste brun (Sympecma fusca), mais aussi l'observation plus occasionnelle de la leucorrhine à gros thorax (Leucorrhinia pectoralis) en 2012 et de la cordulie à taches jaunes (Somatochlora flavomaculata) en 2009.
Les autres groupes d'insectes n'ont encore fait l'objet d'aucun inventaire précis. La présence de trois orthoptères intéressants mérite néanmoins d'être d'ores-et-déjà signalée: le criquet ensanglanté (Stethophyma grossum), grande espèce très hygrophile cantonnée aux prairies humides riches en joncs; le conocéphale des roseaux (Conocephalus dorsalis), sauterelle brachyptère également confinée aux stations herbeuses très humides; et le criquet marginé (Chorthippus albomarginatus), très localisé en Wallonie où il occupe les prairies méso-hygrophiles.